Les pratiques de gestion du bétail pour s’adapter aux changements climatiques

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Notes au radiodiffuseur

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Le bétail joue un rôle important quand il s’agit de relish pour nos familles (Note de la rédaction : « relish » est la partie du repas qui accompagne l’aliment de base. Par exemple, dans un repas de riz et de poulet, le poulet est le relish; dans un repas de croustilles avec du bœuf et des légumes, le bœuf et les légumes sont le relish.). Le bétail joue également un rôle primordial comme source de revenu et, dans certaines cultures, les gens en sont tributaires comme moyen de paiement de la dot.

Avec les changements climatiques qui affectent la productivité et la santé du bétail, notamment la production de lait et d’autres produits animaux, nous pourrions en souffrir à long terme. Nous estimons qu’il est grand temps de tirer la sonnette d’alarme, afin que chaque agriculteur se réveille et sache personnellement que le climat est en train de changer. À mesure que les changements climatiques affectent nos récoltes, ils affectent aussi le bétail. Le message du texte est le suivant : avec les effets défavorables des changements climatiques, le mieux pour un agriculteur serait de garder moins d’animaux afin de pouvoir mieux les gérer. En outre, il devrait établir des pâturages, planter de l’herbe et des cultures tolérantes à la sécheresse pour nourrir le bétail et construire une digue comme source fiable d’eau, au lieu de parcourir de longues distances à pied avec le bétail.

Les agriculteurs, les agents de vulgarisation et tout le secteur agricole peuvent parfois être silencieux à propos des changements climatiques. La production de bétail et les produits animaux peuvent être en baisse mais, avec ce texte, différents intervenants agricoles seront appuyés et commenceront à penser à s’adapter aux changements climatiques. Certains pourraient même créer d’autres stratégies pour faire face aux changements climatiques.

Texte

ANIMATEUR :
Bonjour tout le monde et bienvenue. Je m’appelle Andrew Mahiyu. Aujourd’hui, nous allons parler d’un nouveau sujet préoccupant – les changements climatiques et les méthodes de gestion du bétail.

Tous les jours, le soleil se lève et se couche. Nous faisons notre travail quotidien et nous pensons que la vie est et restera éternellement la même. Mais avons-nous jamais pensé à la façon dont nos cultures, nos ressources naturelles et notre bétail se comportent de nos jours, si nous les comparons à leurs comportements d’il y a 20 ans? Qu’en est-il du profil des précipitations, des sols, des plantes couvre-sol et des sources d’eau? Ont-ils changé? Si vous y pensez bien et si vous vous en rappelez convenablement, vous remarquerez que le climat a changé graduellement. Que faites-vous pour vous adapter à ces changements? Il est temps d’y réfléchir de plus près. Durant l’émission d’aujourd’hui, nous allons parler des pratiques de gestion du bétail pour aider les agriculteurs à s’adapter aux changements climatiques. Restez en ma compagnie.

Bruits de pluie

ANIMATEUR :
Il y a 15 ou 20 ans, nous pouvions espérer les premières pluies pour la période des semis à des dates précises d’un mois en particulier. Nous avions des forêts denses avec de gros arbres dans la plupart des régions de notre continent. Nous avions des cours d’eau qui ne tarissaient pas d’une année à l’autre et de vastes parcours naturels pour notre bétail. Les gens avaient de gros troupeaux de bovins. Nous pouvions à peine nous rappeler du nombre de têtes que nous possédions. Les agriculteurs pouvaient peut-être se souvenir de la couleur de leur peau. Les gens aimaient boire du lait de leurs vaches à toute heure du jour. Les gardiens du bétail n’avaient pas besoin d’aller loin pour faire paître leur troupeau ou pour atteindre des sources d’eau.

Si nous sortons de nos maisons aujourd’hui, que voyons-nous? Des terres dénudées avec des rigoles, des collines dénudées et des cours d’eau taris. Nous avons coupé tous les arbres avec nos haches impitoyables pour avoir du charbon de bois, du bois d’œuvre, du bois de chauffage et à d’autres fins. En outre, à cause de la surpopulation, il y a peu, voire pas de terres non cultivées. Il y a peu de terres pour faire paître nos bovins. Nous parcourons de longues distances avec notre bétail pour trouver de l’herbe et de l’eau.

Bruits de bovins et de chèvres

ANIMATEUR :
Le bétail joue un rôle important quand il s’agit de fournir des protéines à notre corps. Si les membres de la famille pouvaient choisir le genre de « relish » qu’ils veulent, un fort pourcentage opterait pour la viande. Mais, ces jours-ci, le modèle des précipitations a changé dans la plupart des régions de notre continent. Nous entendons parler de sécheresses et d’inondations. En autant que ces changements affectent nos cultures, ils affectent aussi le bétail de différentes façons. Alors, avant que le pire n’arrive, partageons les méthodes intelligentes que nous pouvons utiliser pour faire face aux changements climatiques.

J’ai rendu visite à un petit exploitant agricole, M. Themba Phiri, qui est originaire du district de Mzimba au Malawi où il y avait, dans le passé, une forte population de bétail. J’ai trouvé M. Phiri en train de nourrir une génisse.

Bruits d’un agriculteur hachant de l’herbe

THEMBA PHIRI :
Le climat changeant a affecté le bétail de plusieurs façons. Comme les pâturages poussent moins bien, il y a de la moins bonne nourriture. La sécheresse a également provoqué une pénurie d’eau potable sécuritaire pour les animaux. En conséquence, nous ne produisons pas d’animaux en bonne santé et ils ne fournissent pas du lait sain pour élever les jeunes.

ANIMATEUR :
Lorsque vous voulez faire paître vos bovins de nos jours, vous devez aller loin. Était-ce la même chose il y a 20 ans?

THEMBA PHIRI :
Les changements climatiques et la forte croissance démographique ont affecté les pâturages. La population dense a provoqué une demande élevée pour les terres. Si vous avez des animaux, vous devez les emmener loin pour paître. Si vous voulez qu’ils boivent de l’eau, vous devez également les emmener loin. Plus les animaux voyagent loin, plus ils consomment d’énergie. Cela signifie que ce qu’ils mangent sert pour se déplacer vers les pâturages ou les sources d’eau.

ANIMATEUR :
Et pas pour la croissance corporelle?

THEMBA PHIRI :
Ni pour la croissance corporelle, ni pour la production de lait. Plus la vache voyage loin, moins elle produit de lait parce qu’elle utilise la majeure partie de sa nourriture pour se déplacer.

ANIMATEUR :
L’eau joue-t-elle un grand rôle dans la production du lait?

THEMBA PHIRI :
Oui bien sûr. C’est la raison pour laquelle une génisse doit boire beaucoup d’eau quand elle a un veau.

ANIMATEUR :
M. Themba Phiri, vous venez d’une région qui a beaucoup de bétail. Pouvez-vous nous donner une idée du nombre de bovins que possédait un agriculteur typique il y a 20 ans et combien il en possède en moyenne aujourd’hui?

THEMBA PHIRI :
Le nombre de bovins a diminué. Dans le passé, un agriculteur typique à Mzimba pouvait avoir trente ou quarante ou même une centaine de têtes de bovins. On ne voit plus cela aujourd’hui. Ils ont tous été vendus ou abattus. À l’heure actuelle, nous voyons en moyenne une dizaine de têtes de bétail. Certaines personnes qui possédaient du bétail auparavant n’en ont plus maintenant. Elles ont vendu leurs animaux à cause de la rareté des terres, du manque de pâturages et de l’éloignement des sources d’eau. Andrew, vous savez que, de nos jours, les jardins cultivés commencent sur le pas de la porte. Vous pouvez imaginer que si vous avez du bétail, il commencera à se nourrir dans votre jardin, ou dans celui de votre voisin. Quel sera le résultat final, à votre avis? Des disputes. Pour éviter cela, les gens vendent une partie ou la totalité de leur bétail.

ANIMATEUR :
Pensez-vous que les changements climatiques ont également affecté la volaille?

THEMBA PHIRI :
Oui, au Malawi nous préférons les volailles de parcours libre, c’est-à-dire lorsque les poulets sortent pour becqueter et se nourrir. De nos jours, comme l’abattage impitoyable des arbres a laissé le sol à nu, il y a moins d’ombre pour eux – il fait trop chaud. Ainsi, la plupart des œufs de poule tournent mal à cause de l’exposition au soleil et à la chaleur. Même si la poule les couve, ils n’éclosent pas. En outre, les poulets mangent de l’herbe verte fraîche, mais elle est souvent très rare. Face à cette pénurie, les poules se sont automatiquement ajustées pour pondre moins d’œufs. Il en éclot moins et le taux de survie des poussins est faible. Et, comme il n’y a pas de couvert, les prédateurs, tels les grands oiseaux de proie, se nourrissent de jeunes poussins. Il en résulte donc une grosse perte de poussins chez les agriculteurs.

ANIMATEUR :
Les porcs, les chèvres et d’autres sortes d’animaux ont-ils également été touchés?

THEMBA PHIRI :
Oui, ils ont également été touchés.

ANIMATEUR :
Mais la chèvre est un animal brouteur, un animal de parcours libre.

THEMBA PHIRI :
En tant que brouteuse, la chèvre a le choix de sa nourriture. Mais même la vache a la choix de sa nourriture – elle veut manger quelque chose d’appétissant. Il est insolite de nos jours de trouver des bovins en train de manger des mangues et même des avocats. Elles n’en mangeaient pas dans le temps.

ANIMATEUR :
À votre avis, quelles peuvent être, pour l’agriculteur, les stratégies d’adaptation aux changements climatiques?

THEMBA PHIRI :
Je dirais qu’il faut garder moins de bêtes de chaque sorte – qu’il s’agisse de bovins, de poulets, de chèvres ou de porcs. Il vaut mieux n’en garder que quelques-unes, que l’on peut bien gérer, et s’assurer d’avoir une bonne qualité. À long terme, nous devrions rétablir la végétation naturelle en plantant davantage d’arbres.

ANIMATEUR :
Que peut faire le gouvernement?

THEMBA PHIRI :
Le gouvernement devrait construire des barrages et semer de l’herbe verte autour des barrages. L’eau serait ensuite facilement disponible pour l’irrigation hivernale et serait buvable pour les animaux. On devrait également apprendre aux agriculteurs à bâtir des digues et leur apprendre des méthodes de collecte de l’eau afin qu’ils en aient durant toute l’année. En outre, le gouvernement devrait informer les agriculteurs sur la façon de rétablir le couvert végétal. Il est dommage que le gouvernement ait moins de conseillers agricoles ou d’autres experts agricoles sur le terrain.

ANIMATEUR :
Merci, M. Phiri. (Pause) M. Henry Chikanga Nkhoma est un agriculteur qui élève des poulets et des bovins. Il admet que les changements climatiques ont vraiment affecté le bétail.

HENRY :
Oui, les changements climatiques ont affecté le bétail. Nous avions l’habitude d’avoir de grands bœufs solides pour tirer une charrette, pour labourer nos champs. Aujourd’hui, nous n’avons plus de gros animaux de ce genre. Si vous regardez dans le village, vous ne verrez que des petits animaux tirer des charrettes, en raison du manque de nourriture appropriée. Et parfois nos animaux passent même la nuit sans boire.

À mon avis, ce qu’il faut faire c’est organiser des rencontres, s’asseoir et partager ces problèmes et regarder l’avenir devant nous. Si nous agissons séparément, nous ne verrons aucune amélioration. De même, tout le monde devrait planter suffisamment d’herbe tolérante à la sécheresse pour ses animaux. Le personnel vétérinaire peut nous aider à apprendre comment fabriquer des aliments locaux qui fournissent les nutriments nécessaires à notre bétail. Nous devrions garder uniquement le bétail que nous pouvons réussir à nourrir.

ANIMATEUR :
C’était Henry Chikanga Nkhoma, un agriculteur local. Il admet que nous n’avons pas assez parlé publiquement des changements climatiques et que nous devons faire quelque chose pour sauver notre bétail.

Pause musicale

ANIMATEUR :
Chers auditeurs et auditrices, nous avons entendu les commentaires d’agriculteurs sur la façon dont les changements climatiques ont affecté le bétail et quelles stratégies peuvent être mises en œuvre, à leur avis, pour s’y adapter. Quels sont vos points de vue à ce sujet? C’est la bataille de tous et chacun. Si nous commençons à agir aujourd’hui, même nos enfants imiteront ce que nous faisons. Le gouvernement du Malawi n’est pas complètement silencieux à propos des changements climatiques; il prétend faire quelque chose.

Wilfred Lipita est le directeur du Département de la santé et des productions animales (DSPA) au ministère de l’Agriculture et de la Sécurité alimentaire.

WILFRED :
Nous ne sommes pas muets à propos des changements climatiques. Nous savons qu’il y a parfois trop de pluies, ce qui provoque des inondations, et que les inondations ont des répercussions négatives sur la croissance des pâturages et la santé des animaux. Des pluies trop peu abondantes affectent également la croissance des pâturages. Parfois, des maladies et des parasites peuvent arriver à cause des changements climatiques. La direction et la vitesse des vents peuvent affecter le déplacement des parasites d’un endroit à un autre, ce qui peut entraîner la propagation de maladies. Les tiques peuvent survivre dans certaines conditions et ne pas survivre dans d’autres. Ceci peut avoir un effet sur notre bétail.

Ce que je pense c’est que les agriculteurs devraient minimiser la dégradation de l’environnement en évitant de couper des arbres. L’abattage des arbres peut provoquer des inondations et des sécheresses. Certaines espèces de graminées peuvent également mourir et nous n’aurons donc peut-être pas de fourrage. Ou bien nous pouvons avoir du fourrage qui n’est peut-être pas aussi nutritif que d’habitude.

Les agriculteurs devraient également savoir qu’il est grand temps de ne plus se fier uniquement sur les herbages naturels pour nourrir leurs animaux. Ils devraient au moins semer du millet pourpre (Pennisetum purpureum) ou de l’herbe de Rhodes (Chloris gayana) comme ils le font avec leurs cultures, mais comme aliments du bétail. Les agriculteurs ayant du bétail devraient commencer à pratiquer l’engraissement en stabulation entravée ou la gestion intensive du bétail.

ANIMATEUR :
Certains petits exploitants agricoles disent qu’il vaudrait mieux garder moins d’animaux, juste assez pour être en mesure de les gérer. Quels sont vos commentaires à ce sujet?

WILFRED :
Nous pouvons dire que les agriculteurs devraient réduire au minimum le nombre de têtes, mais ils n’arriveront à rien s’ils ne savent pas comment les gérer. Si un agriculteur pratique une gestion intensive de son bétail et le nourrit bien, et si ce dernier ne provoque pas de dégradation de l’environnement, alors les effectifs n’ont aucune importance. Vous pouvez avoir autant d’animaux que possible si vous avez suffisamment d’espace pour les garder. Mais, encore une fois, c’est la gestion des animaux et de l’environnement qui est très importante.

ANIMATEUR :
Qu’en est-il des sources d’eau? Nous pouvons constater que la plupart de nos cours d’eau ne retiennent pas d’eau durant toute l’année.

Wilfred :
Je suis d’accord avec vous – nous n’avons pas de cours d’eau qui coulent toute l’année, comme c’était le cas dans le passé, à cause de l’érosion des sols, de l’abattage des arbres et des méthodes culturales sur les rives des cours d’eau, pour ne mentionner que quelques causes. Nous devons forer des puits ou construire des barrages pour que notre bétail puisse avoir accès à de l’eau.

Pour y parvenir, le personnel vétérinaire doit jouer un grand rôle en vue de former des agriculteurs sur les stratégies que j’ai mentionnées. Mais si les experts restent muets sur le terrain, il ne faudrait pas s’attendre à ce que nos animaux agissent en notre nom. Ils demeureront également muets et mourront de faim et de soif.

ANIMATEUR :
Pouvons-nous conclure en disant que c’est ce que votre Département conseille actuellement aux agriculteurs sur le terrain?

WILFRED :
Nous envisageons de mettre en œuvre certaines de ces stratégies tandis que d’autres restent à présenter aux agriculteurs. Mais j’admets que nous sommes en retard si nous comparons nos mesures à l’évolution du climat. Nous devons passer la vitesse supérieure et agir plus rapidement.

ANIMATEUR :
C’était Wilfred Lipita, du Département de la santé et des productions animales, qui faisait des commentaires sur les stratégies que le gouvernement envisage de mettre en œuvre pour faire face aux changements climatiques.

Oui, c’est vrai, nous devons agir plus rapidement pour sauver le bétail que nous possédons et les espèces de graminées qui sont encore disponibles aujourd’hui. Je crois que, d’après ce que vous avez entendu, vous avez appris quelque chose qui continuera de vous inciter à passer à l’action dans votre esprit. Cette incitation produira des fruits si vous agissez rapidement. Ne perdons pas notre bétail. Au revoir.

Acknowledgements

Rédaction : Andrew William Mahiyu, National Smallholder Farmers Association of Malawi (NASFAM), B.P. 30716, Lilongwe 3, Malawi.

Révision : John Ajigo, chargé de programme, Nigerian Environmental Study/Action Team (NEST), Ibadan, Nigeria.

Information sources

  • Merci aux : agriculteurs du district de Mzimba – M. Themba Phiri, et M. Henry Chikanga Nkhoma.
  • À M. Wilfred Lipita, directeur du Département de la santé et des productions animales du ministère de l’Agriculture et de la Sécurité alimentaire, B.P. 2096, Lilongwe, Malawi.
  • À M. Duncan Warren, directeur des services agricoles de la NASFAM.