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Introduction

La gestion communautaire des forêts est initiée par les communautés vivant à proximité des forêts, et/ou par les gouvernements ou les partenaires de développement en réponse à la destruction des forêts. Elle peut également être appelée gestion forestière participative, gestion forestière communautaire ou gestion forestière conjointe. Dans la gestion forestière communautaire, la communauté a le droit de prendre des décisions importantes sur la manière dont une forêt et ses ressources sont utilisées, gérées et conservées, et elle exerce généralement ces droits par l’intermédiaire d’associations forestières communautaires. Les communautés qui vivent à proximité des forêts sont motivées pour en prendre soin, car elles contribuent à leur subsistance. La gestion communautaire des forêts peut être appliquée à la gestion des forêts naturelles et des terres boisées, ainsi qu’aux plantations et aux terres boisées appartenant à la communauté.

 

Pourquoi ce sujet est-il important pour les auditeur.trice.s ?

Parce que les communautés forestières d’Afrique subsaharienne doivent savoir :

  • Comment les communautés vivant à proximité des forêts peuvent s’organiser pour les conserver.
  • Les avantages que les communautés peuvent retirer d’une gestion et d’une conservation efficaces des forêts.
  • Les types de règlements que les communautés devraient adopter et respecter pour aider à gérer leurs forêts.
  • Comment utiliser durablement les ressources forestières.
  • Comment collaborer avec les gouvernements et les organisations de développement pour développer des activités génératrices de revenus durables – à l’intérieur ou à l’extérieur de la forêt – sans pour autant mettre celle-ci en péril.
  • Comment les forêts déboisées peuvent être reconstituées avec des arbres, et comment reconstituer les forêts avec les espèces d’arbres les meilleures et les plus adaptées.
  • Comment créer, gérer et soutenir les groupes de gestion des forêts communautaires.

 

Quelles sont les principales caractéristiques de la gestion communautaire des forêts ?

  • En Afrique de l’Est et de l’Ouest, les communautés sont plus enclines à gérer et à conserver les forêts si elles peuvent en tirer un revenu et des moyens de subsistance.
  • L’une des principales tâches de la gestion communautaire des forêts est de déterminer comment les ressources naturelles d’une forêt peuvent être utilisées et quelles utilisations ne sont pas durables. Les communautés ont besoin d’être formées à l’exploitation durable des ressources forestières, sans les détruire.
  • La gestion communautaire des forêts réduit le braconnage et l’incidence de l’abattage illégal.
  • Les communautés vivant à proximité des forêts doivent participer à l’élaboration d’un plan d’utilisation, de gestion et de protection des terres forestières. Le plan doit comprendre une carte établie par la communauté qui montre où et comment les ressources forestières telles que le bois, le miel et le bois de chauffage seront récoltées.
  • Les communautés doivent élaborer des règlements régissant l’utilisation et la protection de la forêt et prévoir des amendes ou d’autres mesures dissuasives approuvées par la communauté pour ceux qui ne respectent pas les plans de gestion de la forêt.
  • Les efforts de conservation des forêts devraient être liés à l’amélioration des moyens de subsistance des communautés voisines. Des recherches menées en Tanzanie ont établi un lien entre la dégradation des ressources naturelles et les faibles niveaux de revenus des communautés vivant à proximité des forêts.
  • Les communautés peuvent s’organiser de différentes manières pour gérer les forêts. Au Ghana, le gouvernement a créé des zones de gestion des ressources communautaires (CREMA) qui rassemblent les communautés partageant des ressources communes afin qu’elles les gèrent conjointement sans discrimination. Les CREMA servent de zones tampons pour les parcs et les réserves, qui abritent des forêts menacé

Quels sont les principaux défis en matière de gestion des forêts communautaires ?

  • Les communautés à faibles revenus qui dépendent fortement des forêts pour leur subsistance quotidienne sont moins susceptibles de se préoccuper de la gestion forestière à long terme ou d’être en mesure de la mettre en œuvre.
  • Dans le nord du Ghana et ailleurs, les communautés qui dépendent fortement des forêts pour leur subsistance se heurtent parfois aux autorités responsables de la gestion des forêts à propos de l’utilisation des ressources.
  • Au Kenya, les communautés qui gèrent les forêts n’ont pas le pouvoir de poursuivre les bûcherons illégaux et les braconniers d’animaux sauvages qu’elles arrêtent pour utilisation abusive des ressources.
  • Des politiques, des règlements ou des plans peu clairs sur la manière dont les communautés peuvent partager équitablement les ressources forestières et les revenus qu’elles génèrent.
  • Lorsque les ressources forestières telles que le bois sont rares, elles peuvent être insuffisantes pour être partagées par une communauté proche d’une forêt.
  • Les communautés forestières peuvent avoir des conflits entre elles concernant le partage et l’utilisation des ressources forestières.
  • Il n’y a pratiquement pas de forêts gérées par les communautés en Ouganda, car la plupart des décisions relatives aux activités forestières sont prises au niveau des ménages.
  • Au Nigeria, malgré l’augmentation de la population et le déclin des ressources forestières, la gestion communautaire des forêts n’est guère efficace pour protéger et restaurer les ressources forestières.
Pour plus d’informations, voir les documents 1 à 25.

Aspects sexospécifiques de la gestion communautaire des forêts

  • À Tharaka Nithi, au Kenya, les femmes participent plus souvent que les hommes à la gestion des forêts, car ces derniers travaillent loin de chez eux et de la forêt. Ce sont également les femmes qui sont les plus touchées par la dégradation de l’environnement, puisqu’elles vont puiser l’eau, ramasser le bois de chauffage et les matériaux de construction dans les forêts.
  • En Tanzanie, bien que les femmes possèdent des connaissances et des compétences liées à la gestion des ressources naturelles, leur rôle dans la gestion des forêts est limité en raison d’une hiérarchie entre les sexes qui restreint leur participation.
  • En Afrique de l’Ouest, les femmes ignorent souvent leurs droits sur les terres, les forêts et les arbres, ainsi que la manière dont elles peuvent bénéficier des produits et services forestiers. Elles ne savent pas non plus qu’elles ont le droit de prendre des décisions sur la gestion des forêts.
  • Au Cameroun, les hommes préfèrent planter des arbres susceptibles d’apporter un revenu élevé, tandis que les femmes qui s’occupent des enfants et des autres membres de la famille peuvent opter pour des arbres qui fournissent des fruits et du fourrage, qui ont des propriétés médicinales et qui améliorent la fertilité du sol.
  • Au Ghana et au Burkina Faso les femmes influencent les décisions de leurs maris sur le choix des arbres à karité à conserver dans la moitié des familles, tandis que dans l’autre moitié, ce sont les hommes qui choisissent les arbres à karité à conserver.
Pour plus d’informations, voir les documents 2, 3, 10 et 11.

 

Impact prévisible du changement climatique sur la gestion des forêts communautaires

  • Dans le district de Masindi, à l’ouest de l’Ouganda, le défrichement de la forêt entraîne la disparition des pluies et rend les membres de la communauté vulnérables aux effets du changement climatique.
  • La dégradation de la forêt Mau au Kenya a donné lieu à des actions visant à la restaurer afin de préserver les moyens de subsistance des communautés riveraines de la forêt et de les rendre plus résistantes au changement climatique.
  • Le gouvernement de l’État de Cross River au Nigeria (qui abrite 50 % des forêts du pays) participe aux efforts en cours pour réduire les effets du changement climatique en aidant les communautés à tirer profit des moyens de subsistance basés sur la forêt en utilisant les ressources forestières de manière durable.
  • Le changement climatique devrait réduire le volume de biomasse disponible dans les forêts du Burkina Faso (et d’ailleurs) et entraîner la disparition de certaines espèces de plantes.
Pour plus d’informations, voir les documents 9, 13 et 23.

 

Quand la gestion communautaire des forêts est-elle nécessaire ?

Les communautés se lancent dans la gestion forestière communautaire pour diverses raisons, notamment:

  • La dégradation des sols causée par une mauvaise utilisation et gestion des forêts.
  • Les effets du changement climatique entraînant un temps sec et une perte de végétation.
  • Lorsque la communauté ne dispose pas des compétences et des capacités nécessaires pour lutter contre l’épuisement des ressources naturelles qui menace ses moyens de subsistance.
  • Lorsque les communautés à faibles revenus vivant à proximité des forêts surexploitent les ressources naturelles.
  • Lorsque des communautés dépendent d’une forêt pour leur alimentation et leurs ressources, comme le bois de chauffage.
  • Lorsque des conflits surviennent au sein d’une communauté en raison d’un partage inéquitable des ressources forestières ou lorsqu’il y a une concurrence intense pour les ressources naturelles minimales disponibles.
  • Lorsqu’il y a braconnage d’animaux sauvages par les communautés vivant à proximité des forêts.

 

Facteurs à prendre en compte avant de mettre en œuvre la gestion communautaire des forêts

  • La communauté doit être informée des avantages qu’elle tirera de la protection et de la conservation de la forêt. Ces avantages peuvent inclure l’accès au bois et aux produits forestiers non ligneux provenant des parcelles mises en réserve à cette fin.
  • Les communautés doivent être impliquées dans les structures de gouvernance et de prise de décision dès le début de la mise en place de la gestion communautaire des forêts, afin qu’elles n’aient pas l’impression de perdre leur forêt et ses ressources au profit de sources extérieures. Cela permet également de minimiser leur résistance aux idées de conservation de la forêt qui leur sont présentées.
  • Il est important d’identifier les espèces rares de plantes, d’arbres et d’animaux sauvages qui doivent être protégées et ne doivent pas être utilisées à des fins domestiques.
  • Des règlements doivent être rédigés pour régir la manière dont les ressources d’une forêt seront partagées de manière durable par les communautés voisines.
  • Il est nécessaire d’envisager une structure de gouvernance adaptée pour la gestion des ressources et le partage équitable des bénéfices.
  • Les communautés doivent mener des recherches afin de découvrir comment la communauté bénéficiera de la gestion forestière, comment les ressources forestières seront sauvegardées et comment la communauté reconstituera la forêt si elle s’épuise.
  • Il est important de discuter de la manière dont les ressources forestières seront protégées contre les dommages environnementaux, la déforestation et le braconnage.
  • Les communautés doivent créer un processus de résolution des conflits internes, qui surviennent souvent lorsque les ressources forestières se raréfient en raison de conditions climatiques difficiles et/ou d’une utilisation excessive.
  • Les communautés devraient considérer l’importance d’introduire des innovations en matière d’énergie renouvelable au sein de la communauté afin de réduire la dépendance excessive à l’égard des ressources forestières en tant que sources d’énergie (par exemple, le bois de chauffage) et de prévenir la déforestation.
  • Il est nécessaire de former les membres de la communauté aux pratiques d’utilisation durable des forêts et des terres tout en utilisant la forêt comme moyen de subsistance. Les communautés devront décider quelles ressources peuvent être utilisées, dans quelles zones de la forêt, en quelles quantités et à quelle fréquence.
  • Les communautés doivent prendre note des leçons tirées des projets précédents afin d’augmenter les chances de succès lors de la mise en œuvre d’un nouveau plan de gestion de la forêt communautaire.
  • Il est également nécessaire de disposer d’un cadre législatif/politique favorable au niveau national pour la gestion des ressources communautaires.
Pour plus d’informations, voir les documents 1, 4-8, 14-19, 20-25.

Systèmes agroforestiers

L’agroforesterie est l’une des approches souvent utilisées par les associations de gestion des forêts communautaires. L’agroforesterie est un système d’utilisation des terres dans lequel des arbres ou des arbustes sont cultivés en même temps que des cultures agricoles ou dans des pâturages. L’agroforesterie est l’une des approches souvent utilisées par les associations de gestion des forêts communautaires. L’agroforesterie est un système qui permet de faire pousser dans les terres des arbres ou des arbustes en même temps que des cultures agricoles ou des pâturages pour le bétail. Lorsqu’ils sont utilisés avec soin, les arbres et les arbustes n’entravent pas la croissance des cultures et les arbres légumineux ajoutent même des nutriments tels que l’azote au sol, tout en apportant de l’ombre aux cultures telles que le maïs, les haricots, les légumes et les bananes lorsqu’il fait chaud. Les arbres et arbustes souvent utilisés dans les systèmes agroforestiers sont les suivants : Grevillea robusta, leucaena, Sesbania grandiflora, haricot de velours, Gliricidia sepium et Calliandra calothyrsus. Les arbres et les arbustes attirent également les abeilles et, en installant des ruches, les communautés peuvent récolter du miel. Dans les systèmes agroforestiers, les arbres et les arbustes peuvent également fournir du fourrage pour le bétail comme les chèvres et les vaches.

Pour plus d’informations, voir le document 12.

Deux exemples de réussite en matière de gestion communautaire des forêts

  1. Initiative de conservation de la forêt d’Ekuri, Nigeria

En 1991, le parc national de Cross River a été créé par le gouvernement de l’État de Cross River au Nigeria. Près du parc se trouvait une forêt de 33 600 hectares considérée comme faisant partie du parc et que la communauté Ekuri, qui compte 600 membres pratiquant l’agriculture de subsistance, a commencé à conserver à partir des années 1980 afin d’empêcher les activités d’exploitation forestière proposées dans le parc national. La forêt comprend l’ancien et le nouveau village d’Ekuri, qui sont distants de sept kilomètres. Après la création du parc, la communauté a demandé à l’autorité du parc l’autorisation de gérer elle-même la forêt. Leur demande a été approuvée et un agent forestier communautaire leur a été affecté. Il les a aidés à mettre en place un système forestier géré par la communauté, le premier du genre au Nigeria.

En échange de la conservation de la forêt, la communauté Ekuri tire profit de la forêt à travers l’agriculture, la récolte de produits forestiers non ligneux, la fabrication d’objets artisanaux, le commerce à petite échelle de feuilles forestières comestibles et de mangues de brousse, ainsi que la chasse et la pêche. Deux parcelles de 50 hectares ont été mises de côté pour que la communauté puisse récolter le bois et les produits forestiers non ligneux dont elle a besoin.

En 1992, le groupe communautaire Ekuri est devenu une entité formelle, l’Initiative Ekuri. Cette Initiative comprend le peuple Ekuri (appelé assemblée générale), un conseil d’administration, un coordinateur de projet et du personnel de soutien, comme les gardes locaux qui patrouillent la forêt. Le conseil d’administration compte dix membres, dont quatre femmes, sélectionnés dans les deux villages. La direction change tous les quatre ou cinq ans. Dans les groupes de microcrédit de l’initiative, les femmes sont plus nombreuses que les hommes.

Au début de chaque année, les villages de la communauté Ekuri se réunissent pour planifier les activités de l’année et mettre de côté les fonds nécessaires. Au cours de ces réunions, les décisions relatives à la manière dont l’argent est dépensé doivent être approuvées par les deux villages Ekuri et un rapport de fin d’année est présenté à la communauté à des fins d’évaluation, de responsabilisation et de retour d’information. Les projets de politiques sont présentés à l’assemblée générale avant d’être évalués par le conseil qui supervise l’initiative Ekuri. Ce conseil prend des décisions en fonction des priorités de la communauté Ekuri. Les membres de la communauté sont plus enclins à respecter les décisions puisqu’ils participent à leur élaboration et qu’elles ne sont pas imposées par des autorités extérieures.

Les femmes participent à la prise de décision à tous les niveaux et dans toutes les activités, y compris la gouvernance forestière, le développement communautaire et les activités de réduction de la pauvreté. Les décisions sont basées sur l’équilibre entre l’utilisation des ressources forestières et les activités de conservation.

Au fil des ans, les deux communautés Ekuri ont mis en œuvre des mesures visant à garantir que la conservation à long terme de la forêt soit prioritaire par rapport à leurs besoins de subsistance immédiats. L’initiative Ekuri a pour mission d’effectuer des coupes de bois contrôlées et de vendre du bois dans l’intérêt de la communauté, les revenus étant affectés à la rémunération des gardes forestiers locaux. L’abattage a lieu dans des parcelles désignées et pour des arbres d’au moins 70 centimètres de diamètre à hauteur de poitrine, tandis que les arbres plus petits sont conservés jusqu’à ce qu’ils atteignent leur maturité et produisent des graines.

Les arbres se trouvant sur des terres individuelles ou dans des concessions sont la propriété de la communauté. Les membres de la communauté sont autorisés à récolter des arbres à des fins domestiques, par exemple pour construire des maisons ou des meubles, mais pas à des fins commerciales. Personne d’autre que les membres de la communauté Ekuri n’est autorisé à récolter et à vendre des produits forestiers non ligneux, et les membres de la communauté ne peuvent vendre qu’à des négociants enregistrés dans le cadre de l’initiative Ekuri.

La communauté utilise les terres forestières conformément aux protocoles établis. Les membres de la communauté sont responsables de l’arrestation des bûcherons illégaux. Au fil des ans, les membres de la communauté qui récoltent illégalement des arbres ont été poursuivis en justice.

Bien que l’initiative Ekuri soit considérée comme un modèle de gestion communautaire des forêts au Nigeria, des problèmes subsistent. La communauté d’Ekuri craint que les concessions forestières accordées par le gouvernement de l’État et les projets de construction d’une autoroute n’entraînent une surexploitation de la forêt et l’expropriation de leurs terres. Selon Edwin Ogar, membre fondateur de l’initiative Ekuri, cette surexploitation détruirait l’habitat de 350 espèces d’oiseaux, de buffles et d’éléphants d’Afrique, de chimpanzés, de singes et d’autres espèces d’arbres, de plantes et d’animaux sauvages menacés.

L’initiative Ekuri a reçu de nombreuses subventions et récompenses environnementales au fil des ans. En 1997, la Fondation Ford a financé la délimitation des terres communautaires après des négociations avec les communautés voisines. Ce financement a également permis de dispenser une formation sur l’élaboration d’inventaires de bois et de plans initiaux d’utilisation des terres pour la forêt. En 2004, l’initiative Ekuri a remporté un prix Équateur d’une valeur de 5 000 dollars.

Pour plus d’informations, voir les documents 4-6, 17, 18, 22 et 24.

  1. Conservation de la forêt d’Arabuko Sokoke

En 1993, les Musées nationaux du Kenya et Nature Kenya ont introduit le projet de papillons Kipepeo auprès des communautés à faibles revenus vivant à proximité de la forêt Arabuko Sokoke de 41 600 hectares sur la côte du Kenya. Le projet Kipepeo Butterfly implique les membres de la communauté dans l’élevage de papillons de nuit et de papillons de jour et l’exportation de leurs chrysalides vers des parcs à insectes en Europe et aux États-Unis où ils éclosent et attirent les visiteurs pendant leur durée de vie de 12 jours.

Le projet a été mis en place pour fournir des moyens de subsistance alternatifs aux membres de la communauté qui dépendaient de l’exploitation illégale du bois et du braconnage des animaux sauvages de la forêt. Au fil des ans, la forêt s’est dégradée car plus de 100 000 membres de la communauté, répartis dans 50 villages, en exploitaient les ressources. La plupart sont des agriculteur.trice.s qui cultivent du maïs, du manioc et des haricots, ainsi que des cultures commerciales comme la noix de coco et la noix de cajou. Ils coupent les arbres pour la construction, le bois de chauffage, la production de charbon de bois et la fabrication de sculptures. Le braconnage des antilopes, des rongeurs, des oiseaux et des espèces sauvages rares, comme le duikier d’Aders, la musaraigne éléphantesque à croupion doré et la mangouste à queue touffue de Sosoke, est également pratiqué pour la viande de brousse. Sa conservation était vitale car la forêt d’Arabuko Sokoke, riche en biodiversité, est le plus grand bloc de forêt côtière naturelle subsistant en Afrique de l’Est, avec la plus grande concentration de plantes et d’animaux endémiques et menacés d’extinction.

Au cours de l’étude de faisabilité du projet, lorsque l’idée de gagner sa vie en vendant des chrysalides de papillons et de papillons nocturnes a été proposée aux communautés vivant à proximité d’Arabuko Sokoke, la plupart d’entre elles l’ont rejetée en raison de leurs croyances culturelles selon lesquelles cette activité était moralement répréhensible. Quelques membres de la communauté ont décidé d’essayer, tandis que d’autres ont adopté une attitude attentiste. Quelques années plus tard, lorsque les membres les plus réceptifs ont commencé à gagner de l’argent en vendant des chrysalides, les inscriptions au projet se sont multipliées. Par la suite, le service forestier du Kenya a revu la loi sur les forêts et a introduit une clause de cogestion de la forêt, donnant aux communautés voisines la possibilité de participer à la gestion des ressources forestières. Cela a finalement abouti à la création d’associations forestières communautaires.

Nature Kenya et les musées nationaux du Kenya ont mené des campagnes de sensibilisation auprès des communautés vivant à proximité de la forêt pour leur faire prendre conscience de l’importance de la conserver. Les communautés ont été invitées à renoncer à l’exploitation forestière illégale et à la chasse à la viande de brousse et à adopter un modèle durable d’utilisation des ressources telles que le bois et les plantes utilisées en phytothérapie. Dès le début du projet, les habitants ont été encouragés à planter des arbres chez eux afin de réduire leur dépendance vis-à-vis de la forêt.

Le service forestier du Kenya a limité l’accès des communautés locales aux ressources naturelles aux trois premiers kilomètres de la forêt. Elles étaient autorisées à collecter des poteaux dans le premier kilomètre et du bois de chauffage dans le deuxième kilomètre. Le troisième kilomètre était consacré à la conservation de la biodiversité, avec des activités d’écotourisme non extractives telles que l’observation des oiseaux et les promenades à bicyclette.

Nature Kenya, Friends of Arabuko-Sokoke Forest et A-Rocha Kenya ont acheté et distribué des plants d’arbres et d’arbres fruitiers aux communautés pour qu’elles les plantent dans leurs fermes. Ces arbres fournissent un feuillage qui attire des insectes tels que les papillons. Pour que la communauté puisse en bénéficier rapidement, les espèces fournies étaient à maturation rapide, comme Casuarina, Azadirachta indica (neem) et Gmelina arborea. L’apiculture a également été introduite.

Plus de 10 000 habitants participent au projet de papillons et aux autres activités génératrices de revenus qui ont été introduites parallèlement, notamment l’apiculture, l’agroforesterie et la culture d’aloès et de champignons. Le projet papillons peut rapporter à chaque participant entre 100 et 200 dollars américains par semaine. La communauté s’efforce également de replanter des arbres indigènes, ce qui a permis d’améliorer la couverture forestière.

Msanzu Karisa est un éleveur de papillons d’une quarantaine d’années et père de trois enfants. Depuis qu’il a rejoint le projet Kipepeo Butterfly en 2006, il en a vu les avantages économiques. Il gagne 40 000 à 50 000 shillings kenyans (300 à 385 dollars américains) par mois en vendant 200 à 400 chrysalides de papillons. Grâce à ces revenus, il a pu éduquer ses frères et sœurs et acheter un acre de terrain où il envisage de construire une maison. M. Karisa appartient à un groupe d’élevage de papillons qui compte 70 membres. Les membres élèvent les papillons individuellement, mais chaque groupe a un représentant qui rassemble les chrysalides et les livre au centre du projet Kipepeo. Le projet paie les membres de la communauté pour les chrysalides, puis les vend à des acheteurs internationaux. Les représentants rencontrent également le personnel de gestion du projet pour discuter de la production, de la commercialisation et des questions liées aux groupes d’élevage de papillons. Chaque membre est payé pour les papillons qu’il livre. Les chrysalides qui ne sont pas expédiées à l’étranger sont élevées au centre du projet Kipepeo. Les visiteurs et visiteuses du centre doivent payer pour les voir et l’argent gagné est partagé entre les éleveurs de papillons à la fin de l’année.

Selon M. Karisa, le succès du projet de papillons a motivé les membres de la communauté à conserver la forêt d’Arabuko Sokoke et à faire preuve de vigilance en signalant les braconniers ou les bûcherons illégaux au service forestier du Kenya, ce qui a permis de réduire ce type d’infractions.

Au fil des ans, le Kipepeo Butterfly Project a reçu des fonds de la part d’organisations donatrices. Par exemple, en 2003, l’USAID a versé 1,2 million de dollars pour des activités de conservation telles que la plantation d’arbres et le projet d’élevage de papillons.

Pour plus d’informations, voir les documents 1, 7, 8, 14, 16, 19 et 21.

Acknowledgements

Rédigé par : James Karuga, journaliste agricole, Kenya

Révisé par : Elijah Yaw Danso, consultant en développement social et en gestion des ressources naturelles, Ghana

Interviews :

Martins Egot, Porte-parole de la communauté Ekuri et Président du conseil d’administration de l’Initiative Ekuri, Nigeria, interviewé le 30 mai 2024.

Edwin Ogar, Ancien coordinateur de programme, Ekuri Initiative, Nigeria, interviewé le 1er juin 2024.

Msanzu Karisa, Gardien de papillons, Projet Kipepeo, Comté de Kilifi, Kenya, interviewé le 10 juin 2024.

Information sources

Références

  1. Antonínová, M., Ochieng, M., and Kanundu, J., 2020. Forest Exploitation Report Arabuko-Sokoke Forest 2018 – 2020: Technical Report. Friends of Arabuko-Sokoke Forest. https://friendsarabukosokoke.org/wp-content/uploads/2021/08/ASF_ExploitationReport_2018-2020_all.pdf (5.37 MB).
  2. Campese, J., 2011. Gender and REDD+ in Tanzania: An overview of key issues. http://www.tfcg.org/wp-content/uploads/2018/05/Gender-and-REDD-in-Tanzania-2011.pdf (3.37 MB).
  3. Colfer, C. J. P., Basnett, B. S., and Elias, M., 2016. Gender and Forests: Climate change, tenure, value chains and emerging issues. https://www.cifor-icraf.org/publications/pdf_files/Books/BColfer1701.pdf (10.3 MB).
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  5. Gaworecki, M., 2016. Nigerian government urged to halt “land grab” in Ekuri community forest. Mongabay. https://news.mongabay.com/2016/03/nigerian-government-urged-to-halt-land-grab-in-ekuri-community-forest/
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  8. Kipepeo Project, undated. Arabuko Sokoke Forest. https://kipepeo.org/the-forest/
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  12. Miccolis, E., et al, 2016. Agroforestry systems for ecological restoration: How to reconcile conservation and production: Options for Brazil’s Cerrado and Caatinga biome. https://apps.worldagroforestry.org/downloads/Publications/PDFS/B19034.pdf World Agroforestry. (31.7 MB).
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  18. Unah, L., 2019. Ekuri Initiative: Inside a Nigerian community’s battle to keep its forest. https://news.mongabay.com/2019/08/ekuri-initiative-inside-a-nigerian-communitys-battle-to-keep-its-forest/
  19. UNEP, 2020. Paying the school fees, one butterfly at a time. https://www.unep.org/news-and-stories/story/paying-school-fees-one-butterfly-time
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  22. Wildlife Conservation Society, 2017. A Threat to the Forest and the Community: WCS talks with Martins Egot of the Ekuri Initiative. https://www.wcs.org/get-involved/updates/a-threat-to-the-forest-and-the-community
  23. World Bank, 2012. Using forests to enhance resilience to climate change: The Case of the Wood-Energy Sector in Burkina Faso. https://www.profor.info/sites/profor.info/files/Country%20case%20study%20-%20Burkina%20Faso_0.pdf
  24. World Rainforest Movement, 2013. Nigeria: A unique example of community based forest management at the Ekuri community. WRM Bulletin #195. https://www.wrm.org.uy/bulletin-articles/nigera-a-unique-example-of-community-based-forest-management-at-the-ekuri-community
  25. Andrew Kyei Agyare, Lars Haubye Holbech, Nico Arcilla, 2024. Great expectations, not-so-great performance: Participant views of community-based natural resource management in Ghana, West Africa. https://authors.elsevier.com/sd/article/S2666-0490(24)00011-2 (1.2).
  26. Satoyama Initiative, 2019. Empowering communities for natural resource management: the case of Community Resource Management Areas (CREMA) in Western Ghana. https://satoyama-initiative.org/case_studies/empowering-communities-for-natural-resource-management-the-case-of-community-resource-management-areas-crema-in-western-ghana/