Le sombre destin des ouvriers agricoles dans la province de Cap Occidental en Afrique du Sud

Questions sociales

Notes au radiodiffuseur

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L’Afrique du Sud est connue dans le monde comme un pays doté d’une Constitution très progressiste, surtout en ce qui concerne les droits de la personne. Cependant, tous les citoyens ne jouissent pas également de ces droits car la majorité blanche contrôle encore largement l’économie sud-africaine. À cause de ce pouvoir économique, les noirs, incluant ceux qui travaillent comme ouvriers agricoles, sont souvent à la merci de leurs employeurs blancs. De la Constitution émanent diverses lois destinées à réglementer la relation entre les employeurs et les ouvriers agricoles. Mais, avec un ministère du Travail manquant de personnel, de concert avec des inspecteurs qui sont «corruptibles», ces lois progressistes n’ont aucune signification pour les personnes qui en le plus besoin, c’est à dire nos ouvriers agricoles. Après des recherches approfondies, le ministère du Travail a adopté une législation qui s’efforce de protéger les droits des ouvriers agricoles en stipulant les conditions humaines minimales en vertu desquelles ils doivent travailler et vivre. Cependant, les propriétaires agricoles, qui se sont enrichis grâce à la sueur des ouvriers agricoles, ignorent ouvertement et avec arrogance la lettre et l’esprit de cette loi. La taille de votre compte bancaire semble avoir un effet direct sur les droits dont vous pouvez jouir.

Le présent texte offre une narration directe de ce qui se passe vraiment dans les fermes dans la province de Cap Occidental en Afrique du Sud. Étant donné que les agriculteurs forment une collectivité très unie, les conditions peuvent être semblables dans toute l’Afrique du Sud.

Dans de nombreux pays, les ouvriers agricoles se voient refuser des droits. À titre de radiodiffuseur, vous pouvez contribuer à publiciser cette situation et à raconter des histoires qui illustrent comment on peut aborder les abus concernant les droits de la personne. À la fin du texte, se trouve une liste de plusieurs organismes sud africains qui se penchent sur ces questions. Il pourrait bien y avoir des organismes – nationaux, régionaux ou locaux – qui font la même chose dans vos régions. Une possibilité consiste à rédiger un texte sur la situation dans votre région, en interviewant des ouvriers agricoles ainsi que des représentants de ces organismes de la société civile.

Texte

Animateur :
Bonjour et bienvenue à notre émission. Aujourd’hui, nous allons nous concentrer sur les droits des ouvriers agricoles. Dans certains pays, les ouvriers agricoles sont protégés par la loi; dans d’autres, ce n’est pas le cas. Mais partout, on entend des histoires d’ouvriers agricoles qui sont maltraités et privés de leurs droits humains. Aujourd’hui, nous allons entendre les témoignages de trois ouvriers agricoles sud africains.

Felicity Louise :
Je m’appelle Felicity Louise. J’ai vécu pendant 25 ans avec ma famille dans une ferme dans la province de Cap Occidental. Il y a deux ans, mon père a reçu un préavis de licenciement de Zirk du Toit, propriétaire de la ferme Klipdrift. Il avait travaillé durant toute la journée et, à quatre heures de l’après midi, le propriétaire de la ferme l’a accusé d’être en état d’ébriété et l’a renvoyé à la maison. Nous savions tous que mon père n’était pas en état d’ébriété. Mais il est rentré à la maison. L’agriculteur lui avait écrit de nombreuses lettres d’avertissement dans le passé et, sur cette base, il l’a renvoyé de la ferme, en prétendant toujours qu’il était ivre. Nous savons que notre père n’était pas en état d’ébriété parce qu’il avait conduit le tracteur toute la journée. Mon père a été amené en audience disciplinaire devant une commission qui arbitre les différends entre les employeurs et les employés. Suite à la décision du tribunal, mon père s’est vu promettre une somme de 1 020 rands (utiliser la devise locale – il faut environ 7 rands sud africains pour un dollar américain, s’il quittait la maison. Mais étant donné que mon père était très âgé, aucun autre propriétaire agricole blanc ne voulait nous prendre. Ils ont rejeté mon père à cause de son âge. Nous sommes restés deux années de plus sur la ferme des du Toit. Brusquement, le 25 juillet 2006, nous avons reçu une décision du tribunal qui nous avertissait que nous devions partir. Mais nous n’avions aucun endroit où aller. Deux semaines plus tard, des gens sont venus et ont jeté nos meubles dehors, sans les emballer. Ils se sont contentés de les jeter dans la caisse d’une camionnette. Nous ne pouvions pas les arrêter parce que l’agriculteur voulait sa maison. Ce fut une histoire très triste pour nous. Ma mère était assise là, en pleurs, car elle est estropiée. Durant tout le temps que nous sommes restés là bas, l’agriculteur nous traitait très mal. Nous devions agir comme des esclaves, obéir à chaque souhait ou caprice des du Toit. Je crois que la véritable raison pour laquelle du Toit a chassé mon père c’est parce qu’il savait qu’il en était à ses dernières années et ne serait plus en mesure d’être très longtemps un esclave.

Animateur :
Ensuite, nous allons entendre le témoignage de Sara Beukes.

Sara Beukes :
Je m’appelle Sara Beukes. Mon père a travaillé pendant de nombreuses années dans la ferme de Piere Vd Merwe. Ma mère y est morte en l995. Mon père est tombé malade à la ferme. L’agriculteur a rénové les maisons de ferme et les a transformées en pensions de famille, et il a relégué mon père dans le fonds d’une grange. Je suis séropositive mais encore vivante. Je suis une femme qui a survécu à trois maris. L’un d’entre eux vivait à la ferme de Piere Vd Merwe. La raison pour laquelle j’ai eu trois maris provient du fait que, après avoir survécu à cet homme, j’ai dû en prendre un autre pour que mes enfants et moi même aient un toit. À l’heure actuelle, Piere Vd Merwe m’a trainée devant les tribunaux pour obtenir un mandat d’expulsion. Mon dernier mari, Tello Diyamani, est mort à l’hôpital mais je n’ai rien reçu de ses économies. Sa famille est venue et a tout pris. Elle ne m’a rien laissé. Mes enfants et moi même avons dû coucher sur des sols en ciment. Nous vivons actuellement dans les toilettes sur un terrain de sports à Rawsonville, près de Worcester, en Afrique du Sud.

Animateur :
La dernière personne dont nous allons entendre le témoignage aujourd’hui est Nosey Pieterse, président de la Black Association for the Wine and Spirits lndustry.

Nosey Pieterse :
Depuis l960, nous célébrons chaque année la journée de Sharpeville pendant la lutte contre l’apartheid. Après 1994, nous l’avons appelée la Journée des droits de la personne. Nous avons également un Déclaration des droits dans notre Constitution. Mais il est très clair que les ouvriers agricoles sont exclus lorsqu’il s’agit des droits de la personne. Les ouvriers agricoles n’ont aucune raison de célébrer. Nous n’avons aucune raison de célébrer la Journée des droits de la personne parce que nos droits humains sont violés. Lorsque, cette journée là, le shérif du tribunal a expulsé des ouvriers agricoles, nos camarades les ont accueillis chez eux. Récemment, environ 24 familles ont perdu leur emploi et nous savons qu’elles reçoivent également des mandats d’expulsion, si bien que nos gens sont chassés! Que fait notre gouvernement pour nous protéger? Le nombre d’ouvriers agricoles chassés des fermes sous le gouvernement démocratique est plus élevé que sous le régime de l’apartheid. Nous sommes des Africains, mais des Africains sans Afrique!

Animateur :
Ce n’est que la «pointe de l’iceberg» de la situation qui prévaut vraiment dans certaines fermes dans la province de Cap Occidental en Afrique du Sud. Il y a beaucoup d’autres incidents navrants d’agressions, de viols et d’expulsions illégales. Même si le gouvernement démocratique de l’Afrique du Sud fait tout son possible pour créer une vie meilleure pour tous les habitants, nous avons encore une longue et difficile bataille à livrer pour nos ouvriers agricoles dans ce pays.

Acknowledgements

Rédaction : M. C.J. Carolissen et Mme V.R De Wee, avec l’aide de Mme P. Congwana.
Remerciements à : Felicity Louise, Sara Beukes et Nosey Pieterse.
Révision : Chris Huggins, expert-conseil international en droits terriens

Information sources

Les groupes suivants travaillent à la promotion des droits des ouvriers agricoles dans la région de Cap Occidental en Afrique du Sud.

  • Women on Farm Project : Wendy Pekeur
    Fouroaks, Bird Street, P.O. Box 530, Stellenbosch, 7599
    Téléphone : 021 8872960 / 021 887 2968.
    Télécopieur : 021 887 2963.
  • Society Development Trade Union : Munadia Moosa
    93 Durban Street, Worcester 6850
    Téléphone : 0233472234/023 3477083.
    Télécopieur : 023 3426346.
  • Black Association of the Wine and Spirits Industry : Nosey Pieterse
    AJ Du Toit Building, Kohler Street, Paarl 7620
    Téléphone : 021 863 3151
    Télécopieur : 021 863 2321
    Cellulaire : 0828051745
    Courriel : mandrews@tansi.org.za