Notes au radiodiffuseur
Vingt millions de personnes, soit un quart de la population éthiopienne, utilisent la banane d’Abyssinie dans leur alimentation. Le sud de l’Éthiopie est bien connu pour sa production de bananiers d’Abyssinie. Les agricultrices et les agriculteurs cultivent cette plante dans toutes les localités de la région, et ce bananier a une valeur particulière pour les populations.
En 1984, une sévère sécheresse a frappé l’Éthiopie. Cependant, le Sud a connu quelques problèmes et les produits du bananier d’Abyssine ont été transférés du sud de l’Éthiopie vers d’autres régions du pays. Bien que les autres cultures aient échoué, le bananier d’Abyssinie a résisté à la sécheresse et a permis à plusieurs personnes de survivre.
Le bananier d’Abyssinie est également connu sous le nom de faux bananier, et son nom scientifique est Ensete ventricosum. Il appartient à la famille des musacées et est souvent confondu avec son célèbre cousin jaune. Mais, contrairement à la banane ordinaire, le bananier d’Abyssinie n’est pas cultivé pour son fruit, mais plutôt pour la pulpe farineuse qui provient de son pseudo-tronc et de son corme, à savoir l’organe souterrain du pseudo-tronc qui ressemble à une pomme de terre.
Le bananier d’Abyssinie peut atteindre 10 m de hauteur et un mètre de diamètre. Il peut rapporter une quantité incroyable de nourriture. En effet, un seul tronc peut rapporter jusqu’à 40 kg de nourriture.
Les chercheurs ont découvert plus de 600 variétés du bananier d’Abyssinie. Mais les agricultrices et les agriculteurs éthiopiens se rendent compte que la plante est de plus en plus sujette aux maladies, et plus particulièrement au flétrissement bactérien causé par la bactérie appelée Xanthomonas campestris.
Étant donné que les agricultrices et les agriculteurs recherchent une solution, Radios Rurales Internationales et d’autres partenaires travaillent avec des stations de radio locales du sud de l’Éthiopie pour diffuser une série d’émissions radiophoniques sur le bananier d’Abyssinie, en vue d’améliorer la production et trouver un remède aux problèmes causés par la maladie.
Le présent texte radiophonique fournit des renseignements sur le bananier d’Abyssinie et les maladies qui attaquent ce bananier. Il a été produit sur la base d’entrevues réalisées avec des agricultrices, des agriculteurs, des experts agricoles et des chercheurs.
Vous pourriez décider de présenter ce texte dans le cadre de votre émission agricole courante, en utilisant des voix d’actrices ou d’acteurs pour représenter les intervenantes et les intervenants. Si tel est le cas, assurez-vous d’informer votre auditoire au début de l’émission que les voix sont celles d’actrices et d’acteurs et non celles des personnes avec lesquelles les entrevues originales ont été réalisées pour ce texte radiophonique.
Vous pourriez également vous inspirer de ce texte radiophonique pour faire des recherches pour la réalisation d’une émission radiophonique sur le bananier d’Abyssinie dans votre pays.
Si vous décidez de vous inspirer de ce texte pour créer votre propre émission sur le bananier d’Abyssinie, vous pourriez vous entretenir avec des agentes ou des agents de vulgarisation, ainsi que des agricultrices et des agriculteurs de votre région et leur poser les questions suivantes :
- Le bananier d’Abyssinie est-il cultivé dans votre région?
- Le bananier d’Abyssinie pourrait-il être cultivé dans votre région? Le climat et les conditions du sol s’y prêtent-ils?
- Les matériaux végétaux sont-ils disponibles pour la production de bananiers d’Abyssinie?
- Les agentes et les agents de vulgarisation savent-ils que cette culture existe dans votre région?
Outre le fait de vous entretenir directement avec les agricultrices et les agriculteurs, ainsi que d’autres acteurs clés du secteur agricole local, vous pourriez vous servir de ces questions pour une tribune téléphonique ou une émission avec envoi de messages textes.
Note : Le kebele est la plus petite unité administrative de l’Éthiopie. Cela ressemble à un quartier ou un faubourg. Les kebeles font partie des woredas, ou districts, qui eux-mêmes font généralement partie d’une Zone, qui à son tour est une partie composante des Régions de l’Éthiopie.
Durée estimée pour ce texte radiophonique: 15-20 minutes avec musique de début et de fin.
Texte
Animateur:
Chers auditeurs, chers auditrices aujourd’hui, nous allons découvrir comment des agricultrices et des agriculteurs locaux au nord du Cameroun travaillent ensemble pour bien entreposer un type de sorgho qui est repiqué en saison sèche et qui s’appelle le
muskuwaari. Nous irons à la rencontre de productrices et producteurs de
muskuwaari de Yonkolé, un village de l’Extrême-Nord du Cameroun.
Grâce au groupement qu’ils ont formé, ces agricultrices et agriculteurs possèdent un grenier situé à Salack, la ville la plus proche du village Yonkolé. Nous allons d’abord à la rencontre du gestionnaire du magasin de Salack.
Animateur:
Bonjour, s’il vous plait pouvez-vous vous présenter à nos auditeurs?
Mvoungou Samuel:
Bonjour, je suis Mvoungaï Samuel, je suis le chef du magasin de stockage de
muskuwaari de Salack.
Bruit d’une porte qui s’ouvre. Bruit de pas.
Animateur:
Nous sommes ici à l’intérieur du magasin et des sacs sont empilés les uns sur les autres de part et d’autre. À qui appartiennent ces sacs et quelles sont les conditions que les gens doivent remplir pour les stocker ici?
Mvoungou Samuel:
Le magasin contient actuellement 525 sacs de 100 kilogrammes chacun. Ces sacs contiennent du sorgho cultivé en saison sèche appartenant aux membres du groupement des productrices et producteurs de
muskuwaari de Yonkolé. Après la récolte, chaque membre a la possibilité de venir stocker sa récolte ici. Chaque membre verse 500 francs CFA par sac, par saison agricole. Cet argent sert à acheter les insecticides utilisés pour l’entreposage et à l’entretien du magasin, par exemple s’il y a une fuite sur le toit ou si un cadenas doit être changé.
Animateur:
Quel sont les critères à remplir pour être magasinier?
Mvoungou Samuel:
J’ai été choisi pour assumer cette tâche parce que je suis parmi les rares personnes qui savent lire et écrire.
Animateur:
Quels types d’insecticide utilisez-vous et pour quelle raison?
Mvoungou Samuel:
Nous utilisons une poudre qu’on verse au-dessus des sacs et dans les coins de la pièce une fois tous les six mois. Cela évite que les grains soient attaqués par les charançons et les souris. Nous utilisons un sachet pour quatre sacs de grains.
Animateur:
Et vous, Samuel, quelles sont vos responsabilités dans ce magasin?
Mvoungou Samuel:
Je suis chargé en premier lieu de veiller à la propreté du magasin. Je nettoie les allées et les alentours extérieurs du magasin. Je viens deux fois par semaine pour ouvrir les portes afin d’aérer. J’enregistre les entrées et les sorties de stock. Lorsqu’une personne vient avec ses sacs je note le nom de la personne, la date et le nombre de sacs laissés. Je signe dans le cahier et la personne contresigne. Ensuite, j’écris le nom de la personne sur ses sacs avant de les ranger dans le magasin.
Lorsque la personne vient récupérer ses sacs, je note également la date et les quantités récupérées. Je veille à ce que les uns ne prennent pas les sacs des autres. Le soir, je ferme le magasin et je conserve les clés. Je signale également en cas de problème, par exemple une fuite d’eau sur le toit.
Animateur:
Je constate que ce magasin est construit en ciment, différemment de toutes les maisons du village qui sont construites en terre et en paille. Qui a construit ce magasin, et d’où vient le financement?
Mvoungou Samuel:
Les membres du groupement des productrices et producteurs de
muskuwaari ont contribué à environ 40 pour cent au financement et le diocèse catholique de Maroua a complété le reste pour la construction de ce magasin qui a été construit il y a dix ans.
Animateur:
Êtes-vous payé pour ce travail?
Mvoungou Samuel:
Je reçois un soutien en nature. Souvent, les membres du groupement décident, volontairement, et par solidarité, de me payer en nature avec un peu de sorgho.
On cogne à la porte. Echange de salutations
Animateur:
Chers auditrices, chers auditeurs, une dame vient à l’instant d’entrer dans le magasin de stockage. Bonjour madame pouvez-vous vous présenter.
Agathe Koulsoumi:
Bonjour. Je suis madame Agathe Koulsoumi, et je suis membre du groupement des cultivateurs de
muskuwaari du village Yonkolé. J’ai mes 10 sacs de
muskuwaari ici et je suis venue en prendre un.
Animateur:
Madame Koulsoumi qu’allez-vous faire de votre sac de sorgho?
Agathe Koulsoumi:
Je vais transformer environ un quart en poudre pour les besoins de ma famille et je vais vendre le reste.
Animateur:
Expliquez-nous comment on procède à cette transformation
Agathe Koulsoumi:
Pour faire la farine servant à la préparation d’un met que nous appelons couscous, on lave les grains, on les sèche, on les pille dans un mortier ce qui est une manière de les décortiquer, puis on les broie dans un moulin à grains et enfin on tamise pour obtenir une poudre fine. Nous utilisons la poudre pour du couscous.
Par contre pour faire de la bouillie de bébé, on trempe d’abord les grains pendant deux jours avant de les écraser. Cela forme une pâte qu’on utilise ensuite pour faire de la bouillie.
On peut aussi faire de la bière de mil appelée ici «bil bil». Dans ce cas le processus est plus long et complexe. Il faut tremper les grains dans une quantité suffisante d’eau de sorte à ce qu’ils soient complètement recouverts pendant quelques jours, et les broyer par la suite. Après les avoir broyé, on fait fermenter les grains dans de l’eau contenant d’autres ingrédients tels qu’un peu d’alcool et des écorces de certains arbres, puis tamiser le mélange pour recueillir la bière. Toute cette transformation se fait manuellement, sauf quand on utilise le moulin pour écraser.
Animateur:
Le processus de transformation semble assez pénible surtout que vous faites tout manuellement. Ne serait-il pas plus efficace de transformer une quantité plus importante moins fréquemment?
Agathe Koulsoumi:
Le problème c’est que le sorgho transformé ne se conserve pas très longtemps. La farine pour le couscous se conserve pendant une semaine au maximum. Après une semaine, lorsqu’on la prépare elle n’a plus le même goût. En plus, elle est attaquée par les charançons.
Donc nous transformons les grains lorsque nous voulons en consommer. Vous ne pouvez pas conserver la pâte destinée à la bouillie pendant très longtemps non plus. Au bout de deux jours elle commence à fermenter et la bouillie a un gout aigre. On peut la conserver la pâte au réfrigérateur pendant un mois et plus, mais nous n’avons pas de réfrigérateurs.
Bruit d’une moto qui ronfle et s’arrête. Bruit de pas qui avancent vers le magasin. Échanges de salutations.
Animateur:
Nous recevons un autre invité qui vient à peine d’entrer dans le magasin. Bonjour monsieur. Pouvez-vous vous présenter?
Issa Mbourou:
Bonjour. Je suis monsieur Issa Mbourou, membre du groupement des productrices et producteurs de
muuskuwaari de Yonkolé. J’ai gardé mes 12 sacs de sorgho ici.
Animateur:
Pourquoi avez-vous choisi de garder votre récolte dans un magasin communautaire au lieu d’utiliser votre grenier à la maison?
Issa Mbourou:
Nous préférons garder nos sacs ici car l’endroit est bien adapté pour le stockage des graines. Nous cimentons le sol, et le magasin est grand, aéré et sec. Il est très pratique et beaucoup moins coûteux pour les membres d’avoir un gestionnaire de magasin pour s’occuper de leurs grains entreposés.
Animateur:
Que se passe-t-il après la récolte jusqu’à ce que les grains soient entreposés ici? Quelles sont les mesures qui sont mises en œuvre du champ jusqu’à l’arrivée des grains dans ce magasin?
Issa Mbourou:
Dès que le
muskuwaari est prêt à être récolté, on coupe les épis, on les met à sécher sur une natte par terre pendant une ou deux semaines. Ensuite on les bat. On utilise un bâton pour battre les épis. Lorsqu’on tape les épis de
muskuwaari, on détache les grains des épis. C’est plus rapide que de séparer les graines unes à unes de l’épi. Après le battage des épis on procède au nettoyage des grains, en les débarrassant de la saleté, du sable et des autres déchets. Les grains sont collectés et entassés dans des sacs pour l’entreposage.
Animateur:
Nous allons maintenant nous adresser à une spécialiste, pour recueillir son avis. Madame Carine Mala est enseignante-chercheure à l’université de Maroua. Bonjour Madame Carine Mala.
Carine Mala:
Bonjour à vous ainsi qu’aux auditrices et auditeurs
Animateur:
Les cultivateurs de muskuwaari de Yonkolé disent qu’ils utilisent des produits chimiques, notamment les insecticides pour mettre les graines à l’abri des attaques des rongeurs. Qu’en pensez-vous?
Carine Mala:
La manipulation des produits chimiques de façon générale a toujours des répercussions sur le sol et sur les vies humaines et animales. Les répercussions peuvent être parfois d’une moindre intensité, et d’autres fois elles peuvent être graves. Il est vrai qu’après une certaine période, ces produits chimiques deviennent moins toxiques pour l’homme, qu’ils soient utilisés au champ ou contre les rongeurs qui sont les principaux insectes qui s’attaquent aux grains dans un entrepôt. Au champ, la rotation culturale et l’usage d’insecticides biologiques à la place des produits chimiques sont toujours recommandés contre les principaux ravageurs, à savoir les insectes foreurs.
Animateur:
Si vous n’utilisez pas d’insecticides chimiques dans le champ, comment faites-vous avec les insectes foreurs?
Carine Mala:
Il existe plusieurs méthodes: la rotation des cultures, la destruction des tiges qui ont été attaquées par les insectes foreurs et qui abritent encore ces insectes et l’usage d’insecticides biologiques constituent des moyens efficaces d’éviter l’utilisation de produits chimiques. Le
muskuwaari est très sensible aux foreurs de tige.
En fait les agricultrices et les agriculteurs doivent commencer à protéger les cultures du muskuwaari dès la pépinière, car les œufs pondus dès la pépinière poursuivront leur développement après le repiquage et auront des répercussions notables sur le rendement de culture. Les insectes foreurs causent un mauvais remplissage du grain et une absence d’épis.
Après le repiquage, les œufs éclosent et laissent place aux chenilles qui perforent les tiges. Elles se réfugient à l’intérieur des tiges, s’y nourrissent et s’y développent, jusqu’à leur maturité lorsque les grains deviennent durs. Puis, les adultes émergent pour parasiter le sorgho pluvial et le muskuwaari.
Si le traitement s’avère efficace en pépinière, les agricultrices et les agriculteurs peuvent traiter chaque tige une fois de plus à l’étape du repiquage, au début de la floraison et à l’étape d’épiaison pour être sûr qu’aucun parasite n’affecte la production
Animateur:
Les agricultrices et les agriculteurs disent qu’ils ont également du mal à conserver le
muskuwaari une fois qu’il est transformé.
Carine Mala:
Oui. Comme toutes les autres denrées, le
muskuwaari se conservent mieux à l’état naturel que lorsqu’il est transformé en des produits comme la farine. Pour une bonne conservation des grains, il est capital de laisser la plante arriver à maturité et de se s’assurer que le taux d’humidité des grains est faible lorsque les grains sont prêts à être stockés. Sinon, le
muskuwaari sera plus vite attaqué au niveau du stockage. Si les grains sont bien séchés, les agricultrices et les agriculteurs peuvent les conserver dans des sacs en jute et dans un milieu sec et bien aéré. Les charançons aiment l’humidité. C’est pourquoi on précise toujours aux paysannes et aux paysans que le lieu d’entreposage doit être sec, et que le grain doit mûrir bien et être bien sec.
Nous préconisons aux agricultrices et aux agriculteurs d’observer une stricte hygiène. Par exemple: le site d’entreposage doit être régulièrement balayé et nettoyé, et les portes doivent être ouvertes pour aérer le site, et éviter la moisissure, les charançons et les rongeurs tels que les rats et les souris.
Dans ce climat chaud et sec où les conditions climatiques rendent le séchage solaire accessible à tous, je crois qu’il est plus pratique de laisser les grains atteindre leur maturité en champ, et de les laisser ensuite bien sécher avant de les entreposer, pour ensuite les transformer au fur et à mesure en fonction des besoins de la famille.
Animateur:
Chers auditrices et auditeurs, aujourd’hui nous avons appris comment les paysannes et les paysans de l’Extrême Nord du Cameroun ont travaillé ensemble, en vue de trouver un moyen efficace pour entreposer leur récolte. Le groupement entrepose les grains dans un grenier communautaire. Les membres du groupement des productrices et producteurs de
muskuwaari ont cotisés pour construire un entrepôt et payent en nature le gestionnaire du grenier.
La conservation des grains en groupe permet à chaque agricultrice ou agriculteur d’avoir du temps pour contrôler régulièrement les sites d’entreposage et veiller à l’application d’une bonne hygiène. Cela en vaudra la peine surtout pour le peu d’argent que les agricultrices et les agriculteurs doivent dépenser pour confier à un gestionnaire de magasin la responsabilité de veiller à l’entreposage qui contribue à protéger le muskuwaari contre les principaux ravageurs et rongeurs, ainsi que les termites qui s’attaquent aux grains sur le site d’entreposage.
Acknowledgements
Rédaction : Haile Kassaya,
Révision : Ashenafi Mekonen, chercheur en vulgarisation agricole au Centre de recherche d’Areka
Information sources
Entrevues réalisées avec :
Agricultrices et agriculteurs :
Yakob Segaro, 26 octobre 2014
Amarech Samuel, 26 octobre 2014
Getachew Fikre, 26 octobre 2014
Samuel Selatu, 27 octobre 2014
Daniel Dukele, 27 octobre 2014
Belaynesh Bekele, 27 octobre 2014
Agronomes
Nigussie Alemu, 28 octobre 2014
Mearu Genetu, 28 octobre 2014
Chercheur :
Ashenafi Mekonen, 5 novembre 2014
Projet réalisé grâce à l’appui financier du gouvernement du Canada par l’entremise du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (MAECD)
Ce texte radiophonique a été rédigé avec le soutien d’Irish Aid.