Notes au radiodiffuseur
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L’eau est un élément vital dans les foyers ruraux, autant pour l’usage domestique que pour l’agriculture. Le district de Soroti, dans l’est de l’Ouganda, a deux saisons des pluies. Durant la saison sèche, il n’y a pas beaucoup d’activités agricoles. Cependant, certains agriculteurs cultivent des plantes vivaces. Mais ces plantes ne peuvent survivre que s’il y a assez d’humidité dans le sol accumulée pendant la saison des pluies.
Une communauté du village d’Ajera, sous-comté d’Asuret (dans le district de Soroti), a conçu un mécanisme compensatoire pour assurer que le sol de ses fermes renferme suffisamment d’humidité tout au long de la saison sèche. Ils utilisent l’eau de ruissellement et l’eau sous-terraine tirée d’un trou de forage, pour irriguer les cultures telles que des oranges, des ananas, des mangues, des goyaves, des arachides, des tomates, des melons, des bananes et des légumes. La communauté assure aussi l’entretien du pourtour du trou de forage chaque week-end; chaque famille doit participer afin de bénéficier d’une eau salubre et propre. Dans ce texte radio, le radiodiffuseur rend deux visites à la communauté et discute avec ses habitants.
Ce texte est basé sur des interviews réelles menées auprès de villageois, en Ouganda. Pour la production de ce texte sur votre station, vous pouvez choisir d’utiliser les voix d’acteurs pour jouer le rôle des participants à l’interview, et changer la formulation du texte pour l’adapter à votre situation locale. Dans ce cas, veuillez vous assurer d’informer votre auditoire dès le début de l’émission que les voix sont celles d’acteurs, pas celles des personnes interrogées à l’origine, et que le programme a été adapté à votre auditoire local mais se base sur de vraies interviews.
Texte
Personnages:
Animateur
M. Ojok Christopher : agriculteur et chef de la ferme Ajokis Edeke
Mme Adongo Norah : agriculteur
M. Okello Michael : agriculteur
Mme Asio Grace : agriculteur
Mme Inachu Loyce : agriculteur
M. Edongu Simon : agriculteur
Thème musical de l’émission
ANIMATEUR :
Bienvenue à notre émission sur l’agriculture d’aujourd’hui. Aujourd’hui, nous avons une émission spéciale sur l’agriculture, l’eau et la salubrité. C’est une émission spéciale car elle traitera de problèmes de la vie quotidienne, relatifs à la santé, l’eau, l’agriculture et la sécurité alimentaire dans nos maisons. Nous entendrons les témoignages de membres de la communauté du village d’Ajera, dans le sous-comté d’Asuret (District de Soroti), dans l’est de l’Ouganda. Cette communauté utilise de l’eau tirée d’un trou de forage, pour l’agriculture et les besoins domestiques et, parallèlement, garde l’eau propre afin de prévenir des maladies liées à l’eau telles que la diarrhée. Parce que c’est un défi que de collecter assez d’eau pour l’arrosage des cultures, ainsi que de l’eau propre et saine pour les besoins domestiques (surtout durant la saison sèche), nous apprendrons comment les habitants de cette communauté s’organisent pour assurer une production agricole tout au long de l’année, et pour garder leur famille en bonne santé en utilisant de l’eau saine et propre tirée d’un trou de forage plutôt que d’utiliser l’eau des marais.
Nous parlerons avec M. Ojok Christopher, le dirigeant de la ferme Ajokis Edeke, ainsi qu’à plusieurs autres agriculteurs, parmi lesquels Mme Adongo Norah, M. Okello Michael, Mme Asio Grace, Mme Inachu Loyce et M. Edongu Simon. Ils sont tous membres de la communauté d’Ajera.
Bienvenue à notre émission. Je suis sûr que de nombreux auditeurs attendent impatiemment de vous écouter parler de votre nouvelle approche visant l’utilisation de l’eau pour les besoins domestiques et agricoles. Nous parlerons avec les agriculteurs après cette courte pause.
Courte pause musicale
ANIMATEUR :
Bienvenue à notre émission. M. Ojok Christopher est le dirigeant de la ferme Ajokis Edeke. Veuillez nous expliquer comment vous avez conçu le plan d’irrigation permettant d’utiliser de l’eau, à la fois pour faire pousser les plantes toute l’année et pour fournir de l’eau propre et saine pour la consommation.
M. OJOK :
Bonjour, chers auditeurs. Eh bien, comme vous l’avez dit, on m’appelle communément Ajokis Edeke. J’ai eu cette idée en 1986 quand j’ai commencé à planter des orangers dans mon village, à Ajera. En 1987, nous avons abandonné le village à cause de l’insurrection des rebelles. Durant deux ans, dans mon nouveau village, nous ne cultivions la terre qu’à petite échelle pour la consommation domestique. Quand je suis revenu après la guerre, il n’y avait que de mauvaises herbes. Alors, j’ai redémarré une ferme à partir de rien.
ANIMATEUR :
Quelle était l’étendue de vos champs au moment de l’insurrection?
M. OJOK :
J’ai commencé avec environ un hectare et demi. Dans le village d’Ajera, la plantation d’arbres fruitiers ne se faisait pas sur de grandes surfaces; nous n’avions que quelques arbres dans les limites de notre propriété. Mais je planifiais faire pousser des fruits pour la vente, donc j’ai essayé de cultiver mes fruits sur une surface légèrement plus grande que la norme.
ANIMATEUR :
Merci pour ces explications. J’espère que les agriculteurs qui nous écoutent réalisent désormais qu’ils peuvent innover et planifier de cultiver des produits pour la vente. Nous avons aussi Mme Adongo Norah, qui fait partie de la ferme Ajokis Edeke. Soyez la bienvenue. Veuillez nous parler de votre expérience par rapport à l’utilisation de l’eau pour l’irrigation.
Mme ADONGO :
Bonjour, chers auditeurs et merci de m’avoir invitée. J’ai le privilège d’être parmi les personnes qui bénéficient de la technologie qui permet d’utiliser l’eau tirée d’un trou de forage pour faire pousser des plantes ainsi que pour les besoins domestiques.
ANIMATEUR :
Veuillez nous parler de la situation du village avant l’avènement de cette technologie.
Mme ADONGO :
Autrefois, nous perdions beaucoup de nos arbres fruitiers durant la saison sèche parce que nous n’arrivions pas à collecter suffisamment d’eau de la source naturelle pour irriguer tous les arbres ou pour nos besoins domestiques. Nous transportions l’eau de la source sur nos têtes, dans des pots ou dans des bidons. Mais il arrive que la source s’assèche. D’autre part, l’eau de source n’est pas sécuritaire car les animaux tels que les vaches peuvent aussi boire de cette même eau.
ANIMATEUR :
À quelle distance de votre maison se trouve la source?
Mme ADONGO :
Elle est à un kilomètre de chez moi.
Mme ASIO :
En ce qui me concerne, la source est à un kilomètre et demi de chez moi. Nous vivons dans le même village mais nos maisons sont très éloignées l’une de l’autre. L’eau est un sérieux problème dans notre village. Beaucoup de femmes du village vont désormais s’approvisionner en eau à la ferme Ajokis Edeke. L’eau y est très saine, en comparaison à l’eau de source que nous utilisions autrefois.
ANIMATEUR :
Oui, il y a des problèmes d’eau dans de nombreuses régions rurales. Vous avez mentionné que l’eau du trou de forage est utilisée autant pour la consommation domestique que pour l’agriculture. Comment procède-t-on?
M. EDONGU :
Merci. Le trou de forage est comme n’importe quel autre trou de forage. Mais, au point de sortie, nous avons soudé au conduit principal un conduit supplémentaire. Ce second conduit amène l’eau vers un réservoir.
ANIMATEUR :
Il y a donc un réservoir quelque part?
M. EDONGU :
Oui, nous avons un réservoir dans lequel nous gardons les excédants d’eau qui autrement s’échapperaient et seraient perdus. Nous avons construit le réservoir nous-mêmes, avec du ciment et des briques faits par des membres de la communauté. C’est un réservoir circulaire d’environ deux mètres de diamètre sur deux mètres de profondeur.
M. OKELLO :
L’eau est acheminée vers le réservoir par un conduit long de trois mètres et demi. Ainsi, lorsqu’on pompe de l’eau à travers le conduit principal du trou de forage, pour remplir des contenants, une partie de l’eau va vers le réservoir. C’est ainsi que s’accumule dans le réservoir l’eau pour l’irrigation agricole.
ANIMATEUR :
Intéressant. Comment avez-vous appris que cette technologie existait?
M. OJOK :
C’était notre propre idée. Nous avions besoin d’un système qui nous fournirait de l’eau pour les fermes tout en gardant le pourtour du trou de forage propre. Nous avons donc demandé aux soudeurs d’ajouter une autre pièce de métal ainsi qu’un conduit, afin de pouvoir avoir de l’eau pour remplir les contenants pour l’usage domestique et aussi de l’eau qui soit acheminée vers le réservoir d’eau, que nous utilisons pour l’arrosage de nos plantes. Pendant la saison sèche, nous utilisons l’eau du réservoir pour l’irrigation. L’eau est récupérée à l’aide d’une simple pompe à activation manuelle. Ainsi, au lieu que l’eau pompée en excès éclabousse le pourtour du trou de forage et le rende boueux, cette eau est conduite vers le réservoir. Cela permet de garder propre le pourtour du trou de forage.
ANIMATEUR :
Et pour l’agriculture, comment l’eau du réservoir est-elle utilisée?
M. OJOK:
Le réservoir d’eau a un dispositif qui est connecté aux conduits qui mènent aux vergers. Ce dispositif est régulé. Quand les conduits sont ouverts le matin et le soir, l’eau va directement vers les arbres fruitiers. Cela les garde humides et verts tout au long de l’année. Le niveau d’eau dans le réservoir est maintenu constant car les gens viennent régulièrement chercher de l’eau pour l’usage domestique, donc de l’eau propre s’accumule continuellement dans le réservoir.
ANIMATEUR :
Et comment ça se passe pendant la saison des pluies?
M. OKELLO :
Durant la saison des pluies, nous n’ouvrons pas les valves qui permettent l’écoulement de l’eau vers la ferme parce que le sol renferme déjà assez d’humidité qui peut être absorbée par les plantes. Nous stockons l’eau pour les périodes sèches. Vous vous demandez peut-être comment une telle idée a pu émerger d’un village comme le nôtre. Mais comme disent les Européens, nécessité est mère d’invention. Nos besoins en eau ont stimulé une profonde réflexion chez un groupe de villageois jusqu’à ce qu’une solution au problème a été trouvée.
ANIMATEUR :
Alors, comment la communauté garde-t-elle le pourtour du trou de forage propre et exempt de pathogènes?
Mme INACHU :
Les trous de forage sont habituellement des aires humides et boueuses, avec des eaux stagnantes qui attirent les moustiques, qui causent à leur tour le paludisme. Mais avec cette méthode, nous utilisons toute l’eau tirée du trou de forage, et minimisons la quantité d’eau qui s’échappe du dispositif principal. À la place, l’eau est acheminée vers le conduit qui la mène au réservoir. Nous assurons aussi, collectivement, le nettoyage régulier des environs pour garder le pourtour du trou de forage propre. En cas de panne, nous contribuons tous aux réparations. Après réception de l’estimation des coûts totaux de réparation, le montant est divisé entre toutes les familles qui utilisent le trou de forage. En fait, nous avons un comité d’entretien du trou de forage qui s’occupe des réparations et nous n’avons jamais eu de problèmes dans ce domaine. La communauté démontre une très bonne coopération car elle sait qu’elle en bénéficie. De plus, avant de rapporter l’eau à domicile, nous nous assurons qu’elle est saine en nettoyant tous nos contenants au trou de forage. Nous les lavons dans l’eau puisée du petit réservoir et l’eau usée produite sert à l’arrosage des jardins potagers situés autour du trou de forage. À la maison, nous couvrons l’eau potable avec une assiette propre si elle est stockée dans un pot, ou bien on la stocke dans une bassine ou dans un bidon. Même à nos animaux nous ne donnons que de l’eau du trou de forage plutôt que celle des marécages, afin de prévenir les infections.
ANIMATEUR :
Tout ceci est vraiment très intéressant. Cher auditeurs, nous continuerons cette émission sur l’eau et la salubrité dans la communauté agricole d’Ajokis Edeke, à Asuret. Nous allons faire une courte pause musicale.
Pause musicale
ANIMATEUR:
Nous revoici. Nous nous entretenons avec les agriculteurs d’Asuret, qui ont conçu une brillante méthode pour optimiser l’utilisation de l’eau de leur trou de forage de forage et minimiser les pertes en eau.
Mme ASIO :
De nombreux villageois ont énormément appris de nos nouvelles méthodes, et aujourd’hui ils recyclent autant que possible l’eau du trou de forage, après son utilisation pour les besoins domestiques. Nous avons tous des jardins potagers, dans nos arrière-cours; toute l’eau qui reste après le lavage de la vaisselle, les activités d’hygiène personnelle et la lessive est utilisée pour l’arrosage des légumes de nos jardins potagers.
ANIMATEUR :
Est-ce que cela a aussi été motivé par l’initiative de la ferme Ajokis Edeke?
M. OJOK :
Oui, je les ai beaucoup inspirés. En s’impliquant dans les activités de la ferme et en voyant comment j’arrive à maintenir la propreté autour du trou de forage et de ma maison, les gens ont beaucoup appris, particulièrement en ce qui concerne l’utilisation de l’eau. Ils ont aussi appris comment faire du fumier composté, comment utiliser de la fiente de vaches et des cendres pour optimiser la fertilité de leurs sols, et comment greffer des arbres fruitiers pour le commerce.
ANIMATEUR :
Les gens d’Ajera doivent être très occupés.
Mme ASIO :
Oui, en effet. Nous sommes tout le temps occupés mais c’est payant parce que nos fruits se vendent bien. Les gens les achètent à cause de leur belle taille et de leur bon goût. Et nous sommes en bonne santé!
Mme ADONGO :
Quand on voit nos mangues, nos oranges, nos ananas et nos goyaves sur le marché, ils sont plus juteux que tous les autres. C’est un avantage commercial pour nous.
M. OJOK :
Bien sûr, les variétés de fruits que nous cultivons sont greffés et exotiques. Ils ont plus de goût, sont plus juteux et ont une odeur agréable qui attire les clients. En fait, le Président ougandais, Son Excellence Yoweri Museveni, a visité notre ferme et nous a offert deux vaches.
ANIMATEUR :
Vous voulez dire que le Président est venu au village d’Ajera pour visiter votre ferme? Eh bien, c’est vraiment très intéressant!
M. OKELLO:
Oui. Il est bel est bien venu et a recommandé que le Service de Conseil Agricole National vienne apprendre de cette innovation.
M. OJOK :
Après cette visite, beaucoup de gens sont venus à nous pour apprendre diverses choses. Cela a amélioré notre visibilité et nous a fait beaucoup de publicité.
M. EDONGU :
Nous avons beaucoup bénéficié de la technologie de l’eau. Sans cette technologie, la ferme ne serait pas prospère et nos familles ne seraient même pas en bonne santé car nous n’aurions pas la possibilité d’avoir de l’eau propre.
Mme INACHU:
Durant la saison des pluies, nous collectons l’eau de ruissellement de nos terrasses et stockons cette eau dans un bassin sous-terrain qui est utilisé pour l’arrosage des pépinières.
ANIMATEUR :
Donc, vous avez aussi des pépinières?
Mme INACHU :
Oui, nous cultivons beaucoup d’arbres fruitiers et nous avons un gros marché d’acheteurs qui inclut des groupes d’agriculteurs. Par exemple, nous avons cinq types d’arbres fruitiers que nous greffons pour la vente.
M. OKELLO :
Nous fournissons des drageons d’ananas à de nombreux agriculteurs; en ce moment, nous avons une commande pour quatre camions pleins de drageons d’ananas.
ANIMATEUR :
Merci infiniment pour toutes ces informations. (Pause) Nous sommes arrivés à la fin de notre émission du jour sur l’agriculture, l’eau et la salubrité. Merci aux agriculteurs d’Ajokis Edeke, qui, à partir d’un simple trou de forage, ont élaboré un système à l’origine d’un vibrant succès agricole et qui promeut la salubrité au sein de leur communauté. J’espère que les auditeurs ont beaucoup appris de cette émission. C’était votre animateur, Alachu Davies, de Voice of Teso, 88.4 FM. Bonne journée et à la prochaine!
Acknowledgements
Rédaction : Alachu Davies, Voice of Teso, Soroti, Ouganda, un partenaire radio de Radios Rurales Internationales.
Alan Etherington, expert-conseil indépendant en eau, en assainissement et en promotion de l’hygiène, et ex-employé de WaterAid.