Une coopérative qui marche bien en Jamaïque

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Si vous êtes agriculteur, vous savez probablement à quel point c’est difficile de trouver de bons débouchés et un moyen de transport pas trop cher pour vos produits, surtout si vous vivez dans un village éloigné. Voici l’histoire de quelques agriculteurs de Jamaïque qui ont créé une coopérative pour les aider à atteindre ces objectifs. Vous apprendrez comment les membres ont accru leurs compétences, augmenté leurs revenus et développé leurs fermes, les produits et les services.

Long Road est un petit village sur les contreforts des Blue Mountains en Jamaïque. Le sol y est fertile et le climat est bon pour la culture des cocotiers, des plantains, des bananes et des agrumes, aussi bien que les ignames et le cacao toute l’année. Mais les chemins de terre sont étroits, les pentes ardues et rocailleuses. Quand il pleut, ces routes s’affaissent souvent dans les ravins en contrebas. La plupart des villageois n’ont pas de voiture.

Pendant de nombreuses années, lorsque les agriculteurs récoltaient leurs produits, ils allaient au marché le plus proche. C’était à Annotto Bay, une communauté de 3000 personnes sur la côte nord de la Jamaïque. Là, les agriculteurs se faisaient concurrence pour quelques clients. Beaucoup de leurs produits étaient invendus et pourrissaient.

Quelques femmes agricultrices traversaient les montagnes vers la ville de Kingston où il y avait plus de marchés pour vendre leurs fruits et légumes. Certaines de ces femmes étaient des acheteurs professionnels qui prenaient les produits de plusieurs agriculteurs pour les revendre sur les marchés. Beaucoup de ces femmes n’avaient pas d’endroit où séjourner et dormaient sur des boîtes en carton pendant une ou deux nuits, jusqu’à ce qu’elles aient assez vendu pour rentrer chez elles. Si les femmes n’arrivaient pas à vendre les produits, elles ne gagnaient pas d’argent du tout. Des agriculteurs du village n’avaient pas confiance en ces femmes.

Parfois ils ne gagnaient pas un sou si leurs produits ne se vendaient pas. Tout le monde était frustré par cette situation. Des jeunes hommes et des jeunes femmes, ne voyant aucun avenir pour eux à Long Road, quittaient leur village pour trouver quelque chose de mieux.

Alors un groupe d’environ 50 hommes et femmes de Long Road décidèrent de changer leur situation. Ils formèrent la Coopérative de Long Road pour s’aider mutuellement à améliorer leurs fermes, et trouver de meilleurs débouchés et un meilleur système de transport pour leurs produits. Chaque membre accepta de payer une petite cotisation pour avoir sa part dans la coopérative. Avec le soutien d’une organisation locale d’Annotto Bay – le Projet de Développement Rural Ste Marie – la Coopérative de Long Road se mit au travail.

Projets et plans

La coopérative choisit, comme premier projet, de réparer une route régionale et de construire un pont au dessus d’un profond ravin. Cela leur éviterait de marcher en dévalant et en escaladant le ravin. Le groupe demanda qu’on leur donne les matériaux et les membres firent le travail tout seuls à leurs moments perdus. Ils finirent l’ouvrage au bout de cinq semaines.

Quelques mois plus tard, les membres de la coopérative travaillèrent de nouveau ensemble. Les villageois dépendaient du camion d’eau venant d’Annotto Bay pour amener l’eau à Long Road et qui n’avait jamais d’horaire fixe. Ou alors ils devaient marcher pendant une demi heure jusqu’à un ruisseau dans la vallée et ramenaient l’eau dans des seaux juchés sur leurs têtes. Alors les membres de la coopérative décidèrent d’agir. Ils travaillèrent durant leurs temps libre pour installer une conduite d’eau à partir d’une source, là haut dans les montagnes jusqu’au centre du village.

Maintenant avec un bon approvisionnement en eau et de meilleures routes pour le transport de la nourriture, les agriculteurs de Long Road pouvaient se concentrer sur leurs cultures.

Cultiver et vendre les produits

D’abord il leur fallait vendre leurs produits. Le projet de développement rural Ste Marie leur trouva leurs premiers clients. Ces clients achetaient régulièrement les produits de la coopérative. Les clients incluaient les épiceries, un marchand de nourriture et des fabricants de jus. La coopérative acheta un camion pour transporter les produits chez ces clients chaque semaine. Ils vendirent de la nourriture aux prix courants du marché. Les agriculteurs individuels étaient payés selon les prix fixés auprès des clients, moins le coût du transport, les dépenses administratives et un petit bénéfice pour la coopérative.

Sans attendre, pratiquement tous les agriculteurs de la communauté adhérèrent à la coopérative. Ils pouvaient encore vendre des produits au marché d’Annotto Bay, ou les confier aux femmes qui les vendaient à Kingston, mais la plupart des agriculteurs choisirent de vendre par le biais de la coopérative.

Maintenant les agriculteurs gagnaient plus d’argent comme jamais auparavant de la vente de leurs produits. Certains essaient de nouveaux produits comme les poivrons à bonnet écossais (Capsicum chinense) et des patates douces Mother Edward, une variété qui pousse bien sur des sols pauvres. D’autres membres ont trouvé de nouvelles idées. Par exemple, un groupe de femmes s’occupe du conditionnement d’herbes et d’épices incluant les noix de muscade, la salsepareille, le lemon grass et les piments. Elles confectionnent aussi des objets d’artisanat comme les cartes de voeux décorées de créations faites à partir d’écorces de bananier. Les membres de la communauté acquièrent de nouvelles compétences et trouvent de nouveaux moyens de gagner de l’argent. Les herbes, les épices et les cartes sont vendues aux touristes et aux boutiques spécialisées à travers l’île.

Aujourd’hui les habitants de Long Road et leurs voisins ne sont plus obligés de voyager si loin et de travailler si fort. Des jeunes restent sur leurs fermes familiales, ou cultivent leurs propres produits à Long Road. Vous voyez que le fait de travailler ensemble et de conjuguer les ressources est la clé de la réussite.

Acknowledgements

Ce texte a été écrit par Belinda Bruce, Assistante éditrice, Réseau de radios rurales des pays en développement, Toronto, Canada. Il a été basé sur des entrevues accordées par les membres et le personnel de « The Annotto Bay Co op Group » en Jamaïque.

Information sources

« How are you going to keep them down on the farm… » dans Canadian Jesuit Missions, Vol. 28, No. 3, Octobre 1993. Canadian Jesuit Missions, Toronto, Canada.