Notes au radiodiffuseur
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Notes aux radiodiffuseur.euse.s
Ce texte radiophonique nous vient du Nigeria et parle de l’importance du marketing pour les agriculteur.trice.s
Les agriculteur.trice.s travaillent très dur pour cultiver et récolter leurs produits. Une récolte abondante est le rêve de tout agriculteur.trice, mais l’histoire ne s’arrête pas là. Il ne suffit pas que les agriculteur.trice.s aient de bons rendements, il faut aussi qu’ils puissent les vendre à un.e acheteur.euse. Les agriculteur.trice.s sont confrontés à une course contre la montre pour acheminer leurs produits sur le marché avant qu’ils ne se gâtent ou ne soient endommagés par des parasites ou des maladies. Ils/elles utilisent les bénéfices de la vente des récoltes pour subvenir aux besoins de base et au coût de vie de leur famille, et pour leur permettre de se procurer des intrants et des outils agricoles de bonne qualité.
Le marketing comprend tout ce que les agriculteur.trice.s font pour présenter leurs produits, tandis que la vente comprend tout ce que les agriculteur.trice.s font pour échanger de l’argent contre ces produits. Le marketing comprend la publicité, l’image de marque et d’autres activités qui valorisent les produits et conduisent aux ventes. Le marketing conduit donc aux ventes.
Le marketing est très important pour les agriculteur.trice.s, pour l’avenir de leurs exploitations et pour l’avenir de la nation et de l'économie. Par exemple, le succès des agriculteur.trice.s signifie une réduction de la dépendance aux importations alimentaires et une plus grande sécurité alimentaire.
Le présent texte traite de la commercialisation, des difficultés et des défis liés à la commercialisation des produits fraîchement récoltés, et de la façon dont ils peuvent être surmontés. Le marketing stimule les ventes. Avec un bon marketing, les ventes peuvent être améliorées. Une solution clé pour le marketing et les ventes est de former des groupes d’agriculteur.trice.s, qui peuvent ensuite vendre aux acheteur.euse.s et aux intermédiaires à partir d’une position plus forte.
Vous pourriez choisir de produire ce texte dans le cadre de votre émission de radio agricole habituelle, en le faisant interpréter par des comédien.ne.s de doublage à la place des intervenants. Si tel est le cas, veuillez informer votre auditoire au début de l’émission que les voix sont celles de comédien.ne.s, et non celles des personnes qui ont participé aux entretiens.
Vous pouvez vous inspirez de ce texte pour approfondir davantage le marketing ou pour créer votre propre émission. Peut-être que les choses sont différentes dans votre pays, et que vos agriculteur.trice.s et agronomes locaux ont leur propre point de vue sur le marketing.
Vous pourriez leur demander :
- S’ils/elles pensent que le marketing est important pour la vente des produits.
- Comment vendent-ils/elles leurs produits? Font-ils/elles appel à un intermédiaire?
- Pratiquent-ils/elles l’agriculture contractuelle?
- Des moyens créatifs de commercialiser leurs produits ou d’alerter les acheteur.euse.s?
- Se sont-ils associés à d’autres agriculteur.trice.s pour vendre leurs produits? Si oui, quelles ont été leurs expériences? Si non, pourquoi? Que pensent-ils/elles de cette idée?
La durée estimative avec la musique, l’intro et l’extro, est de 20-25 minutes.
Texte
ANIMATEUR.TRICE :
Bonjour, chers auditeurs et auditrices, bienvenue dans notre émission. Mon nom est _____.
Aujourd’hui, nous allons parler de marketing. C’est un sujet très important pour les agriculteurs et les agricultrices, qu’ils soient grands ou petits. Les agriculteurs et les agricultrices travaillent très dur pour produire des denrées comme le riz, le maïs et le manioc. Mais il ne suffit pas de les produire, il faut aussi qu’elles arrivent sur le marché à un prix intéressant pour les agriculteurs et les agricultrices.
Pour les agriculteurs et les agricultrices, la vente de leurs récoltes à un bon prix est essentielle à leur survie – pour répondre aux besoins fondamentaux de leur famille et pour disposer des fonds nécessaires à une nouvelle exploitation l’année suivante. Elle est également importante à l’échelle nationale, le Nigeria cherchant à renforcer sa sécurité alimentaire.
Aujourd’hui, nous allons parler à quelques agriculteurs et les agricultrices de l’État de Benue de leur expérience en matière de commercialisation de leurs produits, notamment le riz et le manioc. Mais tout d’abord, nous allons présenter notre expert, Kaneng Rwang-Pam, un consultant en marketing qui travaille avec Marketing Systems Development ou Marketing for the Poor. Madame Rwang-Pam, bienvenue dans l’émission.
ANIMATEUR.TRICE :
Parlez-nous un peu de votre parcours.
KANENG RWANG-PAM :
Je travaille sur un certain nombre de marchés. Je suis consultant en développement de marché et aussi consultant M4P. M4P signifie «Marchés pour les pauvres.» Je suis également formateur et défenseur des droits des agriculteurs et des agricultrices, notamment en matière d’agrobusiness et de marketing. Je suis moi-même agriculteur, donc je suis conscient des difficultés auxquelles sont confrontés les agriculteurs et les agricultrices que j’aide, car j’en ai moi-même fait l’expérience.
ANIMATEUR.TRICE :
Pouvez-vous nous donner quelques informations sur la commercialisation des produits agricoles au Nigeria?
KANENG RWANG-PAM :
Eh bien, pour les cultures dont nous discutons aujourd’hui – le riz et le manioc – il n’y a pas beaucoup de différence. La structure des chaînes de valeur est très similaire, de même que les méthodes pour réussir.
Au Nigeria, le principal défi consiste à changer l’état d’esprit des petits agriculteurs et agricultrices afin qu’ils considèrent l’agriculture comme une entreprise et non comme un simple moyen de subsistance. Quelle que soit la culture, ils cultivent essentiellement pour survivre.
ANIMATEUR.TRICE :
Y a-t-il une raison à cela?
KANENG RWANG-PAM :
Il y a plusieurs raisons, comme le manque de connaissances de la part de l’agriculteur ou l’agricultrice, ce qui entraîne de mauvaises pratiques qui l’empêchent d’augmenter la production au-delà du niveau de subsistance.
Une autre raison est l’absence d’un environnement favorable. Les agriculteurs et les agricultrices sont piégés dans un cycle perpétuel où ils luttent pour survivre et n’atteignent pas le seuil de rentabilité. Ils ne peuvent donc pas développer leur activité, ce qui peut entraîner de mauvais rendements car ils n’ont parfois pas les moyens d’acheter des intrants comme les engrais.
ANIMATEUR.TRICE :
Quand vous dites «environnement favorable», qu’entendez-vous par là?
KANENG RWANG-PAM :
Eh bien, les marchés ne sont pas très accueillants pour eux, il leur est donc difficile de prospérer. Il y a des intermédiaires, et souvent un accès limité aux fabricants et aux fabricantes et aux transformateurs et aux transformatrices. Les installations de stockage et les réseaux de transport sont également médiocres.
Les agriculteurs et les agricultrices constituent le premier maillon de la chaîne de valeur, et d’autres acteurs et actrices ajoutent de la valeur à leurs produits afin que la chaîne de valeur prospère et se développe, et que les producteurs et les productrices obtiennent un bon rendement. Mais, dans la pratique, certains maillons de la chaîne font défaut. Par exemple, pour de nombreux agriculteurs et agricultrices, il n’y a pas d’acheteur ni d’acheteuse, de transformateurs ni de transformatrice ou d’acheteur ni d’acheteuse de produits manufacturés de grande envergure. Cela signifie qu’ils doivent compter sur de petits marchés locaux, ce qui réduit la quantité d’argent qu’ils gagnent, et donc l’échelle de leur exploitation. Ils ne peuvent donc pas se permettre d’acheter de meilleures semences, des outils, des machines, etc. Et cela signifie que les agriculteurs et les agricultrices, malgré tous leurs efforts, peuvent ne pas être en mesure d’utiliser les meilleures pratiques agronomiques qui permettraient d’améliorer le rendement financier de leurs récoltes, qu’il s’agisse de riz ou de manioc.
ANIMATEUR.TRICE :
Qu’en est-il de la commercialisation? Comment cela fonctionne-t-il pour les agriculteurs et les agricultrices?
KANENG RWANG-PAM:
Ils ont tous eu des difficultés. Pour certains agriculteurs et agricultrices, il est difficile de trouver des marchés. Certains ne comprennent pas la chaîne de valeur et son étendue, ni où trouver d’autres acteurs et actrices de la chaîne de valeur. Les agriculteurs et les agricultrices peuvent penser que le seul endroit où ils peuvent vendre est le marché communautaire local. Mais s’ils comprenaient mieux la chaîne de valeur ou s’ils avaient accès à des fabricants et des fabricantes ou à des transformateurs et des transformatrices, ils auraient un éventail plus large de personnes à qui vendre, et peut-être un meilleur prix. C’est là que mes collègues et moi-même intervenons. Nous aidons les agriculteurs et les agricultrices à commercialiser leurs produits et à identifier de nouveaux marchés et parties prenantes.
ANIMATEUR.TRICE :
Merci beaucoup. Nous reviendrons à Mme Rwang-Pam plus tard, mais parlons à quelques agriculteurs et agricultrices de leur expérience de commercialisation de leur production.
Nous allons d’abord parler à un riziculteur de l’État de Benue, Isaac Shishi. Monsieur Isaac, bienvenue à notre émission.
ANIMATEUR.TRICE :
Pouvez-vous nous parler un peu de vous? Comment vous êtes-vous lancé dans l’agriculture?
ISAAC SHISHI :
Je suis issu d’une génération d’agriculteurs et d’agricultrices et j’ai commencé l’agriculture commerciale après avoir terminé l’université en 2013. Ma mère m’a inspirée – elle n’avait pas fait d’études, alors ses revenus provenaient de sa ferme.
ANIMATEUR.TRICE :
Comment ça a été jusqu’à présent?
ISAAC SHISHI :
J’ai connu des hauts et des bas. Je cultive le riz, l’igname, le maïs et les haricots. Mes succès avec le riz sont assez récents. Lors de la dernière récolte, j’ai réussi à obtenir 10 sacs de riz. Pour ce qui est des échecs, j’ai dû vendre plus tôt que prévu, en mars, pour pouvoir rembourser une dette à un ami qui avait besoin d’argent de toute urgence. Le moment était mal choisi et je n’ai pas fait autant de bénéfices que si j’avais vendu en juin. J’ai perdu beaucoup d’argent.
ANIMATEUR.TRICE :
Que diriez-vous d’avoir appris de ces expériences?
ISAAC SHISHI :
Les réussites m’ont appris que lorsqu’on pratique l’agriculture à petite échelle, on obtient une petite récompense, mais que si l’on augmente l’échelle, on gagne plus d’argent. Les échecs m’ont appris qu’il faut choisir le bon moment. Pour vendre ses produits agricoles, le moment est très important.
ANIMATEUR.TRICE :
Quel est le meilleur moment pour vendre du riz? Êtes-vous obligé de le commercialiser?
ISAAC SHISHI :
En fait, je ne le commercialise pas. Mais je pense que c’est important parce qu’entre les consommateurs et les consommatrices et l’intermédiaire, qu’il s’agisse d’un grossiste ou d’un détaillant, il y a beaucoup d’argent. Donc si vous voulez vendre directement et gagner plus d’argent, vous devez utiliser le marketing.
ANIMATEUR.TRICE :
Pourquoi ne faites-vous pas de marketing alors?
ISAAC SHISHI :
Je n’en ai pas vraiment besoin. J’emmène généralement mes produits à Lagos et c’est facile de les vendre là-bas. Mais parfois, si ma récolte est très abondante, je vends aussi à Benue, et là je vends à des grossistes. C’est parfois un défi, car les grossistes jouent le rôle d’intermédiaire et gagnent plus d’argent de cette façon. Récemment aussi, une entreprise a acheté directement chez nous dans l’État de Benue.
ANIMATEUR.TRICE :
Merci, monsieur Isaac. Avez-vous des conseils à donner aux agriculteurs et aux agricultrices qui veulent se lancer dans la riziculture?
ISAAC SHISHI :
Si vous le pouvez, égrenez le riz. Vous ne pouvez pas vendre du riz avec des coques aux consommateurs et aux consommatrices finaux, qui ne cherchent que du riz qu’ils peuvent cuire et manger. Si vous cultivez du riz et que vous voulez vraiment gagner de l’argent, vous devez songer à le transformer pour pouvoir le vendre au consommateur ou à la consommatrice finale. C’est en effet en vendant au consommateur ou à la consommatrice finale que l’on gagne vraiment de l’argent.
ANIMATEUR.TRICE :
Merci, monsieur Isaac. Notre deuxième agriculteur aujourd’hui est Nicolas Adams, qui vient d’un village d’agriculteurs et agricultrices dans l’État de Benue. Monsieur Nicolas, bienvenue.
ANIMATEUR.TRICE :
Depuis combien de temps êtes-vous agriculteur?
NICOLAS ADAMS :
Je suis agriculteur depuis environ sept ans maintenant. Mes parents étaient agriculteurs, et je suis leurs traces.
ANIMATEUR.TRICE :
Qu’est-ce que vous cultivez?
NICOLAS ADAMS :
J’ai commencé à cultiver du riz, mais à petite échelle. Je l’ai abandonné quand je me suis rendu compte que cela impliquait beaucoup de dépenses, même à petite échelle. Je suis passé au soja et maintenant je cultive aussi le manioc, selon la période de l’année.
ANIMATEUR.TRICE :
Quel est, selon vous, votre plus grand succès et votre plus grand échec?
NICOLAS ADAMS :
Pour moi, il ne s’agit pas vraiment de ventes. C’est plutôt le fait d’avoir pu subvenir aux besoins de ma famille. Comme vous le savez, l’État de Benue a connu quelques crises ces dernières années.
ANIMATEUR.TRICE :
Entre les agriculteurs et les agricultrices et les éleveurs et les éleveuses nomades?
NICOLAS ADAMS :
Oui. Cela a vraiment affecté notre productivité. Alors pour moi, le fait de pouvoir continuer à nourrir ma famille qui dépend de moi malgré cela, je considère que c’est un succès.
ANIMATEUR.TRICE :
Bien fait. Et que considérez-vous comme un échec depuis que vous avez commencé?
NICOLAS ADAMS :
Vers 2014, il y a eu une sécheresse, ainsi qu’une arrivée massive du riz sur le marché. J’ai perdu beaucoup d’argent. J’ai dû emprunter de l’argent à mes amis et à ma famille pour recommencer à cultiver la saison suivante. C’est en fait la raison pour laquelle j’ai décidé d’abandonner le riz.
ANIMATEUR.TRICE :
Je suis désolé d’entendre cela. Qu’avez-vous appris de ces expériences?
NICOLAS ADAMS :
Il est important d’économiser pour les jours difficiles, comme ce qui m’est arrivé en 2014. Ne dépensez pas tout votre argent d’un coup et ayez toujours une solution de rechange.
ANIMATEUR.TRICE :
Comment voyez-vous le marketing?
NICOLAS ADAMS :
Normalement, nous avons des gens qui veulent simplement acheter nos produits. Mais ces derniers temps, c’est un peu difficile. Nous pouvons toujours les vendre, mais au cours des trois dernières années, il est devenu de plus en plus difficile de faire des bénéfices à cause de tous les problèmes que nous avons rencontrés.
ANIMATEUR.TRICE :
Vous faites donc des activités de marketing pour votre manioc?
NICOLAS ADAMS :
Oui, je fais un peu de marketing. Par exemple, parfois je stocke d’abord ma récolte, puis je fais une étude de marché. Je peux le faire en personne sur les marchés locaux, ou j’appelle d’autres agriculteurs et agricultrices et d’autres personnes au téléphone.
ANIMATEUR.TRICE :
Sur quoi porte votre question?
NICOLAS ADAMS :
Le prix. Le type de produit que les gens recherchent. Veulent-ils qu’il soit transformé en gari, en apu ou en farine (NDLR : le gari est du gruau de manioc et l’apu du gruau de manioc fermenté)? Ce genre de choses.
ANIMATEUR.TRICE :
Qu’en est-il des intermédiaires? Est-ce que vous les utilisez?
NICOLAS ADAMS :
Parfois. Parfois, je n’en ai pas besoin. Il y a des gens qui veulent acheter à ma ferme avant même la récolte. Je compte simplement les billons et je leur vends. J’ai l’habitude de garder les numéros des clients, donc si j’ai un client à qui j’ai vendu une grande quantité dans le passé, je l’appelle en premier. Si je peux vendre une grande quantité, je le fais directement. Mais si je ne peux pas, ou si je sens que le prix n’est pas très bon, je contacte un intermédiaire et je vois quel prix il peut me proposer.
ANIMATEUR.TRICE :
Comment choisir un bon intermédiaire?
NICOLAS ADAMS :
Il faut avoir un dialogue ouvert avec l’intermédiaire. Renseignez-vous sur ses succès et ses difficultés. Par exemple, quel est le montant le plus élevé qu’il a vendu auparavant, où a-t-il vendu? Quels problèmes la personne rencontre-t-elle pour vendre? Je suppose que vous devez aussi écouter votre cœur : pouvez-vous lui faire confiance? Assurez-vous que vous pouvez lui faire confiance avant de l’engager.
ANIMATEUR.TRICE:
Travaillez-vous en partenariat avec d’autres agriculteurs et agricultrices?
NICOLAS ADAMS:
Oui, je le fais. J’ai un handicap physique qui rend la marche un peu difficile, alors je suis reconnaissant que mes frères et sœurs agriculteurs et agricultrices m’aident. Je travaille généralement avec des personnes en qui j’ai confiance.
ANIMATEUR.TRICE:
Quel est votre plus grand défi pour vendre votre manioc?
NICOLAS ADAMS:
Le transport. Transporter les produits de la ferme au marché est un grand défi. Je n’ai pas de voiture et je dois donc toujours en payer une.
ANIMATEUR.TRICE:
Merci beaucoup, monsieur Nicolas. Avant de partir, avez-vous des conseils à donner aux agriculteurs et aux agricultrices qui veulent cultiver et commercialiser le manioc?
NICOLAS ADAMS :
Je conseillerais aux nouveaux venus de rencontrer les vendeurs et les vendeuses de manioc et d’établir ensemble des relations afin de comprendre les différentes façons dont chacun d’entre eux commercialise le manioc et de choisir ensuite ce qui fonctionne le mieux. En outre, si vous voulez vendre du manioc, il est bon de le transformer. Par exemple, j’épluche et je sèche une partie de mon manioc, puis je le vends. On peut aussi le sécher et le vendre sous forme d’apu, de gari ou de farine de manioc, qui est en fait la plus rentable des trois.
ANIMATEUR.TRICE :
Merci beaucoup pour vos commentaires, monsieur Nicolas. Revenons à notre spécialiste, Kaneng Rwang-Pam, après avoir entendu nos agriculteurs. Mme Rwang-Pam, il semble qu’un grand nombre d’entre eux aient vécu le genre de choses dont vous avez parlé.
KANENG RWANG-PAM :
Les agriculteurs et les agricultrices auxquels vous avez parlé semblent bien réussir à trouver des marchés, que ce soit en allant directement sur les marchés ou en établissant des relations avec les clients, de sorte que certains viennent même réserver des billons. C’est très positif.
ANIMATEUR.TRICE:
Que pourraient-ils et elles faire de mieux?
KANENG RWANG-PAM:
Il semble bien qu’ils fassent un peu de bénéfices, assez pour prendre soin de leurs familles et se payer des intrants pour l’année suivante. Mais peut-être que tout le processus pourrait être plus facile et même plus lucratif. Aucun d’entre eux ne fait mention de l’agriculture contractuelle, par exemple.
KANENG RWANG-PAM:
L’agriculture contractuelle consiste à donner de l’argent aux agriculteurs et aux agricultrices pour qu’ils produisent un certain tonnage de cultures pour un client particulier. Ce n’est pas encore très populaire au Nigeria, mais cela se développe. Certains groupes donnent de l’argent aux agriculteurs et aux agricultrices pour produire des récoltes pour des acheteurs et des acheteuses spécifiques. À Jos, dans l’État du Plateau, des agriculteurs et des agricultrices reçoivent des fonds pour cultiver des produits comme les pommes de terre, qui seront vendus à certains grands hôtels d’Abuja, la capitale du Nigeria.
ANIMATEUR.TRICE:
Qu’en est-il des autres cultures comme le riz et le manioc?
KANENG RWANG-PAM:
Ce n’est pas encore très courant, mais de gros acheteurs et acheteuses – producteurs et productrices industriels, usines, fabricants et fabricantes, etc. – font leur apparition dans les filières du manioc et du riz.
Bien que l’agriculture contractuelle ait ses avantages, la nature quelque peu monopolistique de ces situations d’agriculture contractuelle signifie que les agriculteurs et les agricultrices ne disposent pas toujours d’un large éventail de marchés pour vendre leurs produits. Parfois, ils ne sont même pas au courant de l’existence d’autres marchés, surtout si la personne qui fait la commande est un acteur ou une actrice majeurs dans la région. Cependant, à mesure que de plus en plus de personnes entrent dans ces chaînes de valeur, les agriculteurs et les agricultrices devraient avoir plus de poids dans la fixation des prix.
ANIMATEUR.TRICE :
Quels sont les avantages de l’agriculture contractuelle pour les agriculteurs et les agricultrices?
KANENG-RWANG-PAM :
Un avantage très important est la réduction du risque lié à la vente de produits. Disons que j’investisse 300000 nairas (723 dollars) dans une parcelle d’un hectare de manioc. Le rendement attendu devrait atteindre un million de nairas (2410 dollars). En moyenne, j’espère obtenir un bénéfice d’environ 500000 à 700000 nairas (1205 à 1687 dollars). Mais, même si j’obtiens ce rendement, mon gros souci est de le vendre à temps. Je peux avoir des problèmes de stockage, d’électricité, de transport, peut-être que des insectes peuvent l’infester… tout cela peut endommager ma récolte avant que je ne la mette sur le marché. Un accord d’agriculture contractuelle permettrait d’éliminer une grande partie des soucis liés à la vente des produits. Imaginez une situation où la personne qui fait la commande vous donne 700000 nairas en échange de la totalité de votre récolte. Dans ce cas, vous n’avez pas à vous soucier du stockage pendant longtemps, et vous n’aurez peut-être pas à vous soucier du transport si celui-ci est inclus dans le contrat.
J’ai récemment entendu parler d’une jeune fille qui a investi environ 200000 nairas (482 dollars américains) dans des porcelets. En l’espace de sept mois seulement, elle a pu réaliser un chiffre d’affaires de deux millions de nairas (4820 dollars américains), après avoir vendu ses porcelets à un seul acheteur ou une acheteuse. On constate des choses similaires dans les chaînes de valeur du manioc et du riz, avec de grandes chaînes de supermarchés de grandes villes comme Lagos qui viennent dans les communautés agricoles et concluent des contrats avec les agriculteurs et les agricultrices pour produire une certaine quantité de cultures pour une somme d’argent convenue.
ANIMATEUR.TRICE :
Quels sont les inconvénients de l’agriculture contractuelle?
KANENG RWANG-PAM :
S’ils n’ont pas de contrat solide, les agriculteurs et les agricultrices peuvent avoir du mal à faire respecter leurs obligations par les acheteurs et les acheteuses. J’ai déjà fait partie d’un groupe qui a investi son propre argent dans l’agriculture, mais les personnes qui ont fait la commande ne se sont pas présentées après la récolte. Nous avons perdu une partie de notre rendement et avons dû vendre le reste à bas prix pour réduire nos pertes. Même si vous pouvez faire respecter le contrat légalement, le temps presse pour vos produits. Assurez-vous donc d’avoir un contrat solide.
ANIMATEUR.TRICE :
Il semble que le partenariat ou la coopération entre agriculteurs et les agricultrices soit un bon moyen d’approcher ces gros acheteurs et acheteuses.
KANENG RWANG-PAM :
C’est le cas, mais cela n’a pas vraiment effleuré l’esprit de plusieurs agriculteurs et agricultrices, même si de nombreux cultivateurs et cultivatrices de riz et de manioc ont adhéré à des associations. Mais il y a une différence entre ces associations et les coopératives. Les associations sont plutôt des plateformes de mise en réseau. Elles s’occupent de leurs membres et organisent des réunions.
Une coopérative est plus formelle, plus légale et, souvent, plus respectée. Les coopératives ne sont pas un concept nouveau. Elles existent au Nigeria depuis des décennies.
Les agriculteurs et les agricultrices qui ont créé des coopératives dans de nombreuses chaînes de valeur différentes ont vu ces coopératives prospérer et devenir très rentables. Ils et elles ne se sont pas contentés de rester producteurs et productrices, mais ont investi d’autres parties de la chaîne, comme la transformation simple et l’emballage. En ajoutant un peu de valeur à leurs produits, cela leur permet d’augmenter leurs revenus. Tous les moyens dont disposent les agriculteurs et les agricultrices pour faire connaître la disponibilité de leurs produits sont également utiles, y compris la publicité à la radio et dans les réseaux sociaux, bien que certaines formes de publicité soient coûteuses et qu’il soit préférable de les faire en groupe.
ANIMATEUR.TRICE :
Il semble que les agriculteurs et les agricultrices soient réticents à former ces groupes, n’est-ce pas?
KANENG RWANG-PAM :
La façon dont les groupes sont expliqués peut-être une raison pour laquelle certains agriculteurs et agricultrices n’ont pas totalement adhéré au projet. Ils et elles ont parfois l’impression qu’ils doivent renoncer au contrôle de leurs propres plans d’exploitation, ou que l’arrangement ne profite qu’à une seule personne, ou à quelques responsables. Ou bien ils et elles peuvent penser que leur rendement sera plus élevé que celui des autres et que cela sera donc à leur désavantage en ce qui concerne le partage des bénéfices.
Nous devons donc simplifier la façon dont nous expliquons les avantages de créer ou d’adhérer à une coopérative.
ANIMATEUR.TRICE :
C’est tout à fait logique.
KANENG RWANG-PAM :
Une autre chose est que lorsque vous êtes en mode de subsistance, vous êtes en mode de survie, et il est difficile de penser à prendre des risques et à changer ce que vous avez fait. Vous n’allez pas acheter des semences hybrides de luxe quand vous vous attendez à un bénéfice de seulement 50000 nairas (120 $ US) et que vous devez payer le loyer, les frais de scolarité et nourrir la famille.
ANIMATEUR.TRICE :
Merci beaucoup. Nous sommes arrivés à la fin de notre émission aujourd’hui. Avant de partir, avez-vous une dernière remarque, Mme Rwang-Pam?
KANENG RWANG-PAM :
Nous, qui travaillons dans le domaine M4P, nous nous efforçons de faire évoluer les mentalités et d’introduire de meilleures pratiques agronomiques et agro-industrielles. Ce n’est pas facile et il y a encore beaucoup de chemin à parcourir, mais il y a de l’espoir. Malgré tous les dysfonctionnements du marché et de la chaîne de valeur, le Nigeria est le premier producteur mondial de manioc. Les trois millions d’hectares de terres arables du Nigeria offrent un potentiel considérable.
ANIMATEUR.TRICE :
Merci beaucoup. Il semble que le chemin à parcourir soit long, mais si les agriculteurs et les agricultrices sont disposés à sortir de leur zone de confort, ou de leurs façons de faire, les récompenses peuvent être énormes.
J’espère que les informations fournies par nos agriculteurs, notre agricultrice et notre spécialiste aujourd’hui vous seront utiles et que vous trouverez d’autres informations qui vous aideront à augmenter vos rendements et vos bénéfices. A la prochaine et bonne chance!
Acknowledgements
Remerciements
Rédaction : Ted Phido, écrivain indépendant, Lagos, Nigeria
Révision : Obinna Chukwuezie, Directeur exécutif, Journalism Communication and Media Centre, Nigeria, et ancien spécialiste de la communication à l’Institut international d’agriculture tropicale (IITA), Nigeria.
Interviews :
Kaneng Rwang-Pam, consultant en marketing, Marketing Systems Development ou Marketing for the Poor. Interviewé le 1er décembre 2021.
Isaac Shishi, riziculteur de l’État de Benue. Interviewé le 13 décembre 2021.
Nicolas Adams, agriculteur de l’État de Benue. Interviewé le 13 décembre 2021.
La présente nouvelle a été produite grâce à une subvention du ministère fédéral allemand de la Coopération économique et du Développement par l’entremise de la Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit GmbH (GIZ) et de son projet « Centre d’innovations vertes pour le secteur de l’agriculture et de l’alimentation » au Nigeria.