Restauration des terres I – Restauration des paysages forestiers

Arbres et agroforesterieEnvironnementSanté des sols

Notes au radiodiffuseur

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En 2011, une ONG internationale dénommée Union internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) a lancé une campagne dans une région aride de l’est de l’Ouganda, en vue de restaurer les paysages forestiers totalement détruits par des années de pratique de brûlis et de déboisement. Grâce au projet « Approches écosystémiques de l’adaptation au changement climatique », l’UICN a encouragé les agricultrices et les agriculteurs à envisager de planter des arbres pour que ces derniers puissent aider le sol à retenir l’eau, réduire les effets de la sécheresse et contribuer à l’augmentation du rendement des cultures.

La campagne visait aider les populations à redonner vie à la terre et à éviter que celle-ci ne se transforme en un désert total. Toute la végétation avait disparu de cette terre occupée par une forêt il y a de cela trois décennies. Les sécheresses se prolongeaient, car il n’y avait aucun arbre pour provoquer la formation des pluies. Les vents étaient violents parce qu’il n’y avait pas d’arbres pour servir de brise-vent, et les eaux de pluie s’évaporaient tout simplement en raison du manque de couvert végétal, laissant derrière elles des nuages de poussière dans l’air. Les rendements de culture étaient faibles, car le sol n’était plus fertile.

L’UICN a pris diverses mesures. En effet, elle a encouragé les populations à planter des arbres, leur a fourni gratuitement des semis, de l’eau pour arroser les semis, ainsi que des stimulants financiers aux personnes qui s’occupaient des arbres. L’UICN a également donné aux agricultrices et aux agriculteurs des formations sur les bonnes pratiques agricoles
durables, et a récompensé celles et ceux qui avaient appliqué lesdites méthodes. Les brûlis ont été déconseillés et les gens ont été plutôt encouragés à utiliser de l’herbe sèche et des résidus de culture pour pailler leurs cultures. Quelques années après avoir mené ces activités, les populations commencent à comprendre l’importance des arbres pour la vie du sol, et ils en plantent de plus en plus de leur propre chef.

La plantation d’arbres sur les terres agricoles comporte un certain nombre d’avantages pour les agricultrices et les agriculteurs. Les arbres procurent plusieurs sortes de produits, y compris du bois pour la construction et les combustibles, des produits médicinaux et des fruits pour la vente et la consommation familiale. Ils créent également de l’ombrage pour les cultures qui aiment avoir de l’ombre, et stockent le carbone, diminuant par la même occasion les gaz à effet de serre. Certains types d’arbres apportent plus d’azote atmosphérique au sol, contribuant ainsi à fertiliser les cultures qui poussent à côté d’eux directement à travers leurs racines, et lorsque leurs feuilles tombent au sol.

Ce texte radiophonique est basé sur de véritables entrevues. Vous pourriez décider de présenter ce texte radiophonique dans le cadre de votre émission agricole courante, en utilisant des voix d’actrices et d’acteurs pour représenter les intervenantes et les intervenants.

Si tel est le cas, n’oubliez pas de prévenir l’auditoire au début de l’émission que les voix sont celles d’actrices et d’acteurs et non celles des personnes avec lesquelles les entrevues originales ont été réalisées.

Vous pourriez vous inspirer de ce texte radiophonique pour faire des recherches et réaliser une émission radiophonique sur les avantages liés à la plantation d’arbres dans votre région.

Si vous décidez de vous inspirer du présent texte radiophonique pour créer votre propre émission, vous pourriez vous entretenir avec des agricultrices, des agricultrices, ainsi que d’autres expertes et experts, et leur poser les questions suivantes :

  • Les agricultrices et les agriculteurs de votre région plantent-ils des arbres dans leurs champs, ou laissent-ils quelques arbres sur leurs champs? S’ils le font, pourquoi? En profitent-ils? S’ils ne le font pas, pourquoi?
  • Pour quelles raisons ne plantent-ils pas d’arbres? Par exemple, certains agricultrices et agriculteurs n’exercent pas un droit d’occupation sécurisé sur leurs terres et ne peuvent pas vendre les produits d’arbres mûrs.
  • Certains agriculteurs et agricultrices ont-ils trouvé des solutions à ces problèmes, ainsi qu’à bien d’autres? Si tel est le cas, invitez ces agricultrices et agriculteurs, ou des agentes et des agentes de vulgarisation, et d’autres expertes et experts, à raconter leurs histoires sur les ondes.

Vous pourriez également animer une émission comportant une tribune téléphonique sur laquelle les agricultrices et les agriculteurs peuvent discuter de ces problèmes. Vous pourriez inviter une experte ou un expert en plantation d’arbres pour examiner et répondre aux questions et aux commentaires des agricultrices et des agriculteurs.

Durée estimée pour ce texte : 20 minutes, avec musique de début et de fin.

Texte

ANIMATEUR:
Bonjour, chers auditrices et auditeurs, et bienvenue à l’émission. Je m’appelle ____. Je me trouve à Sanzara, un village du district de Kapchorwa, dans la région du mont Elgon, à l’est de l’Ouganda.

Je suis ici pour rendre visite à quelques agricultrices et agriculteurs, qui vont nous parler de l’importance des arbres pour l’agriculture. Plus tard, je m’entretiendrais avec un assistant de terrain qui travaille pour l’organisation Union internationale pour la Conservation de la Nature ou UICN. Il n’a ménagé aucun effort pour convaincre les agricultrices et les agriculteurs de la région du fait que les arbres constituaient la vie de la terre et pour les motiver à planter des arbres et à en prendre soin.

Mais tout d’abord, nous allons écouter un groupe d’agricultrices et d’agriculteurs, dont M. Chemutai Wilfred et ses amis, Yeko Swaib et Chelangat Anna. Ces agricultrices et ces agriculteurs ont non seulement appris l’importance qu’avaient les arbres pour la terre, mais on leur a également montré de nouvelles façons d’utiliser efficacement la terre pour cultiver des denrées destinées à la consommation familiale et pour la vente.

L’indicatif sonore est amplifié et baissé complètement

ANIMATEUR:
(SE DÉPLACE DU MICRO). Bonjour, monsieur, suis-je bien au domicile de M. Chemutai?

CHEMUTAI:
Si, si. Je suis Chemutai Wilfred. Soyez le bienvenu au village de Sanzara. Vous êtes chez vous.

ANIMATEUR:
Je suis heureux d’être ici, M. Chemutai. Mon nom est _____________. Je suis ici pour me renseigner sur l’importance qu’ont les arbres pour l’agriculture.

CHEMUTAI:
(APPELS) Ma chère épouse, pourrais-tu nous apporter une autre chaise, s’il te plaît? Notre visiteur est arrivé. (D’UNE VOIX NORMALE) Merci d’être venu, mais les autres ne sont pas encore arrivés. Yeko m’a dit que nous nous rencontrerions tous ici, alors il est allé les chercher.

ANIMATEUR:
Ce n’est pas grave. Pendant ce temps, je vais souffler un peu en attendant qu’ils arrivent. Comme il fait chaud ici! Il semble que la sécheresse soit à plus haut niveau actuellement.

CHEMUTAI:
Ma foi, il fait toujours chaud comme ça, en fait. Nous avons des sécheresses sévères, cher ami. Mais nous pensons que les choses vont changer dans quelques années.

ANIMATEUR:
Qu’est-ce qui vous fait croire ça?

CHEMUTAI:
L’UICN est en train de nous montrer que si nous plantons des arbres pour restaurer les forêts qui couvraient auparavant cette terre, il commencera à pleuvoir de plus en plus et cela réduira les sécheresses.

ANIMATEUR:
(CHOQUÉ) Il y avait des forêts ici avant?

CHEMUTAI:
Bien sûr! Dans ce village même! Dans ce sous-comté. Sur tout le district de Kapchorwa. Partout en fait!

ANIMATEUR:
Qu’est-il arrivé aux forêts?

CHEMUTAI:
Les gens les ont coupés pour avoir du bois de construction et faire du charbon de bois.

ANIMATEUR:
Quand cela s’est-il produit?

CHEMUTAI:
(FURIEUX) Au moment où nous avons perdu tout notre bétail! (S’ARRÊTANT UN INSTANT POUR SE REMETTRE DE SES ÉMOTIONS). Dans le passé, les gens de cette localité étaient gardiens de troupeaux. Nous vivions de cette activité. On cultivait à peine ici. Mais les vols répétés de bétail pendant plusieurs années nous ont dépouillés de tous nos animaux et ont fait que les gens n’avaient plus de quoi vivre. (PAUSE).

ANIMATEUR:
Je vous écoute.

CHEMUTAI:
Ils ne pouvaient cultiver aucune denrée, car ils ne savaient pas comment s’y prendre. Mais ils devaient continuer à vivre. C’est alors qu’en regardant tout autour d’eux, ils se sont rendu compte que le seul moyen de survie était de vendre du bois de construction et du charbon.

ANIMATEUR:
Donc, ils se sont mis à couper les arbres.

CHEMUTAI:
Exactement, c’est à ce moment qu’ils ont commencé à couper les arbres. Bien évidemment, certaines personnes avaient commencé à cultiver des denrées, et elles brûlaient les buissons pour défricher la terre. En un rien de temps, toute la plaine a complètement été dépouillée de sa végétation.

YEKO:
(SE RAPPROCHANT DU MICRO) Sommes-nous en retard, Chetumai?

CHEMUTAI:
Yeko, soyez les bienvenus. Merci d’avoir amené les autres. Voici notre visiteur qui est en train de nous enregistrer, afin que nous puissions entendre notre histoire à la radio.

YEKO:
Bonjour, monsieur. Je m’appelle Yeko Swaib. Soyez le bienvenu à Sanzara.

ANIMATEUR:
Je suis content d’être ici, M. Yeko. Est-ce le reste du groupe?

YEKO:
Si … Voici Chelangat Anna, et voici Yeko Sophie.

ANIMATEUR:
Bonjour Chelangat. Peut-être que vous en savez plus sur le passé que Chemutai. Racontez-moi cela … M. Chemutai me racontait qu’avant, les gens d’ici gardaient des troupeaux et que personne ne savait cultiver.

CHELANGAT:
Chemutai vous a dit la vérité. Nous vivions de lait et de viande dans le passé. On ne cultivait pas du tout. Mais lorsque nous avons perdu toutes nos vaches, nous n’avions pas le choix que de labourer la terre pour avoir de quoi manger.

ANIMATEUR:
Quelles denrées cultiviez-vous?

CHELANGAT:
Du manioc et du maïs.

ANIMATEUR:
Quoi d’autre?

CHELANGAT:
C’est tout.

ANIMATEUR:
Mais je vois des plantations de matoke là-bas, et plus loin encore.

CHELANGAT:
Toutes les plantations de matoke que vous voyez dans ce village n’ont pas plus de trois ans d’existence. (Note de la rédaction: “matoke” est le terme généralement utilisé en Ouganda et beaucoup de régions de l’Afrique de l’Est pour designer la banane plantain qui est cousin à la banane douce).

ANIMATEUR:
Vraiment? Pourquoi?

CHELANGAT:
Quand les représentants de l’UICN sont arrivés dans ce village, ils ont trouvé un sol dénudé, sur lequel il n’y avait aucun arbre ou aucune culture. Les sécheresses étaient en train de nous tuer. Les représentants nous ont dit que si nous plantions des arbres, et quelques cultures, nous pourrions sauver nos terres … et qu’il pleuvrait davantage.

ANIMATEUR:
Et c’est à ce moment que vous avez créé les plantations de matoke?

CHELANGAT:
Si, et plusieurs autres cultures, y compris du maïs, des patates douces, des tournesols, du haricot, etc. …des denrées que nous n’avions jamais cultivées. Toutefois, c’est surtout pour le matoke que nous leur sommes reconnaissants.

ANIMATEUR:
Pourquoi?

CHELANGAT:
Premièrement, ils réussissent vraiment bien sur notre sol et, deuxièmement, ils nous rapportent beaucoup d’argent. Alors, maintenant, nos enfants ont de quoi manger et nous avons de l’argent pour les envoyer à l’école.

ANIMATEUR:
Vous avez dit que le matoke vous rapportait beaucoup d’argent?

CHELANGAT:
Ouais. Beaucoup, beaucoup d’argent.

ANIMATEUR:
Par rapport à quels autres types de cultures, par exemple? Chelangat?

CHELANGAT:
Par rapport au maïs, par exemple. Le kilo de maïs se vend juste à 400 shillings [environ 15 cents américains]. Un sac entier de 100 kilos me rapporte 40000 shillings seulement. Et, ça après tout le dur labeur qu’exigent la plantation, le désherbage, la récolte, le séchage et le battage. Par contre, un régime de matoke peut se vendre à 30000 shillings, et ce, avec juste une petite partie de tout le travail qu’exige le maïs.

ANIMATEUR:
M. Yeko, avez-vous une plantation de matoke?

TOUS:
Chacun de nous ici a une plantation de matoke.

ANIMATEUR:
J’aimerais voir quelques plantations … Yeko, votre plantation est-elle loin d’ici?

YEKO:
Non, elle est située juste sur la colline, à côté de la falaise. Nous pourrions aller à pied si vous voulez.

ANIMATEUR:
J’aimerais bien.

EFFETS SONORES:
MUSIQUE DE TRANSITION

ANIMATEUR:
Nous gravissons la colline et nous nous dirigeons vers une falaise rocheuse. Yeko vit avec sa femme et ses enfants, juste au pied de la falaise. De l’endroit où je me tiens, on a l’impression de se trouver au sommet du village de Sanzara. Je peux voir en bas le reste du village de Sanzara qui s’étend vers la rivière Sipi dans la vallée. Au-delà de la vallée se trouve une grande plaine qui s’étale à perte de vue jusqu’au mont Moroto, à une centaine de kilomètres plus loin. La vue est assez époustouflante, à l’exception des nuages de fumée qui s’élèvent du sol, vous rappelant que les habitants de la plaine continuent de brûler les buissons en guise de technique agricole.

Juste derrière moi se trouve le domicile de Yeko, constitué de deux maisons toutes neuves, construites en bois, enduites de torchis et recouvertes de tôles métalliques. Sur un côté de la maison poussent diverses plantes, et sur l’autre côté on peut voir la plantation de matoke de Yeko.

YEKO:
Tout ça, de ma maison au pied de la falaise, c’est ma plantation. Je suis vraiment reconnaissant à l’UICN de nous avoir appris à cultiver et à gérer le matoke. C’est une bonne source de revenus, et pourtant il exige très peu d’efforts.

ANIMATEUR:
Qu’est-ce que vous voulez dire?

YEKO:
Je désherbe une fois par an seulement à cause du paillage. Lorsque j’étale l’herbe à éléphant séchée sur le sol de ma plantation, elle empêche l’herbe de pousser. Cela représente très peu de travail, mais durant la saison pluvieuse, je peux récolter 120 régimes sur une rangée, par mois et pendant quatre mois.

ANIMATEUR:
Ouah! C’est vraiment bien. Et quel montant gagnez-vous avec un régime de matoke?

YEKO:
Entre 20000 et 30000 shillings ougandais.

ANIMATEUR:
C’est beaucoup ça! Comment transportez-vous vos produits au marché?

YEKO:
Les acheteurs viennent ici avec un camion. Ils remplissent leur camion de matoke et ils remplissent mes mains d’argent.

ANIMATEUR:
Et combien gagniez-vous avant d’avoir la plantation de matoke?

YEKO:
Je ne gagnais rien.

ANIMATEUR:
Et pourtant, monsieur, vous êtes un homme riche maintenant!

YEKO:
(RIRES) Je ne suis pas riche pour le moment, mais je ne me débrouille pas mal du tout. J’ai construit ma nouvelle maison grâce à l’argent du matoke uniquement. De plus, cela ne fait qu’une année et demie que j’ai cette plantation.

ANIMATEUR:
Oups! J’ai failli tomber dans la tranchée! À quoi sert-elle?

YEKO:
C’est l’une des choses que nous avons apprises de la formation de l’UICN. Les tranchées servent à recueillir les eaux de pluie pour éviter qu’elles n’emportent la couche arable. Cette herbe d’éléphant que nous avons plantée sur le côté supérieur de la tranchée retient le sol plus haut. Lorsque l’herbe devient trop fanée, je la coupe et je l’utilise pour pailler la plantation de matoke. Mais je suis en train de penser à l’utiliser pour autre chose.

ANIMATEUR:
Qu’est-ce que c’est?

YEKO:
J’ai l’intention d’acheter une vache. Je pense que si j’ai une vache qui me donne du lait, en plus de toute cette nourriture, je vais pousser une bedaine. (RIRES).

ANIMATEUR:
RIRES

EFFETS SONORES:
MUSIQUE DE TRANSITION

ANIMATEUR:
Après avoir fait le tour de la plantation de Yeko, nous redescendons de la colline. En descendant, j’ai remarqué qu’il y avait plusieurs jeunes arbres partout. Je lui demande pourquoi il plante tous ces arbres.

YEKO:
Les arbres estompent les effets du vent. Sans ces arbres, les vents forts auraient envoyé mes plants de matoke au sol, de même que mes plants de manioc et toutes les autres cultures.

ANIMATEUR:
Est-ce une chose que vous avez apprise lors des formations de l’UICN?

YEKO:
Si. Mais ce n’est pas uniquement cela. Ils nous ont appris que lorsqu’on a des arbres tout autour du champ, ceux-ci retiennent bien le sol en place, de sorte à réduire l’érosion du sol. Et lorsque les arbres perdent leurs feuilles, celles-ci fertilisent la terre.

ANIMATEUR:
Mais quand les arbres poussent dans votre champ, est-ce qu’ils n’empêchent pas les cultures de bien pousser?

YEKO:
Traversons ce pont lorsque nous l’aurons atteint. (PAUSE) Ce que nous avons appris lors des formations de l’UICN c’est que nous devons planter des arbres pour pouvoir restaurer les forêts qui couvraient nos terres dans le passé, avant que tous les arbres soient abattus.

Vous savez, nous avons des sécheresses très sévères ici. Et quand il pleut, il y a beaucoup d’inondations. L’UICN nous a expliqué que ces phénomènes qui se produisaient chez nous étaient liés au fait que nous avions abattu tous les arbres. Alors, le fait de reboiser et de restaurer les forêts permettra de réduire les sécheresses et les inondations.

ANIMATEUR:
D’accord…, mais vous n’avez pas répondu à ma question M. Swaib. Est-ce que les arbres n’empêcheront pas les cultures de bien pousser lorsqu’ils deviennent mûrs?

YEKO:
Pas du tout. Comme vous pouvez le voir, les arbres sont surtout plantés à la limite des champs, de sorte que même lorsqu’ils pousseront, ils n’entraveront pas la croissance des cultures. Ceux qui commencent à entraver une bonne croissance des plants peuvent être coupés. De toute façon, les arbres constituent notre source de bois de chauffage et de rondins pour la construction.

Mais on nous a également dit de planter les bonnes espèces d’arbres au bon endroit. Alors, nous plantons des arbres qui sont bons pour les cultures qui sont dans nos champs. On les appelle «arbres pour l’agroforesterie». Nous plantons également d’autres types d’arbres tout au long des lignes de démarcation des exploitations agricoles, et le long des routes, des sentiers et d’autres zones.

ANIMATEUR:
Je comprends. Et combien d’arbres avez-vous plantés?

YEKO:
Environ 200 jusque-là. Et je continue à en planter.

ANIMATEUR:
Quelle est la superficie totale de votre terre?

YEKO:
Elle mesure trois acres.

ANIMATEUR:
Où prenez-vous les semis?

YEKO:
Je les prends à l’UICN.

ANIMATEUR:
Combien payez-vous pour les avoir?

YEKO:
Ils nous les offrent gratuitement. Ils donnent des semis à toute personne qui en fait la demande.

ANIMATEUR:
Vous voulez dire qu’il y a des gens qui ne veulent pas planter d’arbres?

YEKO:
En effet, plusieurs personnes pensaient qu’après avoir planté les arbres, des gens du gouvernement viendraient prendre leurs terres, à savoir qu’ils viendraient les chasser des forêts. C’est la raison pour laquelle plusieurs ont refusé de planter des arbres … ou faire tout ce que l’UICN nous apprenait à faire, à cause de cela.

ANIMATEUR:
Combien de personnes ont planté des arbres?

YEKO:
De nombreuses personnes. En vous tenant ici et en regardant tout autour du village, pouvez-vous voir toute cette verdure? Avant les formations de l’UICN, toute cette terre était de couleur brunâtre et elle était nue.

ANIMATEUR:
Alors, diriez-vous que les gens se rendent maintenant compte de l’importance des arbres?

YEKO:
Je pense bien. Toutefois, au début, plusieurs personnes plantaient des arbres afin d’avoir l’argent que l’UICN donnait.

ANIMATEUR:
À quoi servait cet argent?

YEKO:
Pour chaque arbre qu’on plantait et entretenait, l’UICN nous donnait 900 shillings. C’est en partie la raison qui motivait la plupart des gens à planter des arbres. Mais ce n’était pas mon cas par contre. J’avais déjà commencé à planter des arbres avant qu’ils n’introduisent l’idée des 900 shillings.

ANIMATEUR:
Mais vous avez reçu de l’argent, vous aussi?

YEKO:
Si, j’ai été récompensé comme tout le monde.

ANIMATEUR:
C’était Yeko Swaib qui nous expliquait comment le matoke avait amélioré ses finances, l’importance des arbres pour l’environnement et comment les agricultrices et les agriculteurs de son village essaient de restaurer les forêts qui avaient été déboisées.

De retour dans la ville de Mbale, dans les bureaux de l’UICN, je rencontre Christopher Lutakome. Il est l’assistant de terrain qui travaille avec les agricultrices et les agriculteurs du village de Sanzara depuis le démarrage du projet.

ANIMATEUR:
M. Chris, vous faites partie de l’équipe qui a travaillé avec des agricultrices et des agriculteurs de plusieurs villages dans la région du mont Elgon pour assurer que la forêt serait restaurée.

CHRIS
Lutakome:
C’est exact.

ANIMATEUR:
Dites-moi, à quoi ressemblaient ces villages avant que le projet ne commence à sensibiliser les populations par rapport au reboisement? J’aimerais en particulier que vous me parliez du village de Sanzara, qui se trouve en aval de la rivière Sipi.

CHRIS
Lutakome:
C’était terrible. C’était sec, il faisait chaud et il ventait beaucoup. Très peu de cultures réussissaient à pousser dans de telles conditions. On se demande vraiment comment les gens faisaient pour survivre! Et dire qu’il y a seulement deux décennies ou un peu plus, cet endroit était boisé.

ANIMATEUR:
On m’a dit que les arbres avaient été abattus pour faire du bois de construction et du charbon de bois.

CHRIS
Lutakome:
C’est exact. L’absence d’arbres a rendu la terre ingrate pour l’agriculture. Comme je l’ai dit, la terre était trop poussiéreuse, trop exposée aux vents, trop aride, et donc le peu de cultures que les gens tentaient de planter ne produisait jamais beaucoup.

ANIMATEUR:
Quels types de denrées les gens cultivaient-ils?

CHRIS
Lutakome:
C’était seulement du manioc et du maïs, et peut-être des tournesols. Quelque chose devait être fait dans les plus brefs délais, sinon on courait tout droit à la catastrophe! C’est à ce moment que l’UICN, par le biais du projet sur L’adaptation écosystémique, a décidé de s’embarquer dans un programme visant à restaurer le paysage forestier de la région.

ANIMATEUR:
Que s’est-il passé au départ?

CHRIS
Lutakome:
Nous avons sensibilisé les gens par rapport à ce qui se passait. Nous leur avons dit que la végétation qui avait disparu pouvait être restaurée, et qu’ils pourraient alors avoir de meilleures conditions de vie. Nous les avons encouragés à planter des arbres. L’idée a plu à certains, mais pas à tous.

ANIMATEUR:
Pourquoi certains n’ont pas aimé l’idée?

CHRIS
Lutakome:
Plusieurs pensaient qu’on essayait de les duper. Ils pensaient qu’en plantant des arbres sur leurs terres, ils créeraient des forêts et que le gouvernement les chasserait ensuite loin de ces forêts.

ANIMATEUR:
Un instant, M. Lutakome. D’où leur est venue une telle idée?

CHRIS
Lutakome:
Différents groupes de personnes ont envahi continuellement le parc du mont Elgon au cours des dix dernières décennies pour construire des maisons et utiliser les terres comme si cela leur appartenait. Cependant, le gouvernement a évincé ces gens. Pour une raison ou une autre, les gens de la région pensaient qu’ils seraient eux aussi évincés s’ils plantaient des arbres.

ANIMATEUR:
Dans ce cas, je peux comprendre pourquoi ils pourraient refuser de planter des arbres.

CHRIS
Lutakome:
Ce n’était pas facile. Mais, heureusement, un bon nombre de personnes ont réalisé que l’UICN essayait tout simplement de les aider, et elles étaient disposées à planter des arbres. Toutefois, elles ont rencontré des difficultés.

ANIMATEUR:
Quels types de difficultés?

CHRIS
Lutakome:
D’une part, elles ne disposaient pas de semis, et d’autre part, la terre était trop aride pour y faire pousser de jeunes arbres.

ANIMATEUR:
Que s’est-il passé alors?

CHRIS
Lutakome:
Nous leur avons offert des semis gratuitement et nous avons réglé le problème d’eau. Nous avons pompé l’eau de la rivière pour l’amener plus près de la communauté, afin que ceux qui voulaient planter des arbres puissent les arroser.

ANIMATEUR:
Ouah! Il faut être bien convaincu pour arroser deux cents arbres chaque jour. Comment êtes-vous arrivés à convaincre les gens d’entreprendre ce genre d’efforts pour restaurer leur environnement?

CHRIS
Lutakome:
Bien, nous avons mis de côté un fonds pour motiver les gens. Nous versions aux gens 900 shillings pour chaque arbre planté et entretenu jusqu’à ce que ce dernier puisse pousser par lui-même. Cela a encouragé de nombreuses personnes à planter des arbres et à les entretenir.

ANIMATEUR:
Avez-vous commencé à voir une différence dans le village de Sanzara maintenant, en raison des arbres qui ont été plantés?

CHRIS
Lutakome:
Une énorme différence. Le village est maintenant plus verdoyant que lorsque nous l’avions trouvé au début. Cela est lié en partie à la présence d’arbres partout, et en partie aux pratiques agricoles améliorées.

ANIMATEUR:
Vous avez formé les agricultrices et les agriculteurs sur les pratiques agricoles aussi?

CHRIS
Lutakome:
Oui. Traditionnellement, ces gens étaient des éleveurs. Ils ne connaissaient pas grand-chose à la culture de denrées. Et pourtant leurs terres avaient un énorme potentiel. Alors, nous les avons encouragés à cultiver toutes sortes de denrées qu’ils ne connaissaient pas, à l’instar du matoke. Nous leur avons donné une formation sur le paillage, l’irrigation, la gestion du sol, etc. Nous leur avons déconseillé de pratiquer le brûlis. Nous avons même organisé pour eux un voyage dans d’autres sous comtés du même district où les pratiques agricoles étaient mieux développées.

ANIMATEUR:
Cela a dû les encourager à changer de vie, ai-je raison?

CHRIS
Lutakome:
Oh oui. Et bien évidemment, nous avons récompensé les gens avec quelques shillings pour les activités telles que le paillage, l’irrigation, le creusage des tranchées, etc. Maintenant, il y a beaucoup de plantations de matoke dans un lieu où il n’y en avait aucun il y a deux ans. Il y a des champs de maïs, de pomme de terre irlandaise, de haricots et d’autres denrées dans un village où presque aucune culture n’était produite avant le projet.

Maintenant, des camions quittent le village pour amener les produits vers les grandes villes. Il y a cinq ans, c’était quasiment du jamais vu. Je crois que dans dix ans Sanzara sera carrément un village complètement différent. Je crois que les sécheresses diminueront à mesure que les arbres grandiront. Je suis convaincu que plus d’arbres seront plantés au fur et à mesure que les gens verront les changements qu’eux-mêmes ont provoqués.

ANIMATEUR:
C’était M. Chris Lutakome, un employé de l’UICN qui travaille avec les agricultrices et les agriculteurs dans le cadre de la campagne de restauration des forêts. Même s’il reste à voir si les forêts seront totalement restaurées, il se peut que dans quinze ans, quelqu’un soit choqué d’entendre, que quelques décennies plus tôt, il n’y avait aucun arbre à Sanzara. Juste comme j’ai été choqué lorsque j’ai entendu qu’il y avait une forêt à Sanzara avant. Si tout continue à bien se passer, cela peut réellement se produire, car il y a tant de jeunes arbres qui ont été plantés partout dans le village de Sanzara.

Aujourd’hui, nous avons entendu beaucoup de choses sur la façon dont la plantation d’arbres pouvait améliorer les revenus agricoles et réparer les dégâts causés à l’environnement.

N’oubliez pas d’écouter l’émission la semaine prochaine, et qui portera sur le thème ___. Je vous dis maintenant au revoir. C’était moi, ___.

Acknowledgements

Rédaction : Tony Mushoborozi, développeur de contenu, Scrypta Pro Ltd., Ouganda

Révision : Richard Muhumuza Gafabusa, chef de projet, Adaptation écosystémique, UICN

(Union internationale pour la Conservation de la Nature)

Information sources

Entrevues : agricultrices et agriculteurs Chemutai Wilfred, Chelangat Anna, et Yeko Swaib, et Chris Lutakome de l’UICN. Toutes les entrevues ont été réalisées le 4 février 2015

Radios Rurales Internationales aimerait remercier l’Union international pour la Conservation de la Nature d’avoir apporté son appui à la production de ce texte radiophonique.

Les initiatives visant à sensibiliser les populations par rapport à la restauration des paysages forestiers sont appuyées par le ministère du Développement international (UK Aid), par l’entremise du gouvernement du Royaume-Uni