Notes au radiodiffuseur
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Selon un rapport de 2021, portant sur les violences basées sur le genre (VBG) au Mali, 38 % de cas concernent les violences sexuelles. Vingt-trois pourcent d’entre elles portent sur des cas de viols. Ces violences s’exercent presque toujours à l’encontre des femmes, que ce soit au sein ou en dehors du couple.
La violence conjugale est le résultat de comportements, d’actes ou d’attitudes de l’un des partenaires ou ex-partenaires. Ces actions visent à contrôler, à contraindreou à dominer l’autre. La violence conjugale s’agit d’un type de violence basée sur le genre et impliquent les agressions, les menaces ou les contraintes verbales, physiques, sexuelles et économiques. Ces violences ont des conséquences physiques, morales ou professionnellessur la victime. Elles affectent également les parents et les personnes proches de la victime etde l’agresseur, surtout les enfants.
D’un point de vue juridique, les violences conjugales constituent un délit. Mais en raison des pesanteurs socioculturelles au Mali, les victimes n’engagent pas des poursuites pénales contre les auteurs de ces crimes. Plusieurs associations et ONG maliens se mobilisent pour le vote d’une loi sur les violences basées sur le genre.
Le texte radiophonique vous aide à comprendre les causes des violences conjugales et leurs conséquences pour la survivante et les autres membres de la famille. Il est basé sur des interviews réelles avec trois personnes : une survivante de la violence conjugale, une avocate spécialiste des violences basées sur le genre et un personnel d’un ONG.
Pour produire ce texte sur votre station, vous pouvez choisir d’utiliser des voix d’acteurs.trices pour incarner le rôle des personnes ressources. Dans ce cas, dès le début de l’émission, assurez-vous d’informer votre auditoire que les voix utilisées sont celles d’acteurs.trices, et non celles des personnes interrogées à l’origine. De même, vous pouvez vous inspirer de ce texte pour faire des recherches sur un sujet similaire touchant à votre région, et écrire votre propre texte. Par exemple, vous pouvez poser les questions suivantes à vos interlocuteurs :
- Qu’est-ce que la violence conjugale?
- Quelles sont les causes de la violence conjugale?
- Comment se manifeste la violence conjugale?
- Quelles sont les conséquences de cette violence et les mesures d’accompagnement des survivantes?
Durée estimée du texte radiophonique avec la musique, l’intro et l’extro : 30 minutes.
Texte
Aujourd’hui avec nos invités et invitées, nous parlerons des violences conjugales, une forme de violence basée sur le genre encore appelée VBG. Ils évoqueront les causes et les conséquences des violences basées sur le genre et aussi, les dispositions des associations et des ONG pour s’y adresser. Ils discuteront également des actions menées par les associations et les ONG pour surmonter les obstacles à l’application des lois contre ce type de violence.
Nous allons nous entretenir avec trois personnes ressources. La première, Madame Aminata Traoré est une survivante de violence conjugale et enseignante dans une école privée à Djoro, dans la région de Ségou. Elle nous expliquera comment elle a survécu à cette violence.
Ensuite, nous nous entretiendrons avec Madame Mariam Traoré, avocate et spécialiste des violences basées sur le genre. Elle partagera son expérience et les méthodes utilisées pour aider les femmes survivantes. Enfin, nous recevrons Monsieur Ségné Sangaré. Psychologue, conseiller d’hygiène de vie et membre de l’association des psychologues du Mali, il abordera le même sujet mais sous l’angle de l’impact psychologique de violence conjugale sur les femmes et les enfants.
Un jour, il m’a frappé avec une petite chaise en bois qui trainaitdans la maison. J’avais du sang partout et des blessures sur la tête. Mais malgré mes blessures, il ne me laissait pas dormir sans satisfaire son désir sexuel. J’avais l’impression que le fait de me voir pleurer l’excitait. J’ai fait deux fausses couches à cause de ces violences. J’espérais qu’il allait changer, mais la situation s’empirait.
Quelques années après, je suis tombée enceinte de ma fille. Mais la situation ne s’arrangeait pas, au contraire. Pendant des années, j’ai subi des violences domestiques de toute sorte avec mon mari. Il ne me soutenait pas financièrement. Avec mon salaire d’institutrice, j’étais obligée de payer les ordonnances et de nourrir mes enfants et lui. En un mot, je jouais le rôle que lui confère la loidu mariage au Mali. Elle stipule que l’homme doit nourrir et protéger sa femme.
Pendant ce temps, il ne cherchait pas à travailler. Et quand je ne pouvais pas supporter les charges, il me maltraitait physiquement et m’insultait. Les violences sexuelles, verbales et physiques que j’ai subies ont brisé ma santé mentale et m’ont condamné à vivre avec le stress, la dépression, la colèreet la haine envers les hommes en général.
Merci d’avoir accepté notre invitation. Alors Mariam, qu’est-ce qu’une violence conjugale?
Ainsi, nous avons remarqué que certaines femmes ont du mal à poursuivre leur étude ou leur carrière professionnelle après le mariage suite à l’opposition de leurs conjoints. Selon les statistiques, une femme sur deux âgée de 15 à 49 ans au Mali avait déjà subi au moins une fois dans sa vie, une violence physique, émotionnelle ou sexuelle. La même proportion de femmes fait également face à des violences émotionnelles ou physiques lors d’une rupture.
Malheureusement, le contexte social demande souvent que la femme supporte et même pardonner son conjoint pour cette violence. Celles qui abandonnent leur foyer sont stigmatisés par la société. Mais la violence, la souffrance que l’on impose à l’autre conjoint, détruit l’harmonie de la vie conjugale et scelle le sort des enfants du couple.
Les organisations de défense des droits humains au Mali dénoncentles violences domestiques dans toutes ses formes. Mais malgré les appels répétés aux réformes, peu de progrès sont réalisés pour une prise en charge de ce type de violences systématique et efficace.
Dans la société malienne, beaucoup de stéréotypes pèsent sur l’épouse et qui ne sont pas valables pour la maman, la sœur et la fille. Par exemple, j’aime ma maman, j’aime ma sœur, j’aime ma fille mais je ne dois pas faire confiance à mon épouse.
Dernièrement, la violence survient en cas de préjugés envers les femmes. Dans la société malienne, l’homme est traditionnellement considéré comme le plus important car c’est lui qui épouse la femme, nourrit la famille et la soigne. Même dans le partage de l’héritage des biens de la famille, selon nos coutumes, l’homme reçoit le double des parts attribuées à la femme. Alors, si les hommes pensent que les femmes sont inférieures, ou que les femmes n’ont pas la même autorité que les hommes, les femmes seront traitées avec violence. En gros, la violence conjugale est le résultat des iniquités sociales.
Les survivantes des violences conjugales veulent surtout que ces violences cessent; mais souvent elles ne veulent pas intenter une action en justice contre l’auteur. Aussi, les pressions sociales des enfants ou des deux familles peut également empêcher la victime d’engager une action en justice contre le conjoint qui l’abandonne, l’insulte ou le frappe. Les femmes maliennes sont très attachées à ses vies de couple et à l’avenir de ses enfants et pourraient être convaincues qu’elles doivent supporter longtemps les dérives de son partenaire avant de décider de briser le nombre d’années de leur vie de couple.
Ainsi, il faut un meilleur accès à l’éducation des filles, davantage de possibilités d’activités génératrices de revenus pour les femmes, ainsi qu’une meilleure représentation des femmes dans tous les domaines des secteurs publics et privés, y compris aux postes de direction, ne peut qu’aider. Tout ce que l’homme peut faire, la femme aussi peut le faire en matière de travail. Les femmes et les hommes doivent travailler ensemble pour le développement de la nation.
M. Sangaré qu’est-ce qui pousse certains hommes à être violents envers leurs partenaires?
Elles ont peur de ses menaces et pour l’avenir de leurs enfants. Elles craignent des conséquences si elles devaient le quitter. Elles ont peur de perdre ce qu’elles ont mis tant d’années à construire. Elles croient ne pas pouvoir y arriver seule. Elles se sentent responsables de « briser » la famille. Elles ignorent les lois qui les protègent ou croient que les lois ne peuvent rien pour les protéger. Elles aiment leurs époux, mais pas le comportement violent qu’ils affichent.
De ce fait, elles sont prises aux pièges, non seulement à cause de leurs croyances mais aussi en raison de leurs attitudes.
Pour les enfants, c’est encore plus compliqué.Ils vivent dans un contexte basé sur la domination et l’agressivité. Ils sont confrontés au choix entre les parents et vivent dans l’angoisse. De plus, la violence est rarement évoquée au sein de la famille. Le silence et le tabou qui entourent généralement ces situations font que les enfants ne reçoivent pas d’explications quant aux actes qu’ils observent et subissent. Ils n’ont pas donc la possibilité d’exprimer ce qu’ils ressentent, ni d’être rassurés. Laissés dans un état de stress et de choc, ces enfants peuvent développer des problèmes affectifs et comportementaux qui auront des conséquences sur leur développement.
Laviolenceenvers les femmes englobe laviolencephysique, mais aussi économique, sexuelle et psychologique. Elle touche toutes les sociétés, développées ou en développement et toutes les classes sociales. Ses conséquences sont dévastatrices pour la société dans son ensemble.
Nous sommes au terme de notre émission d’aujourd’hui. Merci à tous nos invités et vous tous et toutes qui nous suivez. On se dit à bientôt pour une autre émission.
Acknowledgements
Remerciements :
Rédigé par : Cheick Bounama Coulibaly, journaliste-enseignant fondation Maarif, fraternité production, Bamako, Mali.
Révisé par : Madame Mariam Traoré, avocate spécialiste des VBG pour le compte de WiLDAF.
Information sources
Entretiens et interviews :
Madame Aminata Traoré, survivante des VBG et enseignante dans une école privée à Djoro, dans la région de Ségou. Interview réalisée le 26 Mai 2022.
Madame Mariam Traoré, avocate spécialiste des VBG pour le compte de WiLDAF. Interview réalisée le 15 Juin 2022.
Monsieur Ségné Sangaré, psychologue, conseiller d’hygiène de vie et membre de l’association des psychologues du Mali. Interview réalisée le 13 Juin 2022.
Références
Selon un rapport de l’Institut d’études de sécurité (https://issafrica.org/fr), une Malienne sur deux âgée de 15 à 49 ans avait déjà subi des violences physiques ou sexuelles.
Cette ressource a été produite grâce à l’initiative « HÉRÈ — Bien-être des femmes au Mali » qui vise à améliorer le bien-être des femmes et des filles en matière de santé sexuelle et reproductive et à renforcer la prévention et la réponse aux violences basées sur le genre dans les régions de Sikasso, Ségou, Mopti et le district de Bamako au Mali. Le projet est mis en œuvre par le Consortium HÉRÈ – MSI Mali, en partenariat avec Radios Rurales Internationales (RRI) et Women in Law and Development in Africa (WiLDAF) grâce au financement d’Affaires mondiales Canada.