Au nord du Ghana, les coopératives adoptent la formule ‘Trusted friend’ pour la micro-finance : Un moyen sûr de combattre la pauvreté et la faim

Agriculture

Notes au radiodiffuseur

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La ville de Kpandai, capitale du district de Kpandai, se situe dans le couloir nord-est du Ghana. Les terres qui entourent Kpandai, offrent un mélange de végétation forestière, de végétation sahélienne et de savane.

L’agriculture est la principale activité de la région, mais il y a aussi des activités commerciales comme le commerce de l’igname. Au nombre des plantes récoltées dans la région figurent l’igname, le manioc, le plantain, le maïs, la colocase (ou le taro), le riz, l’arachide et une gamme de fèves. La ville de Kpandai est connue pour sa variété d’igname à haut rendement appelée igname douce Laribako.

Kpandai était considérée comme un des paniers à provisions du Ghana. Mais la ville est en train de perdre rapidement sa gloire d’antan. Au fil des ans, elle a subi les conséquences des conflits ethniques ainsi que les effets nuisibles des changements climatiques. Tout cela a souvent contribué au faible rendement des cultures et aux pertes après la récolte.

En 1996, l’ONG SEND-Ghana a mis sur pied un programme de coopératives commerciales financé par l’Association des coopératives du Canada. Aujourd’hui, le programme s’est développé dans plus de 200 communautés de la région nord du Ghana. Quinze années de mobilisation et de sensibilisation de la collectivité ont permis de donner naissance à une coopérative très solide connue sous le nom de Kpandai Co-operative Credit Union (KCCU), qui offre maintenant des services de micro-finance.

Les services de micro-finance utilisent le concept Trusted friend en ce qui concerne l’épargne et les prêts. Dans le présent texte, la radiodiffuseure Lydia Ajono s’adresse à quelques-uns des groupes de coopératives Trusted friend. Elle explore la viabilité de leurs activités commerciales et montre de quelle manière ces groupes ont aidé leurs membres à nourrir leur famille et à payer les frais de scolarité de leurs enfants.

Le présent texte repose sur des entrevues réelles. Vous pourriez vous en inspirer pour faire des recherches et rédiger un texte sur un sujet semblable dans votre région. Ou encore vous pourriez choisir de produire ce texte dans votre station en utilisant des voix d’acteurs pour représenter les gens qui parlent. Si tel est le cas, veuillez vous assurer de prévenir votre auditoire, au début de l’émission, que les voix sont celles d’acteurs et non pas des personnes initialement impliquées dans les entrevues.

Texte

Lancement de l’indicatif musical, puis fondu enchaîné sous la voix de l’animatrice

Animatrice :
Bonjour et bonne journée à vous, chers auditeurs et auditrices, chers agriculteurs et agricultrices. C’est à nouveau le moment d’écouter votre émission habituelle,Vom Yella,sur Radio Style (Note de la rédaction :Vom Yellasignifie «Les questions de la vie» en français). Au micro votre animatrice Lydia Ajono. Aujourd’hui, nous poursuivons notre série sur les coopératives dans le district de Kpandai, situé dans la région septentrionale du Ghana. Nous allons nous pencher sur les groupes coopératifs commerciaux des régions rurales et nous verrons de quelle manière ils luttent contre la pauvreté et la faim. Cette émission sera axée sur les groupes de femmes et notamment sur la micro-finance.

Rosemary Sonlari est leader du groupe des coiffeuses de la coopérativeTrusted friend. Mama Dodoi est leader du groupe coopératif des boulangères et elle a également suivi une formation pour encourager et enseigner aux enfants la sensibilisation à l’égalité des genres, à la fois dans sa boulangerie et à son église. Elles vont nous faire partager leur vécu durant l’émission d’aujourd’hui. Veuillez rester à l’écoute.

Signal de musique traditionnelle pour deux minutes. Fondu.

Animatrice :
Me voilà de retour à l’antenne. Si vous venez tout juste de vous joindre à nous, vous êtes à l’écoute de l’émissionVom Yella. Madame Rosemary Sonlari et Mama Dodoi sont des leaders de groupes coopératifs commerciaux dans le district de Kpandai. Elles vont nous parler de leur réussite après 15 années d’expérience. Voici notre première invitée, Rosemary Sonlari, leader du groupe coopératif des coiffeuses. Je lui ai demandé le motif de la mise sur pied de cette coopérative.

Madame Rosemary Sonlari :
En 1996, j’ai fait partie des premières femmes qui ont assisté aux rencontres de sensibilisation à l’égalité des sexes offertes par SEND-Ghana, à Kpandai. Durant ces rencontres, nous avons soulevé des questions sur la propreté de l’environnement et la gestion du foyer. Parmi les sujets liés à la gestion du foyer, on nous a enseigné que les enfants (garçons et filles) devaient respecter les rôles de chacun dans la maison. À cette époque, il était grand temps que les femmes s’attaquent au problème de l’hygiène dans la ville de Kpandai. Les enfants étaient toujours victimes de paludisme, une maladie qui se développait dans les ordures de la ville. J’ai alors débattu amplement de cette question avec mes collègues coiffeuses. Nous avons décidé de former ce groupe pour commencer à enseigner les principes de l’hygiène environnementale.

Animatrice :
Pourquoi êtes-vous passée de l’éducation sanitaire à une coopérative commerciale?

Rosemary Sonlari :
En fait, nous n’avons pas changé. Le groupe poursuit dans la voie de l’éducation sanitaire. Mais ce qui est arrivé, c’est que l’ONG SEND-Ghana nous a initiées à la micro-finance. Nous avons adopté le micro-financement à bras ouverts étant donné qu’à cette époque-là la coiffure était juste un moyen de survivre.

Je ne savais pas comment gérer mes finances et je ne connaissais pas les bases de la comptabilité. Je ne savais pas faire la différence entre le capital et le profit. Je n’avais jamais essayé d’économiser une partie de mon salaire. J’ai réalisé que beaucoup de mes collègues se trouvaient dans la même situation. Par conséquent, nous avons créé le conceptTrusted friendpour permettre à notre groupe de coiffeuses d’être admissibles aux micro-prêts de SEND-Ghana.

Animatrice :
Comment fonctionne le conceptTrusted friend?

Rosemary Sonlari :
Le conceptTrusted friendpermet de constituer une équipe de cinq femmes qui reçoivent des prêts du plus grand groupe coopératif, le groupe coopératif commercial des femmes des régions rurales. Avoir une équipe de cinq femmes donne l’assurance que cette équipe pourra rembourser le prêt et même économiser de l’argent.

Animatrice :
Combien d’argent doit verser chaque membre de l’équipe avant d’être autorisée à contracter un prêt?

Rosemary Sonlari :
Nous avons commencé par demander des frais d’adhésion mensuels de cinq cedis ghanéens (Note de la rédaction : environ 3,30 $US). Le plan d’épargne et de crédit de la Kpandai Co-operative Credit Union permet à un groupe de bénéficier d’un prêt et de le rembourser dans un délai de 17 semaines. Tout en remboursant le prêt, les membres doivent faire des dépôts dans des comptes d’épargne individuels. Cela garantit que, une fois tous les remboursements effectués, les membres du groupe auront assez d’économies qui pourront servir de fonds de démarrage pour une autre entreprise ou pour un autre investissement. Lorsque le plan a débuté il y a 15 ans, les premiers prêts étaient de six cedis par personne. Aujourd’ hui, chaque membre peut obtenir jusqu’à 200 cedis (Note de la rédaction : environ 125 $US). Donc, s’il y a cinq personnes dans un groupeTrusted friend, le montant total des prêts pour le groupe s’élèvera à 1000 cédis ghanéens (Note de la rédaction : environ 625 $US).

Si une personne manque à ses obligations de remboursement d’un prêt, les membres du groupe doivent rembourser le prêt à même leurs propres épargnes. Il s’agit d’une grosse somme d’argent. Par conséquent, les petits groupesTrusted friendtravaillent dur pour se soutenir mutuellement et pour qu’il n’y ait pas de défaut de paiement de l’emprunt.

Animatrice :
Comment ce programme de micro-financement vous a-t-il aidée personnellement et a-t-il aidé votre famille?

Rosemary Sonlari :
En ce qui me concerne, le programme m’a permis d’acquérir des connaissances dans le domaine de la gestion d’une entreprise et m’a fait découvrir le travail en équipe. Au début, j’ignorais que travailler en petits groupes pour obtenir des prêts et faire des économies était une façon de procéder bien meilleure et bien plus facile que de travailler seule. Au sein du groupe, nous apprenons à développer des compétences en leadership. Et nous apprenons à maintenir la confiance que nous avons cultivée au fil des ans en tant que membres, non seulement au sein du groupe coopératif mais aussi dans nos salons de coiffure.

En ce qui concerne mon entreprise, je suis passée de 2 à 10 apprenties. Je peux à présent acheter plus de produits capillaires chez des distributeurs différents et les payer sans compter sur le crédit, comme j’avais l’habitude de le faire.

Animatrice :
Et pour ce qui est de votre famille? Quels avantages en tire-t-elle?
Rosemary Sonlari :
J’achète maintenant de beaux vêtements pour ma famille, surtout pour mes deux filles et bien sûr pour mon mari. Je contribue au paiement des frais de scolarité de mes enfants et je leur cuisine d’excellents plats. Tout cela parce que, depuis que je me suis jointe au groupe coopératif, mon entreprise me rapporte plus d’argent qu’avant. En outre, grâce à la formation que j’ai reçue sur la micro-finance, via SEND-Ghana, j’ai acquis des connaissances en matière d’égalité des sexes et je m’efforce de les mettre en pratique à la maison. Par exemple, mes beaux-parents ont eu du mal à accepter l’idée que mon mari m’aide à cuisiner pour les enfants ou que les garçons cuisinent et balayent. Mais, aujourd’hui, ils en sont venus à bénéficier – dans les faits – des compétences en matière d’égalité des sexes que mon mari a acquises durant les cours sur la parité hommes-femmes.

Animatrice :
Vous avez peut-être rencontré quelques défis tout au long de ce parcours. Pouvez-vous nous en citer quelques-uns?

Rosemary Sonlari :
Oui, un des principaux défis a été d’amener les hommes à participer à certaines des activités d’hygiène communautaire. Un autre est le coût des produits capillaires qui ne cesse d’augmenter et il devient difficile de continuer à faire du profit.

Animatrice :
Merci beaucoup. À présent, donnons la parole à Mama Dodoi.

Mama Dodoi est une boulangère de 49 ans, mère de trois enfants. Elle dit qu’elle a appris à faire le pain il y a plusieurs années, quand elle travaillait comme ouvrière pour un des plus gros boulangers de la ville. Je lui ai demandé pourquoi elle avait quitté son emploi pour se joindre à la coopérative commerciale des femmes rurales de Kpandai.

Mama Dodoi :
En fait, je fais partie des femmes qui ont créé le groupe. J’ai cessé d’être ouvrière et je me suis mise à mon compte. J’ai commencé à faire de petits pains ronds pour les écoles et pour les gens très pauvres qui ne pouvaient pas s’offrir de grosses miches de pain.

Animatrice :
Quelle est la capacité de votre boulangerie?

Mama Dodoi :
Actuellement, j’utilise environ 5 à 10 gros sacs de farine par semaine, ce qui représente à peu près 8 kilos de farine. Mes enfants, notamment mon fils, m’aident à faire le pain et à le distribuer. Je n’embauche personne d’autre pour faire le travail. Outre la vente au grand public, j’ai aussi des commandes spéciales.

Animatrice :
Quelles améliorations vous a apportées – à vous personnellement – le groupe coopératif?

Mama Dodoi :
Oh, si je devais énumérer tous les avantages que le groupe m’a apportés, une journée ne suffirait pas. Mais je vais simplement vous donner deux exemples des améliorations que le groupe coopératif a pu m’apporter. Tout d’abord, pour l’éducation de mes enfants. J’ai pu envoyer tous mes enfants à l’école. Ils ont terminé leurs niveaux de scolarité de base et poursuivent leurs études supérieures en ville. Ensuite, grâce aux activités de formation du groupe, j’ai appris à initier d’autres femmes à la gestion du foyer. C’est pourquoi je sers dans mon église au sein du groupe de la fraternité des femmes. L’éducation en matière d’égalité des sexes, dispensée par le groupe coopératif, m’a également aidée à former mon fils et d’autres enfants de sexe masculin de ma parenté. Et, aujourd’hui, ces enfants apprécient les rôles attribués à chacun des sexes.

Animatrice :
Quelles sont les choses qui ne fonctionnent pas bien au sein du groupe et que vous aimeriez changer?

Mama Dodoi :
Pour moi, tout va bien. Vous savez, les changements prennent du temps. Les gens veulent voir les autres tenter des choses et les réussir avant d’agir eux-mêmes. Mais j’aimerais que les leaders du groupe et SEND-Ghana parrainent des enfants dans le besoin pour qu’ils puissent faire des études supérieures. On verrait ainsi plus de jeunes de Kpandai fréquenter l’université ou les instituts polytechniques.

Animatrice :
Merci. Le modèleTrusted friend, utilisé par la coopérative commerciale des femmes rurales de Kpandai de la Kpandai Cooperative Credit Union, prend de plus en plus d’importance. Les groupes coopératifs sont impliqués dans plusieurs sortes d’activités rurales rentables qui vont de la transformation des aliments, comme l’extraction du beurre de karité, à l’artisanat. De plus, le partage continu des connaissances sur l’égalité des sexes a permis aux femmes de s’affirmer et de faire participer davantage leurs collectivités au processus décisionnel clé, tel que donner des chances égales aux garçons et aux filles.

Le pouvoir des coopératives ne doit pas être surestimé au sein des associations de la Kpandai Cooperative Credit Union. Les habitants de cette petite ville en pleine croissance auront une bonne et mémorable histoire à raconter à la prochaine génération. Soyez des nôtres à la même heure la semaine prochaine pour un autre épisode passionnant de l’émissionVom Yella. D’ ici là, au revoir.

Montée de l’indicatif musical pendant 10 secondes pour clore l’émission

Acknowledgements

Rédaction : Lydia Ajono, radiodiffuseure communautaire et bénévole au réseau de radios communautaires du Ghana (GCRN).
Révision : John Juliandirecteur, communications et politiques internationales, Association des coopératives du Canada; et Andrea Vandette, analyste/assistante de programmes dans la section du Développement international de l’Association des coopératives du Canada et, de novembre 2010 à avril 2011, agente des programmes sur le genre auprès de SEND-Ghana, en poste à Salaga.
Traduction : Jean-Luc Malherbe, Société Ardenn, Ottawa, Canada.

Information sources

Entrevues :
Rosemary Sonlari, leader du groupe de coopératives commerciales des femmes rurales de Kpandai, Kpandai, région du nord, Ghana.
Mama Dodoi, membre fondatrice du groupe de coopératives commerciales des femmes rurales de Kpandai, Kpandai, région du nord, Ghana.
M. Raymond Avatim, programme SEND-Ghana, gestionnaire responsable du district de Gonja Est, nord du Ghana.
Toute l’équipe du personnel et de la direction de SEND-Ghana, région du nord, Ghana.
Entrevues effectuées le 18 avril 2011

Pour de plus amples informations :
Site Web de SEND-Ghana :  http://www.sendwestafrica.org/west/index.php?option=com_content&view=section&id=7&Itemid=64
Site Web de l’Association des coopératives du Canada : http://www.coopscanada.coop/
Rapports sur le genre d’Eldis : http://www.eldis.org/go/topics/resource-guides/gender.