L’importance du savoir indigène

Questions sociales

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Dans ce texte, nous présenterons quatre histoires sur des personnes vivant en milieu rural et sur le savoir indigène de différentes régions du monde. Ces textes ne sont pas de véritables scripts radio mais nous espérons qu’ils vous donneront des idées et de l’inspiration pour vos propres programmes sur des thèmes tels que:

  • L’influence positive des rites locaux sur l’agriculture durable.
  • Les solutions des fermiers locaux contre les parasites végétaux et les insectes nuisibles.
  • Les pratiques indigènes pour fertiliser le sol.
  • Les méthodes indigènes pour recueillir de l’eau.
  • Les tabous traditionnels sur les pratiques néfastes pour l’environnement comme la coupe des arbres sur les sites sacrés et en d’autres endroits.
  • Les conséquences de la disparition des dialectes sur la culture locale.

Le meilleur moyen de bien préparer vos émissions sur le savoir indigène et ses pratiques est de rendre visite aux personnes chez-elles et de leur demander quelles sont les pratiques utilisées pour leurs cultures et les soins médicaux. Insistez pour parler aux femmes et aux personnes âgées car elles détiennent beaucoup d’informations qu’elles peuvent partager. Si les gens estiment que vous voulez apprendre quelque chose d’eux, ils vous conteront beaucoup d’histoires. Demandez toujours la permission aux personnes concernées avant de partager leur savoir avec d’autres.

Texte

#1 Les fermiers qui entendent des histoires sur d’autres fermiers utilisant le savoir traditionnel réaliseront qu’ils possèdent leurs propres solutions n’ayant pas besoin d’une aide extérieure. Pensez à utiliser l’histoire qui suit comme exemple. Suivez l’émission avec un groupe de discussion au sein duquel des fermiers, des vulgarisateurs et la population locale partageront des récits semblables basés sur leurs expériences.

En Inde, certaines espèces de chenilles (Helicoverpa sp.) posent problème aux fermiers qui cultivent les pois du Congo (Cajanus cajun). Jusqu’à une date récente, la majorité des fermiers de la région de Mahabubnagar dans l’Etat de Andhra Pradesh utilisaient des pesticides chimiques pour éliminer les chenilles. Les pesticides étaient coûteux et leur efficacité limitée.

Un fermier âgé, M. Bitchappa, a parlé des pratiques indigènes aux cultivateurs de pois du Congo. Voici ce qu’il leur a dit:

«Cherchez les lieux de reproduction des chenilles dans les champs. Si vous voyez trop de chenilles dans les plantes, appelez votre famille et vos amis. Ensemble, parcourez le champ et secouez les plantes doucement pour que les chenilles tombent.
Ramassez les chenilles et mettez-les dans un drap ou dans grand morceau de tissu.
Une personne peut traîner le drap sur le sol entre les rangs de cultures pendant que deux autres secouent les plantes.
Vous pouvez retirer les larves du drap et les tuer ou laisser quelques poules vous suivre et manger les vers bien gras!
Trois personnes peuvent ainsi parcourir un demi-hectare par jour et vous pouvez répéter cette pratique à chaque fois que des chenilles envahiront vos cultures».

Pendant longtemps, la méthode que M. Bitchappa n’était pas approuvée par les scientifiques du monde de l’agriculture. Ils pensaient que cette méthode n’était pas efficace et qu’elle coûtait cher en raison de la main d’œuvre. Récemment, un important institut scientifique indien a mené une étude sur cette méthode; il s’est avéré qu’elle était à la fois peu coûteuse et efficace.

Elle est moins chère que les vaporisateurs chimiques même avec le coût de la main d’œuvre. De plus, elle est efficace. De nombreux fermiers indiens utilisent donc à nouveau cette méthode ancienne.


#2 Le savoir indigène englobe beaucoup de choses importantes pour la population locale que les recherches scientifiques n’étudient pas. Le passage suivant peut faire l’objet d’une de nos émissions. Elle peut être suivie d’interviews menées auprès des populations locales qui ont des connaissances sur les aliments sauvages.

Les scientifiques du monde agricole et forestier ont longtemps concentré leurs recherches sur les «cultures essentielles» et n’ont pas abordé d’autres sujets tout aussi importants. Par exemple, ils n’ont pas étudié «l’alimentation sauvage». Les aliments sauvages peuvent comprendre les plantes et les animaux que l’on peut manger mais qui ne sont pas cultivés et élevés; on les chasse et on les cueille. De nombreuses cultures dépendent de ce type d’alimentation. Ce peut être des fruits, des légumes à feuilles vertes, des plantes productrices d’huile, des champignons, des insectes comestibles et de petits animaux de broussailles («bushmeat»). Par exemple, l’agriculture du peuple Bungoma au Kenya est dominée par la culture du maïs, mais ils mangent au moins 100 autres espèces de fruits et de légumes. Les Tswana, un peuple du Botswana, utilisent 126 plantes et 108 animaux pour s’alimenter. Ils connaissent les meilleurs endroits où les trouver, savent les chasser et les conserver. L’alimentation sauvage joue donc un rôle important surtout en période difficile comme les sécheresses et sont essentielles surtout pour les femmes, les enfants et tous ceux qui doivent survivre.


#3 La science moderne sépare différents types de savoirs mais le savoir indigène englobe entre autres le savoir spirituel, environnemental et agricole dans une même culture. Le savoir indigène est donc une culture dans son ensemble. L’exemple suivant illustre cette idée en étudiant le rôle des croyances religieuses dans la gestion des marécages dans une région du Zimbabwe. Vous pouvez rechercher des exemples dans votre propre culture pour créer une nouvelle émission. Les auditeurs seront probablement intéressés par la comparaison entre leur approche de la gestion de l’eau et du sol et celle présentée dans ce texte.

A Zimuto, au Zimbabwe, l’eau est rare et les sécheresses fréquentes. Elles détruisent les récoltes, menacent les troupeaux et assèchent les nappes phréatiques. Les gens cultivent des plantes qui survivent aux sécheresses comme les arachides, le millet et le sorgho.

A Zimuto, les croyances traditionnelles et les coutumes aident les habitants à gérer les marécages. A titre d’exemple, voici l’histoire d’un marécage appelé Chitafina. La croyance populaire veut que ce marécage ait été formé lors d’une cérémonie traditionnelle. Après la cérémonie, une grande quantité d’eau suinta du sol. On croit que depuis, le marécage s’est étendu.

Peu après la formation du marécage, des femmes ont fait des sillons pour y planter des tubercules mais un lion est venu s’étirer sur les sillons. Les gens ont donc cru que c’était là un signe et ont arrêté de cultiver des plantes à cet endroit. Des sorciers locaux ont conseillé d’abandonner les sillons et leur accès a été interdit. Depuis cette période, le marécage se développait bien. De nombreuses plantes, dont des plantes médicinales, y poussaient.

Lorsque l’on perturbait une fois de plus la zone marécageuse, elle s’asséchait et la végétation disparaissait. Cela fut interprété comme un signe du monde spirituel. Les habitants ont utilisé les pratiques traditionnelles à nouveau et les plantes médicinales ont repoussé. Le marécage prospérait à nouveau et constituait une importante source d’eau dans la région.


#4 Pour de nombreuses cultures, préserver le savoir indigène est essentiel. L’histoire suivante présente des pratiques traditionnelles menacées dans une région des Etats-Unis. Vous pouvez vous inspirer de cette histoire pour introduire une discussion sur la disparition du savoir traditionnel dans vote communauté.

Dans de nombreuses régions du monde, les gens sont contraints d’abandonner leur mode de vie traditionnel pour des raisons politiques et économiques. Malheureusement, cela signifie qu’ils perdent aussi leur savoir traditionnel. Aux Etats-Unis, les peuples indigènes d’Alaska ont longtemps survécu grâce à la pêche et à la chasse. Depuis des temps anciens, les peuples d’Alaska partaient à la chasse pour de longues périodes. Les enfants apprenaient beaucoup pendant ces périodes. La mère leur apprenait à découper le poisson et à le conserver. Elle leur racontait aussi des histoires sur leurs ancêtres. Le père apprenait à ses fils comment réparer les filets pour la pêche et à les mettre à l’eau. Les garçons apprenaient aussi l’emplacement des sites ancestraux, ils chassaient et ramassaient du bois. Beaucoup de familles dépendent de ces activités pour leur alimentation.

Aujourd’hui, il devient difficile pour les peuples d’Alaska d’utiliser leurs pratiques traditionnelles. Si ces peuples ne peuvent plus vivre selon leur mode de vie, tout ce savoir pourrait disparaître constituant une grande perte pour leur culture.

Conclusion

Ces histoires mettent en scène certains rôles du savoir indigène au sein des communautés. Le savoir indigène apporte des solutions en matière d’agriculture et résout les problèmes de sécurité alimentaire. Le savoir indigène est un apport à la protection de l’environnement et vital pour la survie des cultures. Cependant, il faut être conscient que les méthodes indigènes ne sont pas toujours utiles et appropriées. Certaines pratiques traditionnelles sont néfastes et inappropriées et elles devraient être jugées avec le même scepticisme que l’on applique à la science.

Le monde change très vite et le savoir indigène peut disparaître. Il est donc sage de faire des efforts pour le préserver. De même, faut-il s’attendre à ce que les pratiques traditionnelles évoluent. Les personnes vivant en milieu rural expérimentent, adaptent et modifient constamment les idées et les méthodes traditionnelles.

Acknowledgements

Contribution: Vijay Cuddeford, Toronto, Canada.

Révision: Stephen Langill, Research Associate, International Development Research Centre, Ottawa, Canada.

Information sources

« Shake off those caterpillars« , Spore, No. 90, décembre 2000, page 6. Technical Centre for Agricultural and Rural Cooperation, Postbus 380, 6700 AJ Wageningen, The Netherlands. Tél: (31 317) 467100, Fax: (31 317) 460067, E-mail: cta@cta.nl

« Recovering indigenous knowledge: The pigeonpea shake-down, » International Crops Research Institute for Semi-Arid Tropics (ICRISAT), Patancheru 502 324, Andhra Pradesh, Inde. Tél: (91 40) 3296161 to 3296179, Fax: (91 40) 3241239, E-mail: giar.org

« You cannot fix indigenous knowledge: Thomas Odhiambo speaking with Johan van der Kamp, » ILEIA Newsletter, Volume 6, No. 1, mars 1990, pages 3-5. Centre for Research and Information on Low-External-Input and Sustainable Agriculture, PO Box 64, 3830 AB Leusden, The Netherlands. Tél: (31 33) 494 30 86, Fax: (31 33) 495 32 79, E-mail: ilea@ileia.nl

« Bio-cultural diversity in Zimbabwe, » par Cosmas Gonese, COMPAS Newsletter No. 2, octobre 1999, pages 7-9. Compas, PO Box 64, 3830 Leusden, The Netherlands. Tél: (3133) 4943086, Fax: (31 33)4940791, E-mail:compas@etnl.nl

« Women and biodiversity conservation, » par Vanaja Ramprasad, COMPAS Newsletter, No. 2, octobre 1999, pages 24-25. Compas, PO Box 64, 3830 Leusden, The Netherlands. Tél: (3133) 4943086, Fax: (31 33) 4940791, E-mail: compas@etnl.nl

« A student’s view on subsistence and leadership: On subsistence, » par Atchak Desiree Ulroan, Sharing our Pathways, Volume 6, No. 1, page 13, janvier/février 2001. The Alaska Native Knowledge Network, University of Alaska Fairbanks, PO Box 756730 Fairbanks, Alaska, USA 99775-6730. Tél:  (907) 474-5086, Fax: (907) 474-5615, E-mail: fyankn@uaf.edu