Des communautés forestières génèrent des revenus tout en préservant leur environnement

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Des populations de nombreux animaux sauvages et de plantes sont en déclin. Par exemple, on pense qu’il y avait entre trois et cinq millions d’éléphants africains dans les années 30 et 40. Aujourd’hui, ils sont probablement moins d’un demi million. Il fut un temps où le commerce illégal de l’ivoire constituait la plus grande menace, mais depuis l’interdiction émise sur le commerce de l’ivoire en 1989, le problème le plus important est la perte d’habitat dû au déboisage et à l’agriculture. Pour certaines espèces, la chasse au gibier est la menace la plus éminente.

Les conflits avec des espèces sauvages peuvent provoquer des dommages importants sur les cultures de certaines communautés, voire même des pertes de vie humaine. Ces situations sont dues en grande partie au développement de la population humaine jusque dans l’habitat de la faune sauvage. Les villageois doivent néanmoins trouver de la nourriture et générer des revenus. Comment les espèces sauvages et les humains peuvent-ils vivre harmonieusement ensemble?

Dans la plupart des cas, les gouvernements et les ONG travaillent avec les communautés en vue de trouver des moyens durables d’interagir et de préserver leur environnement naturel. Dans d’autres cas, les communautés elles-mêmes ont trouvé des façons de préserver leur environnement, tout en parvenant à se nourrir elles-mêmes et à générer des revenus.

Ce texte radiophonique parle d’un projet dans la région du Sud-Ouest du Cameroun. Une ONG internationale importante – Worldwide Fund for Nature (WWF) – aide des communautés forestières à développer des entreprises qui génèrent des revenus des espèces sauvages, sans détruire la forêt. Si vous cherchez à savoir ce qui se passe dans votre région, vous pouvez trouver des projets similaires menés par WWF ou d’autres organismes.

Ce texte radiophonique est basé sur de vraies entrevues. Vous pouvez utiliser ce texte comme une inspiration pour faire des recherches et écrire un texte sur un sujet similaire dans votre région. Ou, vous pouvez choisir de produire ce texte à votre station en utilisant des voix acteurs pour représenter les interlocuteurs.

Texte

ANIMATEUR :
Chers auditeurs et auditrices, bonjour. Saviez vous que vous pouvez contribuer à la protection de la nature? Eh bien, l’émission d’aujourd’hui va vous permettre de comprendre comment. L’émission parle des expériences de trois villageois, dans une région de forêt située dans la région du Sud-Ouest du Cameroun et comment ils ont été appuyés par une organisation dénommée World Wide Fund for Nature ou encore WWF.

Musique

ANIMATEUR :
Peu importe où elles s’installent, les populations s’appuient sur leur environnement immédiat pour produire et générer des revenus. Dans les régions de forêt, les populations coupent les arbres pour en utiliser le bois ou les écorces à diverses fins, ou même tout simplement pour en récolter du miel. De même, elles tuent les animaux de la forêt pour se nourrir ou pour générer des revenus. Les produits forestiers sont très prisés. Mais, lorsqu’il s’agit des plantes médicinales ou des animaux, ces populations détruisent souvent les animaux et les plantes de la forêt pour générer des revenus et pour satisfaire leurs besoins quotidiens.

La destruction de la forêt a des conséquences multiples aussi bien dans l’environnement immédiat que sur la planète Terre tout entière. Par exemple, la destruction des forêts produit des grandes variations de température qui accompagnent les changements climatiques. Cette même destruction mène à la perte de nombreuses espèces animales et végétales.

Plusieurs organisations travaillent de ce fait pour la préservation de la forêt. C’est le cas de la World Wide Fund for Nature (WWF), organisation internationale créée depuis 1961. La mission de cette organisation est d’arrêter la dégradation de l’environnement naturel de la planète et de construire un avenir où les humains vivent en harmonie avec la nature en conservant la diversité biologique du monde, en faisant la promotion de la réduction de la pollution et du gaspillage et en veillant à ce que l’utilisation des ressources naturelles renouvelables soit durable.

Le WWF est installé au Cameroun depuis 1989 et conduit quatre programmes, parmi lesquels le « WWF Coastal Forest Program » dans les régions du Sud-Ouest et du Littoral au Cameroun. Les entrevues que vous allez entendre ont été produites dans un des sites du programme dans la région du Koupé Manengouba, dans la région Sud-Ouest du Cameroun. Parmi les différents « points chauds » de biodiversité dans cette région, la région du Koupé Manengouba se démarque des autres.

Bruit de forêt : cris d’oiseaux et autres bruits d’animaux

Koupé est une zone montagneuse où culminent des montagnes de plus de 2000 mètres d’altitude. Elle bénéficie d’une importante couverture forestière, abritant certaines des plus vieilles forêts d’Afrique. En plus des plantes rares qui n’existent nulle part ailleurs, il y a de nombreuses espèces animales qui sont en danger d’extinction ainsi que des espèces végétales : des primates telles que le mandril; des espèces rares telles que le caméléon; et plus de 300 espèces d’oiseaux.

Face à la menace croissante de la destruction de l’environnement dans cette région, WWF y mène des activités depuis la fin des années 90. Ces activités viennent compléter et renforcer le travail lancé par d’autres organisations de protection de la nature telles Birdlife International et le Ministère de la Forêt et de la Faune du Cameroun qui a organisé dans ces villages au cours des années 1999-2000, une campagne pour inviter la population à ne plus tuer les animaux en danger d’extinction et ne plus faire la coupe illégale des arbres dans la forêt.

Le WWF travaille entre autres sur les communautés vivant dans la région. Il les sensibilise et les forme à générer des revenus sans détruire la forêt en les appuyant financièrement, matériellement et techniquement à mener leurs nouvelles activités et les aide à trouver des acheteurs pour leurs produits. De cette manière, WWF aide à réduire la pauvreté au sein des communautés locales et les aide à mettre en œuvre des méthodes de gestion durable de la forêt.

Écoutez l’histoire de Ngol’epie, Pa Atabe, et Mbonteh, trois personnes de Koupé Manengouba qui, avec l’appui de WWF, contribuent à leur manière à la gestion durable de la forêt.

Musique

ANIMATEUR :
Nous allons d’abord écouter Ngol’epie, qui vit à Nyasoso, petit village situé à proximité de la forêt du Koupé Manengouba.

ANIMATEUR :
Bonjour M. Ngol’epie, comment allez vous ?

NGOL’EPIE :
Bonjour. Je vais bien.

ANIMATEUR :
Pouvez vous raconter aux auditeurs comment et pourquoi vous êtes passé de chasseur à éleveur ?

NGOL’EPIE:
Bien sûr. Je vis à Nyasoso avec ma famille, et comme chasseur, je me rendais quotidiennement dans la forêt pour tuer des gibiers destinés à la vente, et j’extrayais également de certains arbres des écorces, pour pratiquer la médecine traditionnelle.

Il arrivait aussi que je serve comme guide aux ONGs qui venaient travailler dans la forêt. Grâce aux campagnes de sensibilisation organisées par WWF, j’ai appris que mes activités de chasse détruisaient la forêt.

Un jour donc, je me rends dans la forêt pour chercher des plantes médicinales. Je vois un rat palmiste sortir d’un trou. Je l’attrape et avec l’aide des chiens de chasse qui agrandissent le trou, j’en capture plusieurs que je mets dans mon sac. Avec ma femme, je décide de tenter l’élevage de ces rats. En premier, j’ai fabriqué à cet effet une cage en bois qui a malheureusement été rongée par les rats. Mais, grâce aux conseils et au soutien matériel de WWF, j’ai fabriqué une nouvelle cage en fil de fer et je continue l’élevage des rats. Je les nourris avec du poisson sec, de la banane, des tubercules, des noix, des herbes des champs telles que les sissongos, et les feuilles de patate.

Pour m’encourager, WWF m’a acheté un « pousse pousse » pour faciliter le transport des produits avec lesquels je nourris les rats. Le WWF me donne continuellement des conseils qui m’aident à ne pas mettre de pression sur les animaux de la forêt en particulier, et la forêt en général.

Après un an de cette activité, les rats atteignent la maturité et à ma grande surprise, j’arrive à les vendre à un bon prix.

Désormais convaincu que l’élevage peut me permettre de gagner ma vie, j’ai utilisé l’argent de cette première vente pour acheter des porcs, afin de diversifier l’élevage.

ANIMATEUR :
M. Ngol’epie, qu’avez-vous fait pour que les autres profitent de votre expérience?

NGOL’EPIE:
Suite aux conseils du WWF, j’ai créé un groupe d’initiative commune de sept personnes pour gérer l’élevage. Le group est connu dans la langue local Bakossi comme étant « Dion de Dienge. » L’activité est tellement rentable que la construction d’une grande cage en aluminium est en cours. J’ai finalement compris avec les autres membres du groupe, que je peux vivre près de la forêt, et gagner de l’argent sans être obligé de tuer des animaux dans la forêt.

ANIMATEUR :
Merci M. Ngol’epie.

Musique

ANIMATEUR:
Après l’expérience de M. Ngol’epie, voici l’expérience de Pa Atabe. Il est fonctionnaire retraité vivant à Tombel, village environnant de la grande forêt du Koupé Manengouba. Il est engagé dans la culture domestique du miel.

En effet, le miel de forêt a un goût particulier et est vendu assez cher dans les villes. Pour récolter le miel de forêt, les populations coupent les arbres qui abritent les ruches et de ce fait, détruisent les arbres.

Écoutons l’expérience de Pa Atabe.

Bonjour Pa Atabe

PA ATABE :
Bonjour, bonjour à tous les auditeurs.

ANIMATEUR :
Pouvez-vous nous faire part de votre expérience dans la culture du miel, et avec WWF ?

PA ATABE :
Merci. Grâce à l’appui de WWF, j’ai eu l’opportunité de suivre diverses formations sur la culture du miel en Grande-Bretagne et au Cameroun. Ici, à Tombel, je formerai d’autres membres, et créerai avec eux un Groupe d’Initiative Commune ou GIC dénommé Tombel-Bangem Beefarmers Association (TOBA). Avec le soutien du WWF, nous apprendrons à fabriquer des ruches en bois. Nous recevrons des vêtements de protection, des tables, des bouteilles, de la cire, des tissus filtres, des sceaux et une pépinière.

Pendant les mois de juillet, août et septembre, les membres de TOBA vont brûler de la cire d’abeille à l’entrée des ruches; l’odeur dégagée par cette cire attire les abeilles. De même, ils vont planter à proximité de la ruche, les pépinières du caliendra, espèces d’arbres recherchés par les abeilles. Ainsi attirées à l’arbre caliendra, les abeilles s’installent et construisent progressivement leurs ruches. Plusieurs mois plus tard, c’est-à-dire aux mois de mars, d’avril et de mai, le miel est récolté et chaque membre apporte sa récolte au siège du GIC. La vente est centralisée et se fait auprès des nombreux consommateurs locaux et des villes voisines.

ANIMATEUR :
Quels sont les bénéfices que vous tirez de la culture du miel?

PA ATABE :
Les bénéfices issus de cette activité sont de plusieurs ordres : TOBA produit environ 2000 litres de miel naturel chaque année, ce qui génère un revenu brut d’environ USD 9000. Les revenus des membres du TOBA se sont accrus et l’activité a permis de créer des emplois pour les jeunes. La pression qui était exercée sur la forêt par la coupe des arbres pour la récolte du miel a été supprimée.

ANIMATEUR :
Enfin, la troisième expérience que nous vous invitons à suivre est celle de M. Mbonteh qui vit à Tombel.

ANIMATEUR :
Bonjour M. Mbonteh. Comment allez-vous aujourd’hui?

M. MBONTEH :
Bonjour! Ça va bien. Merci.

ANIMATEUR :
Vous êtes responsable et acteur d’une association qui contribue à préserver l’environnement forestier, à travers l’élevage des escargots qui est une chair très prisée et recherchée dans les centres urbains. Comment s’est déroulée votre expérience?

M. MBONTEH :
Les populations de Bakossi comme celles vivant dans d’autres zones forestières, non seulement ramassaient les escargots dans la forêt pour les vendre, mais en profitaient pour détruire certaines espèces présentes dans la forêt. Par exemple, un lièvre de passage était aussitôt fusillé. Bien que les Bakossi étaient allés chercher des escargots, tout petit animal de passage devenait une cible.

Suite aux campagnes de sensibilisation organisées par WWF en 2001 avec l’ancien projet forestier du Mont Koupé, je me suis intéressé avec d’autres villageois, à l’élevage des escargots dans les maisons.

Le WWF nous a appuyés pour nous organiser en groupement autour de cette activité. C’est ainsi que l’association dénommée Community Action for Development (CADEV) a vu le jour. Parallèlement le WWF nous a donné une formation dans le domaine du management et du montage des projets.

L’élevage des escargots est très délicat. Entre la ponte des œufs et la maturité, il se passe trois à quatre mois. Les éleveurs changent trois fois de cages durant cette période. Chacune des cages doit respecter des conditions d’humidité et d’aération assez précises. L’alimentation des escargots est à base de papaye, de macabo, de légumes verts à feuilles, et de banane.

Durant tout ce processus, le WWF a accompagné le groupe à travers l’appui en matériel, des conseils, des formations conduites au Cameroun ou supportées à l’extérieur. C’est ainsi que j’ai eu l’opportunité de participer à des ateliers de formation au Nigéria, au Chili et en Afrique du Sud. Le WWF aide également le CADEV à transporter les escargots vers les points de vente et à négocier des marchés extérieurs où la chair d’escargot est recherchée. Les commandes en provenance du Nigéria et de l’Italie sont régulières.

Cette collaboration avec le WWF a considérablement amélioré les revenus des membres du groupe dont l’activité génère pour le groupe CADEV un profit mensuel d’environ 210 USD. Je suis devenu un expert et j’assure aussi la formation d’autres groupes. Plusieurs familles élèvent les escargots, améliorant ainsi leurs revenus et leur niveau de vie. Parce que les escargots ne sont plus récoltés en forêt, mais ils s’obtiennent auprès des éleveurs, les pressions sur la forêt ont diminués.

Musique

ANIMATEUR :
Chers auditeurs et auditrices, en conclusion, nous pouvons comprendre qu’en concentrant son activité sur le renforcement des communautés pour une gestion durable des ressources naturelles dans la région du Sud-Ouest du Cameroun, le WWF a pu soutenir plus de 33 organisations communautaires qui sont impliquées dans diverses activités génératrices de revenus telles que l’apiculture, et l’élevage d’escargots, de porcs, des aulacodes et de rats géants. Ces groupes ont mené des activités respectueuses de l’environnement tout en améliorant progressivement leur niveau de vie.

Acknowledgements

Rédaction : Serge Kuate, PROTEGE QV, Cameroon, un partenaire de radiodiffusion de Radios Rurales Internationales.

Révision : Merci à Ngwene Theophilus, agente socio-économique, WWF Coastal Forests Program, au Cameroun, Janet MOLISA, Agent des communications, WWF Coastal Forests Program, au Cameroun, le Dr. Atanga Ekobo, Coordonnateur du WWF Coastal Forests Program, au Cameroun, Peter Ngea, gestionnaire des communications, à la Coordonation des Programmes de la région de l’Afrique Central pour WWF (CARPO), à Yaoundé, au Cameroun, et Sylvie Siyam, Présidente de PROTEGE QV.

Information sources

Entrevues réalisées le 11 février 2009