Notes au radiodiffuseur
Au Mali, dans la région de Ségou, Kouyaté Aminata dite Mata Sangho est une pionnière dans la production et la transformation du riz. À soixante ans, Mata Sangho vit dans le village de Dioro, à 55 kilomètres de Ségou, et préside la coopérative Djeka Baara. Elle a commencé à cultiver il y a environ trente ans à Dioro, une région réputée pour sa production élevée de riz et de poisson. Elle a créé la coopérative en 2017, qui compte 51 membres, dont 41 femmes et 10 hommes. Mme Kouyaté Aminata possède un champ de riz de 10 hectares et un espace pour transformer 16 variétés différentes de riz.
La création de la coopérative Djeka Baara a été motivée par la fertilité et la productivité des terres, ainsi que par la volonté des femmes de Dioro d’améliorer leur vie et leur rôle au sein de leur famille et de leur communauté. Mata Sangho affirme que de nombreuses femmes locales et jeunes ont répondu à son appel pour cultiver la terre.
Dans ce texte radiophonique, nous parlons des femmes dans l’agriculture de grande valeur et rencontrons une femme visionnaire et productrice exceptionnelle. Nous plongerons dans le parcours inspirant d’une femme qui pratique l’agriculture de grande valeur et qui est déterminée à transformer sa passion pour la terre en une histoire à succès.
Dans cette émission, nous discuterons avec trois personnes. Premièrement, nous nous entretiendrons avec Kouyaté Aminata dite Mata Sangho. Deuxièmement, nous parlerons avec son mari, Mamoutou Kouyaté, un artisan qui contribue à ses tâches ménagères et à la réussite de son activité agricole. Et enfin, nous discuterons avec Danzaly Coulibaly, expert en égalité de genres pour nous édifier sur le type de succès et de défis des femmes cultivant des cultures à forte valeur au sein de la famille.
Pour produire cette émission sur votre station de radio, vous pouvez utiliser des acteurs et des actrices pour interpréter les rôles des personnes interviewées, et l’adapter à votre situation locale. Dans ce cas, veuillez-vous assurer d’informer votre auditoire dès le début de l’émission que les voix sont celles d’acteurs ou d’actrices, pas celles des personnes interrogées à l’origine.
Il faudra également préciser que le programme a été adapté à votre auditoire local mais qu’il est basé sur des interviews réelles.
Si vous souhaitez créer des émissions sur les femmes cultivant des cultures à forte valeur, entretenez-vous avec des productrices et/ou transformatrices de riz ou des femmes qui cultivent d’autres cultures à forte valeur ajoutée, leurs maris et une spécialiste en égalité de genres.
Au cours de votre entretien, vous pouvez leur poser les questions suivantes :
- Comment l’agriculture et/ou la transformation de cultures de grande valeur ont-elles positivement affecté la situation économique de votre famille?
- Comment votre mari contribue-t-il aux tâches ménagères et comment soutient-il vos activités agricoles?
- Le succès des femmes cultivant des cultures à forte valeur peut-il renforcer l’égalité du genre?
- Quels défis les femmes qui cultivent des cultures de grande valeur peuvent-elles créer au sein des familles?
- Quels changements positifs ces femmes peuvent-elles apporter au sein des familles?
Durée estimée du texte radiophonique avec la musique, l’intro et l’extro : 25 à 30 minutes.
Texte
MONTÉE DE L’INDICATIF MUSICAL, PUIS FONDU ENCHAÎNÉ
Kouyaté Aminata dite Mata Sangho est l’une des productrices et transformatrices de riz dans le cercle de Dioro, région de Ségou, depuis plus d’une trentaine d’années. Aujourd’hui, elle nous raconte tout à ce sujet.
Mamoutou Kouyaté, son mari, prendra la parole ensuite. Il est le président des artisans de Dioro. Enfin, nous recevrons l’avis de l’expert genre, Danzaly Coulibaly, sur le modèle de succès que ces femmes peuvent créer au sein des familles et dans la communauté.
MONTÉE DE L’INDICATIF MUSICAL, PUIS FONDU ENCHAÎNÉ
Maintenant, j’obtiens des rendements élevés de plus de 50 tonnes de riz sur mes 10 hectares.
À la coopérative Djeka Baara, nous cultivons et transformons différents types de riz dans diverses variétés telles que le riz paadi, le couscous de riz et le riz brisé.
Depuis que j’ai commencé à travailler en coopérative, mes revenus ne font que s’augmenter et j’obtiens des opportunités de contrat de travail venant de certains départements agricoles, de formation en ville, et de croissance économique.
Dans le cadre de la culture, les femmes paysannes possédant des hectares, emploient généralement des personnes qui les aident dans les travaux champêtres. C’est aussi mon cas. «Vouloir, c’est pouvoir», dit-on. Mes travaux domestiques ne m’empêchent pas de participer à d’autres activités de la vie. Et mon mari me soutient dans toutes mes activités.
Vous pouvez imaginer que je génère un tel revenu élevé avec seulement 10 hectares ? Avec ces revenus, je paie les personnes que j’emploie. Les revenus de la vente de mes fortes cultures me permettent de booster positivement la situation économique de la famille et mon autonomisation économique. Et toute la famille y gagne. Généralement c’est l’homme qui subvient au besoin de la famille, mais moi j’apporte j’aide mon mari à faire face aux dépenses de la famille. Et cela, renforce l’égalité du genre au sein du foyer.
Il s’occupe des enfants et me cherche des bois de chauffe pour la cuisine. Il m’épaule dans toutes mes tâches ménagères. Même si, au Mali, c’est la femme qui s’occupe seule des travaux de son foyer.
Il veut mon autonomisation. Si je suis débordée ou en retard, il m’accompagne au marché et à d’autres activités. Dans mes activités agricoles, il m’aide dans le bon choix des semences, des engrais, de la préparation du compost et pour le transport jusqu’au champ.
Beaucoup s’inspirent de ce que je fais, la production de riz à sa transformation. Cet intérêt pour mon travail m’a encouragée à former des femmes à Dioro et ailleurs dans la production et la transformation du riz. J’ai même été en Mauritanie pour former des femmes d’une entreprise de transformation, et au Sénégal également.
Alors, Mamatou Kouyaté, comment soutenez-vous votre femme?
En tant qu’artisan, je la soutiens aussi sur le plan des matériels agricoles. Je lui cherche des opportunités et des financements; et je l’aide à postuler aux appels à candidature. Pour faire accroître l’activité de ma femme, je ne lésine pas sur les moyens.
Bien vrai que j’ai un programme un peu chargé mais cela ne m’empêche pas de contribuer aux tâches ménagères de ma femme. Depuis qu’elle a commencé ses activités agricoles il y a des années de cela, j’ai réaménagé mon emploi du temps pour pouvoir la soutenir.
Après les cours du matin, je récupère les enfants à l’école à midi. Si leur mère est encore occupée, je les nourris et je les ramène à l’école pour les cours de l’après-midi à quinze heures.
Voir sa femme concilier le ménage et l’activité agricole, et contribuer à la charge des enfants peut motiver tout homme à soutenir sa femme. Elle fait du combat pour la promotion féminine, son combat quotidien.
Certains me critiquent parce que je l’aide dans ses tâches ménagères et agricoles. Cela, à cause des croyances anciennes qui stipulent les travaux domestiques ne sont réservés qu’aux femmes seules. Mais, pour moi, l’homme et la femme sont complémentaires et il n’y a rien de mal à soutenir sa conjointe.
Tout ce que je reçois, ce sont des encouragements de la part des membres de ma famille, mais les gens avec qui je ne partage pas les mêmes croyances me qualifient de serviteur des femmes. Je reçois ces réactions et commentaires négatifs chaque jour, mais je ne réplique pas. C’est simplement pour m’empêcher de soutenir ma femme. En tant que son mari, je connais le rôle qu’elle joue dans la famille.
Un jour, un projet l’a contactée pour un partenariat avec un artisan fabriquant des outils de labour. Elle m’a proposé pour un partenariat. C’était un partenariat d’une longue durée et ce fut une grande opportunité pour mon entreprise. Aujourd’hui, mon entreprise s’est agrandie un peu plus grâce à sa bonne volonté, aux opportunités et relations qu’elle me met à disposition.
Le fait de l’aider m’a appris à faire la cuisine seule et à arranger la maison lorsqu’elle n’est pas sur place.
Aujourd’hui, les femmes me surnomment Nafama Tchè, qui veut dire: un homme qui a compris sa masculinité positive. Je dois beaucoup à ma femme pour ce qu’elle m’a permis d’être aujourd’hui.
Les décisions concernant le côté agricole, vu que c’est son activité, je lui laisse le droit de me faire des propositions. Je réponds ensuite sur ses propositions. Et ensemble, nous prenons une décision à deux.
MONTÉE DE L’INDICATIF MUSICAL, PUIS FONDU ENCHAÎNÉ
Au sein de la famille, elles peuvent gagner plus de respect et de considération de la part de leur conjoint, de leurs membres de famille et même de leur communauté en participant à la culture de cultures de grande valeur. Si la femme travaille, le fardeau du mari est réduit et elle peut aussi se développer psychosocialement.
Les réussites des femmes qui sont impliquées dans des activités génératrices de revenus dans les secteurs formels et informels peuvent mener à leur autonomisation économique et à leur épanouissement.
L’implication des femmes dans l’agriculture, particulièrement dans la culture de cultures de grande valeur, peut contribuer à changer les stéréotypes sur les rôles des hommes et des femmes au sein de la famille et dans la société malienne.
Il est temps de remettre en question certaines anciennes croyances sur les femmes faisant croire qu’elles ne sont destinées qu’à faire des travaux non-rémunérés en famille. Aujourd’hui, force est de constater qu’elles peuvent être des soutiens de taille pour leurs familles, à côté de l’homme. Notamment, à travers des activités génératrices de revenu.
Merci pour votre aimable attention et à bientôt pour une nouvelle émission.
Acknowledgements
Rédaction : Fatoumata Z. Coulibaly, Journaliste-Ecrivaine au Mali, Ségou.
Révisé par : TANNE K. Christian Yannick, Ingénieur Agronome, Spécialité Zootechnie & Productions Animales
Interviews : Kouyaté Aminata dite Mata Sangho, présidente de la Coopérative Djeka Baara. Interview réalisée le mardi 9 janvier 2024.
Mamoutou Kouyaté, mari d’Aminata dite Mata Sangho. Interview réalisée le 9 janvier 2024.
Danzaly Coulibaly, experte en égalité des sexes, Directrice régionale pour la promotion des femmes et des enfants à Ségou. Interview réalisée le 10 janvier 2024.
Cette ressource a été produite dans le cadre de l’initiative « UCARE – Unpaid Care in sub-Saharan Africa » (soins non rémunérés en Afrique subsaharienne), qui vise à renforcer l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes par un engagement en faveur d’un partage plus juste et équitable des soins non rémunérés et du travail domestique au sein du ménage et de la famille en Afrique subsaharienne. Le projet est mis en œuvre en partenariat avec Radios Rurales Internationales (FRI), ONU Femmes et le Réseau de développement et de communication des femmes africaines (FEMNET) grâce à un financement d’Affaires mondiales Canada.