Des Jachères Améliorées Pour les Agriculteurs Africains

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L’article suivant est adapté d’un document de 56 pages publié par le Centre mondial de l’agroforesterie (ICRAF) sous le titre ‘Improved fallows for western Kenya: An extension guideline’. Il est disponible en ligne (en anglais seulement). Veuillez consulter les coordonnées du Centre mondial de l’agroforesterie à la fin de cet article.

Texte

Quelle est la différence entre une jachère naturelle et une jachère améliorée?

La jachère naturelle est tout simplement une mise au repos des terres sans les cultiver. Habituellement, on laisse le champ libre à la végétation naturelle pendant un certain temps afin de restaurer la fertilité du sol. La jachère améliorée est également une période de mise au repos des terres sans les cultiver, mais l’agriculteur plante des arbres à légumineuses, des arbustes ou des cultures herbacées de couverture sur la terre au repos.

De quelle façon les jachères améliorées peuvent-elles aider les agriculteurs?

Les jachères améliorées aident les agriculteurs à restaurer la fertilité du sol de leurs terres beaucoup plus rapidement que les jachères normales, si bien qu’elles sont utiles lorsqu’il n’est plus possible de laisser la terre en jachère pendant un certain temps. En outre, le sol devient très fertile et il faut peu ou pas d’engrais pour obtenir une récolte formidable.

L’élaboration de jachères améliorées

Un des plus grands défis de tous les agriculteurs consiste à maintenir la fertilité de leurs sols. Traditionnellement, les agriculteurs restauraient la fertilité des sols en laissant une partie de leurs terres non cultivées durant de nombreuses années, pendant qu’ils cultivaient de nouvelles terres plus fertiles pour la production alimentaire. La croissance rapide de la population humaine a toutefois réduit la superficie des terres dont disposent les agriculteurs et a déstabilisé ce système traditionnel de maintien de la fertilité des sols. Par conséquent, les jachères naturelles de longue durée ne sont plus possibles. Elles sont remplacées par des jachères de courte durée qui ne durent qu’une ou deux saisons. La culture continuelle des terres est dorénavant aussi une pratique agricole courante. Par exemple, dans l’ouest du Kenya, environ la moitié des agriculteurs laissent 10 à 25 % de leurs terres labourables en jachère pendant la courte saison des pluies, mais étant donné que la période de mise en jachère ne dure pas assez longtemps pour améliorer suffisamment la fertilité des sols, les rendements des récoltes ultérieures sont en général plus faibles que ceux des saisons précédentes.

Pour atténuer ce problème, les jachères améliorées peuvent remplacer les jachères naturelles. Cela signifie que les agriculteurs font pousser des arbres à légumineuses et des arbustes ou des cultures herbacées de couverture sur les terres en jachère. Du moment que les sols ont assez de phosphore, de telles jachères peuvent constituer un moyen pratique de restaurer l’azote dans le sol lorsqu’elles sont utilisées en rotation avec les cultures.

Les avantages des jachères améliorées

Des recherches effectuées dans certaines régions de l’Afrique ont révélé que les arbres et les arbustes que l’on fait pousser dans des jachères améliorées reconstituent rapidement la fertilité des sols en une ou deux saisons de croissance au maximum. Par conséquent, elles raccourcissent le temps nécessaire pour restaurer la fertilité des sols. Elles fournissent également à l’agriculteur d’autres produits, comme du bois de chauffage et des piquets. En plus d’améliorer la fertilité des sols, les jachères plantées peuvent servir à lutter contre la striga (Striga hermonthica). Elles peuvent également contrôler d’autres mauvaises herbes comme le chiendent, surtout si les jachères sont répétées fréquemment ou durent longtemps – 18 mois ou davantage. En incorporant la biomasse dans le sol, on améliore également de beaucoup la structure du sol qui permet, par exemple, d’accroître la capacité de rétention de l’eau.

Quand les agriculteurs établissent-ils une jachère améliorée?

On peut introduire les arbres et les arbustes à des périodes différentes selon l’endroit. Par exemple, au Kenya, la pratique la plus courante consiste à planter des arbres et des arbustes pendant la longue saison des pluies (habituellement après le premier ou le deuxième désherbage, selon la situation des précipitations dans la région). On les laisse pousser seuls pendant la courte saison des pluies et on les coupe l’année suivante au début de la longue saison des pluies. Dans les pays situés plus au sud, comme le Malawi et la Zambie, où il n’y a pas deux saisons des pluies, les gens plantent les arbres et les arbustes juste après avoir semé le maïs. Après la récolte du maïs, ils laissent les arbres. Durant la deuxième saison, aucune culture n’est plantée. Durant la troisième saison, les arbres sont abattus et toutes les feuilles et les déchets sont incorporés dans le sol pendant la préparation des terres et des billons – et servent donc d’engrais. Dans les régions à une seule saison des pluies, les jachères améliorées restent donc pendant une période plus longue. Cette mesure est également recommandée pour les champs ayant une très faible fertilité des sols ou pour les champs infestés par la striga, le chiendent ou d’autres mauvaises herbes difficiles à contrôler.

Quelles espèces à ‘jachère’ les agriculteurs peuvent-ils planter sur la terre au repos?

Une jachère est ‘améliorée’ par rapport à une jachère naturelle uniquement si les espèces de plantes utilisées sont plus efficaces que les espèces trouvées dans la végétation locale – au moins pour améliorer les propriétés chimiques et physiques du sol. Une bonne plante à jachère doit posséder plusieurs des caractéristiques suivantes.

  • Elle pousse vite et ferme rapidement le couvert, pour supprimer les mauvaises herbes et contrôler l’érosion.
  • Elle a des racines profondes afin de pouvoir puiser les nutriments qui se trouvent loin dans le sol.
  • Elle fixe l’azote de façon biologique à partir de l’atmosphère, accumulant ainsi de bons nutriments.
  • Elle fournit des produits supplémentaires comme des piquets, du grain et du fourrage.
  • Elle ne se propage pas comme une mauvaise herbe dans les zones cultivées.
  • Elle produit facilement des semences ayant une longue viabilité.
  • Elle résiste aux parasites et aux maladies dans la région.

Comment fonctionne une jachère améliorée?

À la fin de la période de mise en jachère, les arbres, les arbustes ou les légumineuses herbacées sont coupés et la biomasse (feuilles, brindilles, branches) est incorporée dans le sol pendant la préparation des terres pour la prochaine récolte. Après des jachères améliorées d’espèces à croissance rapide, le rendement de maïs peut être deux à trois fois supérieur à celui du maïs en culture continue sans ajout d’engrais. L’effet d’une jachère de huit mois peut durer une ou plusieurs saisons, selon le niveau de dégradation du sol. Dans l’ouest du Kenya, des milliers d’agriculteurs pratiquent actuellement des systèmes de jachères améliorées et ont augmenté considérablement les rendements de leurs récoltes. Bon nombre de ces agriculteurs tendent à replanter des jachères améliorées chaque année, sur les mêmes parcelles ou en changeant de parcelles.
Jachère à espèce unique
Une jachère à espèce unique est établie avec une seule espèce de plante dans tout le champ. En général, ce système est recommandé pour les espèces qui poussent vite et développent des couverts végétaux denses qui ombragent et tuent les mauvaises herbes. De telles espèces sont Crotalaria grahamiana, Crotalaria paulina et Colopogonium mucunoides (griffe du diable).
Jachère à espèces mélangées
Il est possible, et même préférable, d’établir des jachères améliorées en plantant des rangées alternées de deux ou plusieurs espèces différentes. Les espèces poussent ensemble sans se concurrencer. Cette pratique est particulièrement bonne pour les espèces à croissance lente qui ne se livreront pas une forte concurrence. Les jachères à espèces mélangées peuvent offrir un ou plusieurs des avantages suivants :

  • des espèces différentes peuvent produire un éventail plus large de produits, comme du bois de chauffage, des piquets ou de la biomasse feuillue et, si une espèce ne parvient pas à germer ou s’établit mal, les autres peuvent bien pousser;
  • selon l’endroit et la durée de la jachère, elles ont tendance à prolonger l’effet résiduel de la jachère, parce qu’elles fournissent des nutriments végétaux pendant une période plus longue;
  • elles font une utilisation optimale des ressources disponibles, comme la lumière et l’espace.

Voici quelques combinaisons réussies pour les espèces mélangées :

Sesbania (Sesbania sesban) + siratro
Sesbania + arachides
Sesbania + Tephrosia vogelii ou Tephrosia candida
Sesbania + Crotalaria (Crotalaria grahamiana)
Tephrosia + Crotalaria

Établissement des espèces à jachère

Pour que les espèces à jachère améliorée profitent aux cultures, elles doivent rester suffisamment longtemps dans le champ pour pousser, accumuler de grandes quantités de nutriments et produire beaucoup de biomasse. On peut utiliser plusieurs méthodes pour établir des jachères améliorées.

Semer à la volée les semences dans les champs parmi les cultures existantes, par exemple de maïs après le premier ou le deuxième désherbage. Si vous intercalez des haricots avec du maïs, récoltez les haricots et ensuite semez les graines des plantes à jachère. Cette technique convient parfaitement aux espèces à grosses semences comme le mucuna.

Planter en rangées. Plantez les semences d’arbres, d’arbustes et de légumineuses herbacées à jachère améliorée directement entre les rangs de la culture vivrière après le premier désherbage ou dès que la culture vivrière a germé, et recouvrez les semences de terre. Avec le maïs, par exemple, plantez dans les sillons entre les rangées après le premier ou le deuxième désherbage.

Planter des arbres à jachère améliorée dans les sillons naturels existants. Une façon de le faire consiste à creuser des trous dans les jachères naturelles et à semer les graines directement ou à repiquer les plantules. Si les mauvaises herbes sont denses dans la jachère et empêchent de creuser les trous, coupez-les en premier. On peut planter directement Crotalaria grahamiana et Tephrosia vogelii dans les jachères naturelles. Pour les espèces comme Sesbania sesban, qui ont de petites graines ou qui ne poussent pas facilement à partir de la graine, faites pousser des plantules et repiquez-les dans une culture existante ou dans des terres en jachère naturelle.

Après avoir récolté la culture vivrière, laissez les arbres à jachère pousser dans le champ. En six à huit mois, ils forment un couvert fermé et projettent une ombre dense sur le sol, ce qui contribue à stopper la croissance des mauvaises herbes. Avec des espèces à croissance rapide comme crotalaria et tephrosia, il n’est pas nécessaire de désherber la jachère. Plantez ensuite les cultures au début de la prochaine saison.
Jachère et phosphore
À ce stade, il est souvent nécessaire d’ajouter un engrais phosphoré, surtout dans les sols carencés en phosphore. Mettez l’engrais phosphoré dans le trou de plantation ou semez-le à la volée et incorporez le dans le sol. La quantité de phosphore appliquée dépendra de la culture plantée après la période de jachère.

Les agriculteurs peuvent utiliser du superphosphate triple (TSP) ou du phosphate diammonique (DAP) comme engrais inorganique ou de la pierre de phosphate, comme celle de Minjingu au nord de la Tanzanie, qui est maintenant disponible dans l’ouest du Kenya.

La pierre de phosphate de Minjingu (MPR) est une poudre finement moulue contenant 13 % de phosphore (ou les deux tiers du pourcentage du TSP). Elle peut être appliquée en l’épandant à la volée de façon régulière sur toute la parcelle et en l’incorporant dans le sol avec les feuilles des plantes à jachère lors de la préparation de la terre en vue de la plantation. Elle peut également être placée dans le trou de plantation. Lorsqu’on l’utilise pour cultiver du maïs, il faut appliquer des taux qui fourniront 22 à 25 kg de phosphore à l’hectare par saison, surtout sur les sols ayant très peu de phosphore disponible. Certaines espèces d’arbres et d’arbustes, comme tithonia et sesbania, accumulent du potassium dans leur biomasse feuillue. Lorsque cette biomasse se décompose, le potassium est libéré pour les cultures. L’utilisation de ces espèces dans les systèmes jachères améliorées peut réduire la carence en potassium pour la prochaine récolte.

La version intégrale de ce document contient de plus amples renseignements sur :

  • les rendements économiques pour les agriculteurs
  • le contrôle des mauvaises herbes dans les jachères
  • la façon d’établir des espèces à jachère améliorée

renseignez-vous davantage (en anglais seulement).

Acknowledgements

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