L’autonomisation empêche les jeunes de consommer des drogues

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Notes au radiodiffuseur

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Les jeunes sont l’épine dorsale du développement futur de toute nation. Le recensement de 2010 au Kenya a révélé qu’il y a approximativement six millions de jeunes (personnes âgées de 18 à 35 ans) sur une population totale de 38 millions d’habitants. La consommation abusive de drogues menace de plus en plus les jeunes. Une étude réalisée en avril 2007 par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime a localisé plus de 12 000 héroïnomanes et 103 repaires de drogues à Nairobi et dans la Province de la côte du Kenya.

La NACADA (campagne contre l’abus de drogues au Kenya) a effectué un sondage en 2007 qui a révélé qu’environ 40 % des Kenyans âgés de 15 à 65 ans ont bu une sorte d’alcool ou une autre. Il mentionne en outre que 77 % des jeunes font une consommation abusive d’alcool en dehors de l’école et 28 % à l’école. Cela signifie que les jeunes du Kenya sont à risque de contracter des problèmes connexes, comme une infection par le VIH. Pourquoi ? Parce que l’abus d’alcool affecte le fonctionnement du cerveau, ce qui engendre des comportements à haut risque comme l’indulgence sexuelle avec un(e) partenaire qui peut être infecté(e), donnant lieu à des infections par le VIH/sida et à d’autres infections transmises sexuellement.

Dans une entrevue accordée à un journal kenyan, l’ancien directeur de la NACADA, Joseph Kaguthi, a fait remarquer que les substances qui causent le plus grand préjudice aux jeunes sont celles qui sont disponibles légalement, comme l’alcool, et pas les substances interdites.

Le présent texte examine une approche créative du problème de toxicomanie et de pauvreté dans un bidonville de Kibera. La Pamoja Youth Foundation, organisme communautaire local, a lancé un programme d’autonomisation qui a formé des jeunes en entrepreneuriat et en promotion de la paix.

Notez que le présent texte utilise les termes « travailleuse du sexe », « travail sexuel » et « commerce du sexe » à la place de « prostituée » et de « prostitution ». Ces termes ont été inventés parce que certaines personnes pensaient que « prostituée » et « prostitution » stigmatisaient les personnes qui gagnent ainsi leur vie. Comme toujours, les radiodiffuseurs devraient faire leurs propres choix sur le langage à utiliser.

Le présent texte repose sur des entrevues réelles. Vous pourriez vous en inspirer pour faire des recherches et rédiger un texte sur un sujet semblable dans votre région. Ou encore vous pourriez choisir de produire ce texte dans votre station en utilisant des voix d’acteurs pour représenter les gens qui parlent. Si tel est le cas, veuillez vous assurer de prévenir votre auditoire, au début de l’émission, que les voix sont celles d’acteurs et non pas des personnes initialement impliquées dans les entrevues.

Texte

Montée de l’indicatif pendant 15 secondes, puis fondu enchaîné

Animateur :
Bienvenue à un nouvel épisode de l’émission pour les jeunes In Focus, qui se concentre sur les personnes ayant un impact positif sur cette génération. (Pause) Imaginez d’être pris au piège dans le monde des drogues et dans le commerce du sexe. Ces problèmes ressortent fortement dans les histoires de jeunes dans le bidonville de Kibera à Nairobi. Durant l’émission d’aujourd’hui, un ancien toxicomane, Joshua Sepipe, partagera de quelle façon il s’est habitué aux drogues et comment il a ensuite réussi à changer sa vie. Nous parlerons aussi à Akinyi, qui était auparavant une travailleuse du sexe, et plus tard à Raphael Omondi de Pamoja Youth, un organisme communautaire qui change des vies dans le bidonville. Bienvenue à notre émission, Sepipe.

Sepipe :
Merci; tout le plaisir est pour moi.

Animateur :
À quoi ressemble la vie d’un jeune qui vit dans le bidonville?

Sepipe :
En règle générale, la vie est difficile pour les jeunes dans le bidonville. À cet endroit, certaines activités se déroulent ouvertement, d’autres clandestinement. Le taux de toxicomanie est élevé, surtout pour les drogues dures comme le bhang (Note de la rédaction : la marijuana), le khat et la cocaïne. Les jeunes chômeurs errent le long de la voie ferrée. Il y a également des activités sexuelles, même si ce n’est pas aussi évident que dans des endroits comme Majengo. Il est assez difficile de ne pas se retrouver dans l’eau chaude. Des tas de drogues sont vendues dans la rue. Kibera est comme le quartier général de la drogue. Mais nous ne savons pas d’où viennent les drogues.

Animateur :
À votre avis, pourquoi les jeunes sont-ils impliqués dans la drogue?

Sepipe :
Je dirais que c’est à cause de l’oisiveté et des mauvaises fréquentations. Les jeunes hommes consomment des drogues à partir de 14 heures. Beaucoup sont chômeurs, avec ou sans instruction. Il y a également beaucoup de pression des pairs pour consommer des drogues. Les femmes sont impliquées comme les hommes. Si on pouvait occuper les jeunes en leur trouvant un emploi, alors ils pourraient éviter de consommer des drogues.

Animateur :
Comment avez-vous commencé à prendre de la drogue?

Sepipe :
Tout a commencé quand j’étais en 3e année au secondaire. J’avais des tas d’amis qui consommaient de la drogue. Un jour, nous sommes allés à une fête et ils m’ont fait connaître la drogue. Au début, j’ai refusé. Mais ils ont insisté. Ils m’ont acheté de la cocaïne et du soda. L’un d’entre eux m’a dit que c’était une drogue inoffensive. J’y ai goûté et je suis devenu dépendant avec le temps.

Animateur :
Comment la toxicomanie vous a-t-elle affecté?
Sepipe :
(Rempli de remords) Elle a eu un impact négatif. J’ai décroché de l’école secondaire. Ma vie a été ruinée. J’ai négligé ma famille, malgré le fait que j’habitais dans un foyer chrétien.

Animateur :
Au retour, Sepipe continuera de partager d’autres faits sur son changement de mode de vie. Restez à l’écoute.

Montée de l’indicatif pendant 30 secondes, puis fondu enchaîné

Animateur :
Bon retour. Nous avons avec nous Sepipe, un jeune homme autrefois toxicomane et maintenant formateur de jeunes. Qu’est-ce qui vous a poussé à adhérer aux programmes d’autonomisation de la Pamoja Youth Foundation?

Sepipe :
La fondation Pamoja est l’organisme le plus populaire à Kibera. À l’époque, elle dispensait des programmes de théâtre et de sensibilisation durant les week-ends. J’admirais leurs services de vulgarisation et leurs programmes. Je voyais qu’ils étaient engagés et que ma vie changerait. Alors, j’ai adhéré. Après mon adhésion à la fondation Pamoja, je fus réadapté. Je me suis rendu compte que j’avais bousillé ma vie. À partir de ce moment-là, elle a pris un virage à 180 degrés.

Animateur :
Depuis lors, comment en avez-vous bénéficié?

Sepipe :
(Heureux) J’ai pu terminé mon secondaire. Par la suite, j’ai suivi des cours de counselling et de formation en leadership. Aujourd’hui, je fais du travail de communication orale, même si j’étais timide auparavant. J’ai développé mon estime de soi en sortant avec des embres de l’organisme pour parler aux habitants de la collectivité sur divers enjeux. Je suis maintenant chargé du programme Démocratie et Gouvernance à la fondation Pamoja!

Animateur :
Que faites-vous pour encourager d’autres jeunes encore plongés dans la drogue à améliorer leur vie?

Sepipe :
Nous allons parler aux toxicomanes dans les endroits où ils consomment des drogues. Nous partageons les expériences que nous avons vécues avant d’être guéris de la toxicomanie. Après bien des discussions et des conseils, ils décident souvent d’abandonner les drogues. Aujourd’hui, parmi mes quatre amis qui étaient toxicomanes, trois ne le sont plus. Je m’occupe du dernier. Nos programmes ont un impact. Nous nous assurons d’effectuer régulièrement une surveillance et une évaluation de nos projets.

Animateur :
Quels genres de conseils donneriez-vous à d’autres jeunes?

Sepipe :
En tant que jeunes, nous avons de nombreuses possibilités, surtout avec la nouvelle constitution du Kenya. Il ne faut pas baigner dans l’oisiveté. N’attendez pas que le gouvernement intervienne dans vos problèmes. Vous êtes le gouvernement. Vous pouvez démarrer votre propre entreprise et prendre de l’expansion.

Montée de la musique et fondu enchaîné sous la voix de l’animateur

Animateur :
Vous êtes toujours à l’écoute de l’émission éducative hebdomadaire In Focus. Avant la pause, nous avons entendu Sepipe, qui consommait des drogues avant d’obtenir des conseils et un traitement auprès de la fondation Pamoja. D’après les recherches effectuées dans 13 villages à Kibera, la fondation Pamoja semble être l’organisme le plus populaire, qui apporte du changement dans la vie de bien des gens. Nous allons maintenant entendre un autre cas de réussite, cette fois-ci une jeune femme qui a été obligée de se livrer au commerce du sexe à cause de la pauvreté, mais qui est maintenant une femme d’affaires, grâce à la fondation Pamoja. Bienvenue, Akinyi.

Akinyi :
C’est un plaisir d’être ici.

Animateur :
Akinyi, comment était votre vie de jeune fille à Kibera?

Akinyi :
La vie était difficile pour moi et pour ma famille. J’ai grandi dans un milieu modeste. Nous avions à peine de quoi manger. Quand j’avais quatorze ans, nos parents sont morts du sida.

Animateur :
Comment était la vie sans parents à un si jeune âge?

Akinyi :
Étant l’aînée d’une famille de cinq enfants, je devais être le soutien de famille. Je mendiais de la nourriture auprès des voisins, ou bien j’allais au dépotoir et j’attendais l’arrivée des camions de poubelles de Nairobi. Parfois, nous avions la chance de trouver des aliments frais dans des sacs scellés que l’on jetait. Alors que mes pairs allaient à l’école, moi j’allais à la ville pour mendier dans les rues. Une fois, j’ai rencontré quelques filles qui m’ont suggéré d’essayer le commerce du sexe. Ce fut une décision difficile pour moi au début. Mais ensuite, j’y ai consenti. Cela m’a rapporté quelques shillings de plus pour prendre soin de mes frères et sœurs.

Animateur :
Pendant combien de temps avez-vous mené ce genre de vie?

Akinyi :
Au bout d’un an et demi, j’étais vraiment au bord du désespoir. Les affaires allaient mal et la plupart des clients partaient sans payer et même me battaient! Alors que j’étais assise dans notre baraque un samedi, j’ai entendu une annonce par un système public de sonorisation disant que la fondation Pamoja collaborait avec une ONG pour inviter les jeunes à une formation dans la région. Les personnes intéressées pouvaient y assister. J’y suis allée et ce fut une grande révélation pour moi. J’ai rencontré Raphael Omondi et d’autres responsables du groupe et j’ai partagé mon histoire.

Animateur :
En quoi vous ont-ils aidée?

Akinyi :
Ils ont envoyé des membres chez nous pour évaluer les besoins. Ils ont parlé à mes frères et sœurs et à nos voisins. En fin de compte, je me suis inscrite à la formation en gestion d’entreprises. J’ai décidé de quitter mon ancien travail et j’ai démarré une entreprise de vente de légumes.

Animateur :
Comment avez-vous trouvé le capital de démarrage pour votre entreprise?

Akinyi :
Obtenir le capital a été difficile. Le groupe nous a donné un coup de puce en nous jumelant à des institutions de micro-finance comme la Equity Bank. Nous avons obtenu des prêts de faveur avec une bonne période de remboursement. Ils continuent à nous mentorer et à nous aider en fonction des besoins. Je suis également retournéeà l’école secondaire, avec une bourse obtenue auprès de partenaires de la fondation Pamoja, et mes frères et sœurs vont aussi à l’école.
Animateur :
En dehors de l’entreprise que vous dirigez, êtes-vous impliquée dans un quelconque travail de développement communautaire?

Akinyi :
Je suis également impliquée dans le programme de santé périnatale. Je suis allée volontairement faire un test pour le sida et je suis chanceuse que le résultat soit négatif. Nous aidons d’autres filles ayant des soucis de santé en leur donnant des conseils, des serviettes sanitaires et de la formation. Je suis reconnaissante envers la fondation Pamoja qui est venue à ma rescousse lorsque j’en avais besoin.

Animateur :
Raphael Omondi est le directeur de la Pamoja Youth Foundation à Kibera, l’organisme communautaire qui a changé la vie de Sepipe, d’Akinyi et de bien d’autres. Il sera le prochain invité à partager son expérience avec nous.

EFFETS SONORES :
Bruits d’enfants dans une salle de classe typique en arrière-plan. Fondu enchaîné sous la voix de l’animateur.

Animateur :
Bienvenue à notre émission, Raphael.

Raphael :
Merci beaucoup. C’est un plaisir pour moi d’être ici.

Animateur :
Comment a débuté la fondation Pamoja Youth?

Raphael :
En 2004, mes amis et moi avons formé un réseau de jeunes dans notre école secondaire. Nous avons fait du lobbying auprès des leaders locaux pour mettre sur pied une école secondaire gouvernementale à Kibera, appelée Olympic High School. Par la suite, j’ai remarqué que, malgré la présence de nombreuses ONG dans le bidonville, la vie des résidents ne changeait pas. Mes amis, avec lesquels je faisais du lobbying, ont créé la fondation Pamoja en décembre 2004. Son enregistrement a été effectué l’année suivante.

Animateur :
Parlez-nous de quelques-unes des initiatives que vous menez actuellement?

Raphael :
Tout d’abord, notre initiative du bidonville vert par le boisement. Nous avons planté plus de 26000 arbres sur des terrains publics. Nous voulons aussi réduire le nombre de sacs de polyéthylène jetés à Kibera. En outre, nous avons établi un partenariat avec l’Université de Strathmore et l’Université de Nairobi pour former notre personnel et les jeunes à Kibera sur la santé périnatale. Notre programme d’apprentissage informatique a été lancé en 2008 et a formé au moins 50 étudiants. Récemment, nous avons organisé un festival parrainé par la ville. Les policiers et les jeunes ont joué de la musique hip hop dans le but d’améliorer la relation entre la police et la jeunesse. Notre programme de médias pour le développement social a formé des jeunes pour travailler dans la presse écrite et électronique. Enfin, nous avons des cercles d’étude, dans lesquels nous abordons les enjeux concernant les jeunes. C’est un forum dans le cadre duquel la collectivité peut dire quels projets elle souhaite voir réaliser.

Animateur :
De quelle façon les activités de la fondation Pamoja ont-elles eu un impact sur les jeunes de Kibera?

Raphael :
L’autonomisation économique est la principale préoccupation de la fondation Pamoja. Nous avons mis les jeunes en contact avec des institutions de micro-finance. Les jeunes dirigent maintenant leurs propres entreprises. Notre programme d’alphabétisation a permis à certains jeunes de s’inscrire dans des écoles secondaires et des collèges. Certains ont été mis en contact avec des ONG où ils ont trouvé des emplois. Le plus important, c’est que nous avons favorisé l’unité chez les jeunes en éliminant l’ethnicité négative. Durant longtemps, le tribalisme a dominé le bidonville. Les politiciens ont utilisé les jeunes pour répandre le tribalisme afin d’obtenir des votes.

Montée de la musique et fondu enchaîné sous la voix de l’animateur

Animateur :
Nous avons parlé à Raphael Omondi, directeur de la Pamoja Youth Foundation. Il a jeté un certain éclairage sur le genre de projets dans lesquels le groupe est impliqué. L’organisme a aidé Joshua Sepipe, un jeune kenyan, à guérir de sa toxicomanie. Sepipe est maintenant un leader qui intervient auprès des jeunes touchés par l’alcool et les drogues. Akinyi, une jeune femme que la pauvreté a obligée à se livrer au commerce du sexe, gère désormais sa propre entreprise.

(Pause) Si vous avez des questions sur le sujet du jour ou d’autres préoccupations, envoyez-les par SMS à 2992. L’émission In Focus vous serait reconnaissante d’avoir de vos nouvelles. À la semaine prochaine, même jour, même heure Au micro Charles Kemboi qui vous souhaite une bonne semaine.

Montée de l’indicatif final pendant 30 secondes, puis fondu enchaîné

Acknowledgements

Rédaction : Charles Kemboi, réalisateur, Shine 103.1 FM, station de radio étudiante de l’Université Daystar
Révision : Busisiwe Ngcebetsha, formateur en radio et gestionnaire de projets, Media and Training Centre for Health, Le cap, Afrique du Sud
Traduction : Jean-Luc Malherbe, Société Ardenn, Ottawa, Canada

Information sources

Entrevues avec Raphael Omondi, directeur de la Pamoja Youth Foundation, et Joshua Sepipe, un jeune vivant dans le bidonville de Kibera, le 4 octobre 2010 à Kibera, Nairobi, au Kenya.
Entrevue avec Akinyi Akumu, jeune entrepreneure d’Ayany, Kibera, à Nairobi, le 22 février 2011.
NACADA (National Campaign Against Drug Abuse) Authority for a Drug Free Nation. Alcohol and Drug Abuse – Driving the HIV/AIDS Epidemic.
http://www.nacada.go.ke/2010/03/alcohol-and-drug-abuse-%E2%80%93-driving-the-hivaids-epidemic/John Osoro. In Order to Fight Drugs Effectively, We Need to Have All Information about Narcotics.Article publié le 20 février 2011 dans The Daily Nation à l’adressehttp://allafrica.com/stories/201102200144.html