Notes au radiodiffuseur
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Les agriculteurs africains font face à de nouveaux défis posés par les changements climatiques, notamment une pluviométrie de plus en plus imprévisible. Mais beaucoup d’agriculteurs africains ont commencé à trouver des stratégies pour s’adapter à cette nouvelle réalité.
Au Togo, par exemple, où les agriculteurs cultivent traditionnellement du maïs sur les plateaux, ils ont diversifié leurs cultures et produisent du riz dans les bas-fonds. Ne bénéficiant d’aucun apport financier extérieur pour survivre, ils doivent se fier à la fertilité naturelle des sols dans les bas-fonds. Les sols naturellement riches permettent aux agriculteurs d’obtenir six tonnes métriques de riz à l’hectare la première année, mais ce rendement élevé ne peut pas durer longtemps sans une bonne gestion. Afin de renforcer les capacités locales et d’inverser l’érosion rapide des ressources naturelles, comme les sols fertiles, le Centre du riz pour l’Afrique (ADRAO) a élaboré une approche de formation, appelée Apprentissage participatif et recherche action (APRA), qui se concentre sur la gestion des ressources naturelles dans les bas-fonds. Cette formation permet d’améliorer la productivité du riz et d’autres cultures dans les bas-fonds.
Le présent texte est basé sur un rapport du Centre du riz pour l’Afrique. Il explique comment les agriculteurs peuvent s’adapter aux changements climatiques avec l’appui des initiatives de recherche.
Le texte est présenté sous la forme d’une entrevue entre un animateur radio et un vulgarisateur agricole. Il expose également les bienfaits des approches participatives que le Centre du Riz pour l’Afrique développe avec les agriculteurs.
Texte
Montée de l’indicatif musical et maintien en fondu enchaîné
ANIMATEUR :
Cher(e)s ami(e)s agricultrices et agriculteurs, bonjour et bienvenue à votre émission hebdomadaire consacrée à l’agriculture. Merci d’être toujours plus nombreux à l’écoute de votre radio.
Nous proposons aujourd’hui de vous parler de ce que vous pouvez faire par rapport aux pluies qui tombent de moins en moins. La rareté des pluies vous apporte beaucoup d’ennuis, n’est-ce pas? C’est pour cela que nous recevons pour vous dans ce studio M. Kokou Bosso, un agent vulgarisateur. Il a des conseils à vous donner pour vous permettre de mieux faire face à cette situation.
Montée de l’indicatif musical, puis sortie en fondu
ANIMATEUR:
Bonjour M. Kokou Bosso et merci d’être avec nous aujourd’hui.
ANIMATEUR :
Ici, en Afrique, l’agriculture est tributaire de la pluie. Mais on constate malheureusement qu’il ne pleut plus comme avant. La saison des pluies devient très courte. Cela dérange beaucoup la production agricole. Nous risquons ainsi d’avoir la famine. Alors, qu’est-ce que les agriculteurs doivent faire?
KOKOU BOSSO :
C’est vrai, les pluies ne tombent plus comme avant. Cela perturbe les activités agricoles et donne beaucoup de soucis non seulement aux paysans, mais aussi à tout le monde, car nous mangeons tous et ce que nous mangeons n’est rien d’autre que la production des agriculteurs. Conscients de cela, les chercheurs du Centre du riz pour l’Afrique ont effectué des recherches et ont trouvé des méthodes qui permettent aux paysans de s’adapter aux changements climatiques. Rassurez-vous, il ne s’agit pas de méthodes étrangères aux agriculteurs. On essaie plutôt d’attirer leur attention sur des approches traditionnelles déjà connues pour leur efficacité. Dans l’exercice de mon travail de vulgarisateur, j’amène les agriculteurs à s’adapter aux sécheresses, à améliorer la fertilité des sols, à choisir les meilleures cultures à faire pousser, à appliquer d’autres innovations et à mieux gérer les ressources naturelles.
ANIMATEUR :
Très bien! Alors, comment les agriculteurs peuvent-il s’adapter à la sécheresse?
KOKOU BOSSO :
Vous savez, traditionnellement, il y a des signes annonciateurs qui permettent de savoir si la saison des pluies sera courte ou encore si la sécheresse sera longue. Connaissant ces signes, les paysans se préparent en conséquence pour s’adapter à la sécheresse.
KOKOU BOSSO :
Il y a, par exemple, la longue saison de l’harmattan et la disparition des oiseaux…(Note de la rédaction : l’harmattan est un vent sec et poussiéreux en Afrique de l’Ouest, qui peut souffler pendant des mois de novembre jusqu’en février.)
ANIMATEUR :
Qu’est-ce que la disparition des oiseaux a à voir avec l’annonce d’une longue saison sèche?
KOKOU BOSSO :
Très bonne question. Vous savez, les animaux et les oiseaux sentent l’eau et ils migrent toujours vers des endroits où ils peuvent en trouver. Ainsi, lorsqu’on remarque leur disparition dans une zone, on peut déduire que la pluie se fera rare à cet endroit. Je voudrais aussi rajouter que certains pays Africains commencent maintenant à fournir des prévisions météorologiques saisonnières et ceux-ci peuvent également être utiles.
ANIMATEUR :
En résumé, on peut dire que, lorsque la saison de l’harmattan est longue et qu’on ne remarque plus la présence des oiseaux dans le ciel, tout cela annonce une longue saison sèche ou de faibles pluies. Une fois que les agriculteurs ont vu ces indices, qu’est-ce qu’ils doivent faire?
KOKOU BOSSO :
Ils doivent premièrement faire preuve d’économie dans la gestion des récoltes précédentes jusqu’à la prochaine pluie. Cela les aide à éviter de consommer les réserves de semences.
Ensuite, quand la saison des pluies commence, ils doivent semer des variétés de semences à maturation rapide. Ceci en prévision de la courte durée de la saison des pluies. Il y a des variétés de maïs à maturation précoce qu’ils peuvent facilement trouver auprès de leurs agents vulgarisateurs.
En dehors de cela, ils doivent également planter du sorgho de Guinée et des graines de plantes de couverture telles que le soja pour fertiliser le sol. Il leur faudra choisir des plantes qui n’exigent pas beaucoup d’eau.
ANIMATEUR :
Les agriculteurs peuvent-ils planter sous terre de nouvelles boutures de manioc si la saison sèche sera longue ou si les pluies seront de courte durée?
KOKOU BOSSO :
Non. Les pluies seront trop courtes pour leur survie. Même pour les autres cultures, ils doivent épandre de la bouse de vache et du compost sur le jardin pour conserver l’humidité dans le sol. Il va falloir qu’ils travaillent dur pour ne pas perdre de temps lorsque les pluies commenceront.
ANIMATEUR :
Dans les villages où vous êtes déjà intervenus, est-ce que les paysans ont obtenu satisfaction suite à la formation APRA, ou Apprentissage participatif et recherche action, avec le Centre du riz pour l’Afrique?
KOKOU BOSSO :
Absolument. Notre équipe a, par exemple, travaillé au Togo dans la région allant de Kpalimé à Atakpamè. Dans toutes les localités où nous sommes intervenus, nous constatons aujourd’hui que les paysans s’adaptent mieux aux perturbations climatiques. Pour être plus explicite, je peux vous donner le cas de deux villages, notamment Kèlèkpè et Adéta.
ANIMATEUR :
Qu’est-ce qui s’est passé à Kèlèkpè?
KOKOU BOSSO :
À Kèlèkpè, il y a beaucoup de bas-fonds, qui sont très propices à l’agriculture. Mais les paysans ne savaient pas qu’il s’agit d’une alternative pour faire face au problème de la sécheresse. Pour des raisons diverses, ils n’exploitaient pas les bas-fonds. Ils labouraient les plateaux dont le sol est appauvri par l’érosion. Pire encore, ils s’adonnaient essentiellement à la culture de maïs. Le sol étant pauvre, le rendement du maïs est de ce fait très faible. Par l’approche de la recherche participative, qui inclus les agriculteurs à chaque étape de la recherche, nous avons réussi à leur montrer pourquoi le sol sur lequel ils produisent ne donne pas beaucoup de rendement, et aussi qu’ils peuvent cultiver d’autres cultures en dehors du maïs. C’est ainsi qu’eux-mêmes ont compris qu’il était nécessaire pour eux de mettre leurs bas-fonds en valeur. Cette formation leur a permis de mieux rentabiliser les bas-fonds et de produire beaucoup plus. Dès lors, ils ont non seulement diversifié les cultures, mais aussi commencé à exploiter les eaux des bas-fonds par un système de drainage qui leur permet de bien produire du riz pendant la saison des pluies. La mise en valeur des bas-fonds permet de sécuriser la production et de limiter ainsi les risques encourus par l’agriculteur en cas de faible pluviométrie ou d’irrégularité des pluies. Ainsi, les agriculteurs sont devenus beaucoup plus enthousiasmés par le développement agricole de leur village.
ANIMATEUR :
Et dans le second village?
KOKOU BOSSO :
Il en est de même à Adéta, un autre village situé dans la partie ouest du Togo. Ici, toujours à cause des problèmes de sécheresse, on a réussi à amener un groupe de trente-deux agricultrices à exploiter des bas-fonds. Chacune d’elles exploite une parcelle dont la superficie fait environ la moitié d’un hectare. Les problèmes qu’elles rencontraient étaient le nivellement du sol et l’infestation des mauvaises herbes. Avec les nouvelles connaissances qu’elles ont acquises lors de la formation APRA, elles cultivent depuis lors du riz pendant la saison des pluies et des légumes, tels que le gombo, le chou, les épinards ainsi que des légumes traditionnels, pendant la saison sèche. Elles s’y plaisent bien et parviennent à subvenir aux besoins fondamentaux de leur foyer.
ANIMATEUR :
Si je comprends bien, les bas-fonds sont très propices à l’agriculture?
KOKOU BOSSO :
Bien sûr. Les bas-fonds sont naturellement très riches et bons pour l’agriculture, parce qu’ils recueillent les eaux de ruissellement pendant la saison des pluies. Avec l’impact des changements climatiques, ils se révèlent très importants. Leur importance réside dans la fertilité des sols et la disponibilité permanente de l’eau dans des régions où les pluies se font rares. Dans toutes les localités où nous donnons cette formation, nous attirons l’attention des paysans sur ces ressources naturelles – une terre fertile et une bonne eau – pour qu’ils puissent les mettre en valeur.
ANIMATEUR :
Fantastique! Je sais que vous avez encore beaucoup de choses à conseiller à nos agriculteurs qui nous suivent avec un grand intérêt. Un dernier mot pour conclure cette émission, s’il vous plaît.
KOKOU BOSSO :
Pour finir, je dirai aux agriculteurs qu’il est urgent pour eux d’adapter des stratégies efficaces pour faire face aux problèmes engendrés par les changements climatiques et que, en dehors de tout ce que j’ai expliqué jusqu’ici, ils doivent aussi planter des arbres, car les arbres favorisent la tombée de la pluie. Les paysans doivent aussi minimiser les feux de brousse, faire des cultures par rotation, construire des diguettes suivant les courbes de niveau autour des fermes pour prévenir l’érosion et les inondations, puis gérer convenablement les ressources en eau. Ainsi, tout ira mieux et ils pourront bien produire en vue de nourrir l’humanité.
Montée progressive de l’indicatif musical puis fondu soutenu en arrière-fond de la narration
ANIMATEUR :
Bien produire pour nourrir l’humanité, c’est bien dit! M. Kokou Bosso, c’est vraiment informatif toutes ces stratégies que vous êtes venu présenter aujourd’hui pour le bonheur de nos auditeurs. Merci pour tout ce que vous faites pour contribuer au développement agricole de notre continent.
Quant à vous, cher(e)s ami(e)s auditrices et auditeurs, j’espère que vous avez suivi avec un grand intérêt les explications de M. Kokou Bosso et que vous avez compris que vous pouvez vous aussi faire toutes ces choses pour vous adapter aux effets négatifs des changements climatiques. Nous vous remercions toutes et tous d’avoir été à l’écoute. Nous vous donnons rendez-vous la semaine prochaine. Au revoir!
Montée de l’indicatif musical et sortie avec la conclusion de l’animateur, puis fin de la musique
Acknowledgements
Rédaction : Houinsou Félix Sèdègnon, Radio Immaculée Conception, Bénin; courriel : felixhouinsou@yahoo.fr
Révision : John Stone, chercheur invité, Centre de recherches pour le développement international (CRDI), et Soklou Worou, Agro-pédologue et président de l’ONG AGIRNA « Appui à la Gestion Intégrée et Rationnelle des Ressources Naturelles » au TOGO.
Contributions : Paul Van Mele, chercheur et responsable du programme Apprentissage rural et systèmes d’innovation / Centre du riz pour l’Afrique (ADRAO)
Paul Kiepe, chercheur et coordonnateur du Consortium bas-fonds / Centre du riz pour l’Afrique (ADRAO)